Barth’ et Madiambal seront toujours debout

Dans le cirque tragique qu’est devenu notre pays, avec des autorités goûtant sans limite à toutes les tasses de l’ivresse du pouvoir, en moins d’un an de règne, le tout-puissant Premier ministre continue avec sa valse d’intimidations et d’actions ciblées pour chercher à abattre des ennemis et à les fragiliser davantage. Ses dernières manœuvres en date sont les convocations du maire de Dakar, Barthélemy Dias, et celle du journaliste Madiambal Diagne, fondateur de ce canard que vous avez en main. Toujours dans les œuvres basses allant dans le champ de la politique politicienne et des mesquins comptes, le Premier ministre pense ainsi faire taire toute voix discordante.
La Justice peut lui permettre d’avoir un pays où toutes les voix contraires et les discours sérieux face à sa gestion des affaires de tous seront écartés du débat public. Il pense régner en maître sans opposition et en seigneur d’une bonne conscience, qui envoie ses sbires pour mater toute velléité contraire. Ses manœuvres sont tellement maladroites, mal inspirées et belliqueuses, qu’on voit de loin le sceau d’amateurisme et la logique aveugle d’une main de fer qui voudrait faire du mal jusqu’à taper sur de l’acier. C’est sur le temps long que notre tout-puissant Premier ministre comprendra et qu’il se lassera de vouloir dicter des consciences, et ne pourra jamais dompter les esprits libres qui pullulent dans ce pays.
Pour avoir été un opposant qui a fait de l’irrévérence, l’impertinence et l’outrage ses marques de fabrique, Ousmane Sonko se montre hostile à toute critique et toute adversité. Il peut être chagriné par l’adversité qu’il peut avoir en face, mais qu’il se mue en autocrate pour imposer des conduites ne passera pas. Au bout du compte, certaines de nos institutions en deviennent ridicules à vouloir mener pour lui des combats par procuration. Sa meute d’obligés et de défenseurs téméraires peut occuper les premiers rangs dans le dessein de lui cirer une statue luisante, mais impliquer dans ce rodéo la Justice, l’Administration et certains corps régaliens ne fait que fragiliser le modèle démocratique sénégalais et transformer davantage notre Etat en république bananière où tout bouge aux caprices d’un prince. Encore que ce prince qui se sent tout puissant n’a pas été consacré chef suprême et commandeur de toutes nos destinées, comme s’il était président de la République.
Des élus légalement et légitimement portés au Parlement se voient du jour au lendemain frappés par la sanction de la déchéance de leurs titres et mandats. Un maire d’une ville cosmopolite comme Dakar en vient à perdre un temps fou dans des auditions sans queue ni tête qui semblent avoir pour objectif d’exercer sur lui une pression psychologique dans l’optique de lui arracher à terme son mandat de premier magistrat de notre capitale. Logique pour logique, les procédures qui ont été menées pour tenter d’arracher à Barthélemy Dias son mandat de député doivent également s’appliquer pour Ousmane Sonko qui a dit suspendre son mandat d’élu. Les condamnations contre sa personne par la Justice du pays restent définitives et il aura épuisé toutes les voies légales de recours qui lui étaient ouvertes. Aller chercher donc la logique de vouloir dépouiller Barthélemy Dias… La même sanction ne doit pas laisser le tout-puissant manitou indemne.
Pour Madiambal Diagne, le dispositif est le même, avec un cercle d’avocats qui s’attaque à lui sur les mêmes dossiers. Convocations, procédures judiciaires à n’en plus finir, avec une trentaine d’avocats ou plus, le maître a désormais les moyens de faire perdre du temps à tous. Le manuel de procédure est assez connu et le disque finit par être rayé à force d’être joué. Il a conscience d’aller prendre sa part du supplice fatalement réservé dans ce pays à tout citoyen honnête et démocrate.
Une chose dont je suis certain concernant Barthélemy Dias et Madiambal Diagne, est qu’ils sont et resteront des hommes courageux et debout. Ils ne sont aucunement gênés par l’adversité et sont conséquents dans leur posture. Ils savent faire face, recevoir des coups et surtout en donner. Ils ont le courage de leurs idées et n’ont pas froid aux yeux, surtout que le manitou qui leur veut une déchéance sociale, politique et morale n’aura jamais eu dans tous ses démêlés avec la Justice de ce pays, la force de se tenir droit et d’affronter ses adversaires, sans chercher de faux-fuyants. L’histoire récente est là pour parler, nul besoin de chercher loin. A ces deux grands hommes, tout mon soutien. Heureux qu’ils aient le courage de rester debout.
Par Serigne Saliou DIAGNE / saliou.diagne@lequotidien.sn