Belgique – Pour le retour à l’ordre constitutionnel à Conakry : Les forces vives de la Guinée battent le macadam à Bruxelles

L’antenne belge des forces vives de la Guinée a battu le macadam ce dimanche pour exiger le retour à l’ordre constitutionnel à Conakry. La marche, qui a pris fin à la place Luxembourg devant la Commission européenne, a été le cadre pour interpeller le gouvernement de Doumbouya, reproché de «confisquer le pouvoir», de le libérer tout en organisant comme promis des élections démocratiques, libres et transparentes d’une part, et d’autre part, de libérer les membres du Front national pour la défense de la Constitution (Fndc) qui seraient pris en «otage» par le gouvernement en place.Par Pape Moussa DIALLO (Envoyé spécial à Bruxelles) –
Après les ressortissants de la Mauritanie établis en Belgique la semaine dernière, c’était au tour de l’antenne belge des forces vives de la Guinée de sortir dans les rues de Bruxelles pour exiger le retour à l’ordre constitutionnel à Conakry. De la porte de Namur où ils s’étaient donné rendez-vous en masse, les ressortissants de la Guinée en Belgique ont arpenté les routes de Bruxelles jusqu’à la place Luxembourg, devant le siège de la Commission européenne où la marche a pris fin. Armés de pancartes, de banderoles ou encore de cartons rouges, ils ont scandé tout le long de leur itinéraire : «Doumbouya assassin», «à bas la dictature», «nous exigeons le respect des engagements», «vive la liberté de la presse», «non à la justice expéditive», «les militaires au camp», «les militaires à la frontière», «le retour à l’ordre constitutionnel», entre autres. Devant le siège de l’Ue, l’hymne national, qui a été chanté à l’unisson par les marcheurs, a fortement résonné pour exprimer leur attachement à leur Patrie et l’engagement à la «sauver».
Revenant sur la marche, Aliou Baldé, leader des forces vives de la Guinée en Belgique, explique : «On est sortis massivement pour dire qu’on n’est pas d’accord de la gestion de notre pays par Mamadi Doumbouya qui a pris le pays avec un million de promesses qu’il n’arrive pas à respecter.» Le leader des forces vives de la Guinée en Belgique de poursuivre : «C’est notre devoir de l’interpeller pendant qu’il est temps pour le ramener à la raison. Soit il respecte ses engagements ou alors il libère le pouvoir.» Afin de permettre, selon lui, d’installer une transition civile qui pourra organiser des élections libres et transparentes. Très en verve contre le pouvoir en place en Guinée, M. Baldé enfonce le clou : «Le Président Doumbouya est en train d’assassiner des jeunes de 17, 18 ans parce que ces derniers réclament uniquement de l’électricité et/ou plus de démocratie.»
Il ne décolère pas par rapport aux promesses non tenues par le pouvoir en place. Le leader des forces vives de la Guinée en Belgique ajoute qu’il (Mamady Doumbia) nous «avait promis qu’au 31 décembre 2024, il allait organiser des élections libres, transparentes et inclusives avant de partir. Malheureusement, il nous montre par ses agissements qu’il a l’intention de confisquer le pouvoir». Selon lui, c’est contre cette forfaiture que les forces vives ont décidé d’élever la voix pour se faire entendre. «Mamadi Doumbouya a imposé une dictature qui ne dit pas son nom en Guinée. Il a fermé les médias, enfermé des défenseurs des droits de l’Homme. Il a poussé des responsables politiques en exil. Il est en train d’enlever des leaders, des chefs de famille sans aucune forme légitime. Cela est inacceptable et nous allons faire face», a accusé Aliou Baldé qui, dans la foulée, exige la libération de Fonikémangué et Bilo Ba.
Ces leaders du Front national pour la défense de la Constitution auraient été «enlevés» en pleine nuit à Conakry. La réaction du procureur, qui aurait produit un communiqué pour dire qu’il ne savait pas où étaient ces derniers, n’est pas du goût des forces vives de la Guinée en Belgique. Présent à la rencontre, Diallo El Hadj Moussa, Guinéen d’origine et acteur politique belge au sein du Cdh (les engagés), député au parlement bruxellois et sénateur du Royaume de Belgique, n’a pas été insensible à l’action des marcheurs. Profitant de la tribune qui lui a été offerte, il a livré un message d’espoir, de paix, d’unité et de fraternité pour une Guinée unie et prospère. A l’en croire, «chacune et chacun sera devant son miroir pour se demander qu’est-ce que j’ai fait de mon pouvoir, de mon autorité pour que mon Peuple aille de l’avant. Cette question immanquablement comme la mort nous sera posée».
Il poursuit à cet instant-là, «bien heureux sera celui qui dira j’ai fait de mon mieux pour que mon Peuple aille de l’avant. Malgré les difficultés, les crispations, les divergences, nous sommes tous des Guinéens. Demain, une autre Guinée est possible, on doit se mettre tous ensemble pour réussir son édification». Revenant sur la symbolique d’adresser son message de paix et d’unité à ses frères devant le siège du Parlement européen, notre interlocuteur de dire : «Nous sommes dans un espace plein de sens, de symboles. Le Parlement européen qui s’est constitué par des Etats qui, il y a quelques années, ne se parlaient pas, cohabitent aujourd’hui. C’est un message d’espoir, d’union et de rassemblement. Pour moi, c’est un exemple qui peut faire avancer la cause africaine, de l’unité africaine. C’est également notre responsabilité à tous.»
Le leader des forces vives de la Guinée en Belgique n’a pas manqué d’adresser de chaleureux remerciements aux ressortissants guinéens en Belgique et les environs qui sont sortis massivement répondre à la marche. Salifou Fodé Camara, représentant de l’Union des forces républicaines (Ufc) de Sidiya Touré, a fait le déplacement de la France pour être aux côtés de ses frères et sœurs à Bruxelles. Dans un discours poignant, il a fustigé les agissements du pouvoir en place, les multiples abus, la privation des droits et libertés, tout en demandant au pouvoir en place de créer les conditions d’organiser des élections libres et transparentes pour éviter au pays de sombrer dans le chaos.
Combat porté à l’Hémicycle belge
L’antenne belge des forces vives de la Guinée Conakry n’est pas seule dans son combat pour le retour à l’ordre constitutionnel en Guinée. Elle peut compter sur le soutien de Lydia Mutyebele Ngoi, députée fédérale à l’Assemblée nationale belge. Originaire du Congo, cette dernière a tenu à être présente pour manifester son soutien et sa solidarité à ses «frères et sœurs africains de la Guinée» lors de leur marche pacifique. «Aucune personne ne doit mourir. J’ai demandé à ce qu’on m’abreuve d’informations afin que je puisse porter le combat», dit-elle. Lydia renseigne qu’elle posera une question au ministre des Affaires étrangères de la Guinée lorsque des cas de disparition de personnes lui seront rapportés. Egalement, elle compte user de sa position de députée pour interpeller la Belgique sur sa position par rapport à la situation en Guinée où, explique-t-elle, «trône un gouvernement qui n’est pas issu des urnes, mais qui est arrivé au pouvoir par un coup d’Etat». Sur la forte mobilisation des Guinéens lors de la marche, Mme Lydia enchaîne : «Le politique est attentif lorsqu’il voit une forte mobilisation comme celle-ci en Belgique. Cela veut dire que ça ne va pas. Qu’il y a un malaise profond dans leur pays.» C’est, selon elle, une manière de dire au Président Doumbouya qu’on ne veut plus de son gouvernement «sanguinaire, des rapts, des disparitions» et qu’on veut «une véritable liberté de la presse». Elle exhorte le Président Doumbouya à «respecter ses engagements, ce qu’il avait dit». La marche de l’antenne belge a été encadrée par la police tout au long de son itinéraire, avant de prendre fin devant le Parlement européen. Des manifestations sont annoncées les semaines à venir partout en Europe et dans des grandes villes africaines comme Dakar pour rappeler Doumbouya à l’ordre.