Après le Kenya, le Sénégal est le deuxième pays en Afrique à expérimenter le port du bracelet électronique. 50 inculpés ont déjà bénéficié de ce bracelet qui leur évite de faire de la prison et leur offre la liberté de vaquer à leurs occupations. Les journalistes et la Société civile sont invités à vulgariser les avantages de ce système pénitentiaire. L’Etat compte ajouter encore 1000 autres bracelets électroniques. Par Justin GOMIS –

Depuis l’adoption des lois qui ont consacré l’assignation à résidence avec surveillance électronique et le placement sous surveillance électronique en 2020, le Sénégal a déjà utilisé 50 bracelets électroniques sur les 1000 dont il dispose. Parmi les personnes qui ont bénéficié de cet outil, 10 ont déjà purgé leur peine et recouvré leur liberté totale en enlevant leur bracelet, a informé Alassane Ndiaye, directeur adjoint  des Affaires criminelles et des grâces, hier lors de l’atelier de partage et de sensibilisation sur le bracelet électronique avec les journalistes et la Société civile.

Aujourd’hui, il ne reste que quarante inculpés qui portent encore le bracelet électronique. D’après  toujours le coordinateur du projet de sensibilisation sur le bracelet électronique, toutes les régions présentent des cas de placement sous surveillance électronique, hormis celles du Sud du pays. Une  situation qui s’explique par l’absence de formation des magistrats.

En fait, le port du bracelet électronique est adopté dans le but de lutter contre la surpopulation des prisons, si l’on sait qu’avec les 37 établissements pénitentiaires, le pays compte 12 mille prisonniers. «Utilisé pour la première fois en 1985, aux Etats-Unis, le bracelet électronique s’est rapidement répandu dans les pays occidentaux comme alternative à l’incarcération  et outil pertinent  d’humanisation  de la sanction pénale. Très ancré dans la protection des droits de l’Homme, notre pays ne pouvait pas être en reste ; pour avoir depuis quelques années, entamé une mutation de son système pénal, visant à lutter contre la surpopulation carcérale et améliorer la réinsertion sociale des personnes condamnées», a dit Ismaïla Madior Fall, ministre de la Justice et Garde des sceaux. D’après lui, «plusieurs mécanismes ont été consacrés, allant de la libération  conditionnelle au travail au bénéfice de la société, en passant par la semi-liberté ou le fonctionnement de la peine, sans oublier la probation, l’ajournement et la dispense de la peine». Pour lui, avec cette volonté de doter le pays d’un système pénitentiaire plus performant, il fallait recourir au port du bracelet électronique.

Cependant, le Garde des sceaux a tenu à préciser que «le port du bracelet ne peut être envisagé que lorsqu’il est sollicité ou opté par l’inculpé ou le condamné». C’est dans le souci de garantir «la représentation en Justice du premier et assurer le suivi post-sentenciel du second, sans porter préjudice au maintien des liens familiaux, ni compromettre la situation professionnelle».
De l’avis du Garde des sceaux, «le port du bracelet électronique ne saurait être considéré ni comme un acte de rabaissement ou d’humiliation pour les condamnés ou présumés auteurs d’infractions, ni comme une mesure   de mitigation ou d’encouragement  de la criminalité». Selon Ismaïla Madior Fall, le bracelet électronique «est un moyen de lutte contre la délinquance et la récidive, mais également un gage de sécurité pour la population».  A l’en croire, «il limite et surveille les déplacements des bénéficiaires, tout en préservant leur intimité». Mais malgré son utilisation par différentes catégories de personnes, son port suscite «interrogation et incompréhension», a relevé  le ministre de la Justice. Une situation qui indique toute la pertinence de cet atelier de partage et de sensibilisation à l’endroit des journalistes et de la Société civile, dans le but d’aider à la vulgarisation de «ce nouveau mécanisme qui n’en est qu’à sa phase expérimentale».

Selon lui, l’Etat et les citoyens doivent travailler à la perfection et la consolidation du bracelet électronique dont «beaucoup de pays de la sous-région voudraient s’inspirer». En attendant de recevoir aujourd’hui la Société civile, la Direction  des affaires criminelles et des grâces a organisé une visite du Centre de surveillance électronique (Cse) à  l’intention des journalistes. L’Etat promet de se doter encore de mille autres bracelets électroniques, portant le stock à deux mille.
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