Malgré les alertes lancées par les défenseurs des usagers des banques, le projet de loi portant sur les Bureaux d’information sur le crédit (Bic) a été adopté par l’Assemblée nationale sans débat.

Les députés de la majorité ont choisi d’éviter le débat en adoptant le projet de loi relatif aux Bureaux d’information sur le crédit (Bic). Sur proposition de la députée Aïda Sow Diawara, l’Hémicycle a majoritairement voté l’adoption de cette loi qui suscite pourtant une grosse levée de boucliers de la part des organisations de défense des usagers des banques et services financiers. Mais les députés n’ont visiblement pas partagé ces inquiétudes à quelques exceptions près. Ousmane Sonko est de ceux qui se sont insurgés contre cette façon de faire. «On a débattu ici des véhicules des députés, une question beaucoup moins importante que la loi qui nous est soumise et qui a un impact au double plan financier et de la protection des données personnelles de millions de Sénégalais et l’Assemblée nationale trouve le moyen de voter sans débat», fustige le député. Il est soutenu par Cheikh Bamba Dièye qui estime que «les banques sont surpuissantes dans le pays, alors que leurs clients sont démunis. Il était du rôle de l’Etat du Sénégal de protéger les Sénégalais. Livrer les données personnelles des citoyens à des banques, c’est les fragiliser et ça ne peut pas faciliter le crédit, parce que les banques vont non seulement leur faire payer ces nouvelles tarifications, mais elles auront aussi plus de maîtrise sur leurs capacités financières». Dans la même veine, Ousmane Sonko souligne que le secteur bancaire est surpuissant avec des résultats nets de 63 milliards de francs Cfa et une activité en croissance de 12% en 2016. «Le citoyen est exploité par une politique des agios extrêmement chers, des taux d’intérêt qui dépassent le plafond de la banque centrale, la politique des découverts et des primes d’assurance qui ne sont jamais restitués».
Pour le député El Hadji Sall, au moment où l’affaire de la société Cambridge analytica, accusée d’avoir acquis les données de 50 millions d’utilisateurs Facebook pour peser dans la campagne présidentielle de Donald Trump, fait rage, il importe d’examiner cette loi de façon plus approfondie. Mais ces plaidoiries n’auront servi à rien puisque l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi n°10/2018 qui réglemente les Bureaux d’information sur le crédit. «La vocation du Bic est de collecter des données auprès des organismes financiers, des sources publiques et de grands facturiers (sociétés de téléphonie et sociétés de fourniture d’eau et d’électricité) sur les antécédents du crédit ou du paiement d’un client. Ces données sont ensuite traitées afin d’établir des rapports de solvabilité et d’autres services à valeur ajoutée dont pouvaient se servir des prêteurs dans les prises de décision de crédit», explique le texte soumis aux députés.
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