Au Burkina Faso, l’antenne radio et télévisée Radio Omega a été suspendue cinq jours par le Conseil supérieur de la communication. Cette décision est motivée, selon le communiqué du Csc, par un manquement grave dans le traitement de l’information de l’attaque de Solhan et par la psychose que cela a créée dans la population.

Le 5 juin dernier, au lendemain de l’attaque de Solhan dans l’est du pays, c’est la confusion qui règne dans la province du Yagha. Des rumeurs, qui seront vérifiées plus tard, d’un retour des assaillants sur les lieux du massacre circulent, mais d’autres rumeurs, accompagnées de photos, évoquent une attaque d’un bus sur l’axe Sebba-Dori. Plusieurs médias, dont Radio Omega, font alors état de 47 morts dans ce supposé nouveau drame. Quelques heures plus tard, un communiqué de l’état-major général des armées dément cette information, et aucune source n’est en effet venue démontrer la véracité de cette attaque. Le 6 juin, Radio Omega annonce se séparer de son rédacteur en chef suite à cette erreur, mais le Csc décide d’auditionner le Directeur général de la radio, Ouezzin Louis Oulon, et de suspendre la radio, propriété de l’actuel ministre burkinabè des Affaires étrangères, Alpha Barry, jusqu’au 13 juin.
Une décision que le directeur de la radio ne comprend pas. «Ils sont respectueux de la République et toute mesure qui nous concerne, nous l’exécutons. Mais nous disons qu’elle est disproportionnée, abusive et partiale. Et dans l’histoire du Burkina Faso, c’est la première fois qu’une telle mesure est prise à l’encontre des médias. C’est une sorte de musellement de la presse et nous allons arriver à une situation où exercer ce métier doit être un sacerdoce si cela ne l’est pas déjà», déplore Ouezzin Louis Oulon. Le directeur de Radio Omega affirme également que la Radio nationale a diffusé la même information sans avoir été sanctionnée. Contacté, le gouvernement n’a pas souhaité réagir.
Dans une conférence de presse donnée devant de nombreux médias, le président du Csc, Me Soahanla Mathias Tankoano, a justifié la sanction imposée à Radio Omega par la «protection de l’informa­tion véhiculée aux populations». Il estime qu’Omega est responsable de la diffusion de deux fausses nouvelles : l’attaque du bus sur l’axe Sebba-Dori, et celle d’un autre village (Dambam) de la province du Yagha. Quant à Rfi et la Radiodiffusion télévision nationale du Burkina, leurs responsables seront auditionnés ce jour par l’équipe du Conseil supérieur de la communication. «La sanction ne vise pas à étouffer un média, ça je peux vous rassurer. Bien au contraire, c’est vraiment replacer nos médias dans leur rôle essentiel, qu’ils soient des sources crédibles pour l’opinion publique», souligne Maître Mathias Tankoano, président du Conseil supérieur de la communication.

Réaction de Rsf
Dans un communiqué de presse, l’organisation Re­porters sans Frontières estime que la mesure est «trop sévère». «Cette décision de suspension est exagérée. Le groupe de médias ne méritait pas une telle sanction, d’autant qu’il a fait preuve de sa bonne foi en prenant des dispositions pour corriger les informations jugées mauvaises initialement diffusées. Cette suspension envoie un signal particulièrement inquiétant pour la presse privée, dans un pays pourtant considéré comme un exemple régional en matière de liberté de la presse», déclare le directeur du bureau Afrique de l’Ouest à Rsf, Assane Diagne.
Avec Rfi