L’audience de mise en accusation des 107 inculpés dans le procès du putsch manqué, conduit par le général Gilbert Diendéré en septembre 2015, s’est ouverte hier à Ouagadougou. On saura à l’issue des débats, qui pourraient durer plusieurs jours, si les charges sont confirmées ou non.
Alors que les alentours du Tribunal, situé au centre-ville de la capitale, sont quadrillés ce mercredi par un dispositif sécuritaire, une dizaine de membres de l’Association des victimes du coup d’Etat se sont mobilisés en face du bâtiment, banderoles en main, pour réclamer justice.
«C’est une sortie pacifique, sans pression sur les magistrats pour témoigner que les blessés sont présents. En tant que blessés, nous avons un droit de regard sur ce dossier. Que les magistrats décident sans complaisance, parce que sans justice, il ne peut y avoir de réconciliation», martèle Honoré Savadogo, président de l’Association des victimes du coup d’Etat.
Et d’ajouter : «Nous avons vu dans la presse que le général Bassolé a écrit à Macron [le président français, à qui il a demandé d’intercéder en sa faveur en vue de l’obtention d’une permission de se faire soigner en France]. Nous réclamons vérité et justice. Mais si la justice n’a aucune charge contre un inculpé, qu’elle le libère.»
Audience à huis clos
L’audience de mise en accusation, qui s’est ouverte hier devant la chambre de contrôle du Tribunal militaire, est un préalable au démarrage du procès de ce dossier «sensible». Elle doit permettre de confirmer ou infirmer les charges retenues contre les 107 personnes poursuivies par la justice militaire burkinabè pour leur implication présumée dans le coup d’Etat manqué de septembre 2015, mené par le Régiment de sécurité présidentielle et le général Diendéré.
L’audience s’est ouverte à l’abri des regards. Les caméras des journalistes étaient également interdites. Les débats -à huis clos- vont durer plusieurs jours avant la tenue d’un procès qui devrait intervenir trois mois après la décision de la Chambre.
Dans la salle, autour du président de la Chambre, Jean-Marie Ouattara, quelques accusés étaient présents, dont les généraux Gilbert Diendéré et Djibrill Bassolé, le capitaine Dao ou encore le journaliste Adama Ouédraogo dit Damiss, ainsi que leurs avocats.
Les accusés entendus un par un
Selon les informations de Jeune Afrique, le président Jean-Marie Ouattara a d’abord procédé à une lecture du rapport du juge d’instruction. «Le général Diendéré a voulu faire des observations sur le rapport qui contient des éléments qu’il conteste. Le général a dit que cela concernait tout le monde, mais, il n’a pu le faire. Le président de la Chambre a répondu qu’il pourra le faire lors de son audience de mise en accusation», a confié à JA l’un des participants à cette première audience.
Au cours des débats qui ont suivi, les avocats ont émis le vœu que l’audience de mise en accusation réunisse l’ensemble des accusés. Une requête rejetée par la Chambre de contrôle, qui a finalement décidé que les accusés passeront un à un à la barre, à raison de dix inculpés par jour.
«Les avocats ont demandé que tous les accusés soient présents dans la salle. Mais, la Chambre n’a pas accédé à notre demande. Dans son imperium (capacité pour un juge à imposer ses décisions, au besoin par recours à la force publique, Ndlr), elle a décidé que chaque accusé passera avec son conseil», déplore Me Ollo Larousse Hien, avocat de Nicodème Bassolé, bénéficiaire d’un non-lieu, et de l’adjudant Ardjouma Kambou, mis en cause pour «complicité d’atteinte à la sûreté».
Pour l’avocat, «cela viole les droits de la défense. C’est le même dossier, il n’y a pas de raison que les 107 inculpés ne puissent pas avoir accès à la salle en même temps».
Diendéré attendu à la barre aujourd’hui
Selon la liste de passage établie par la Chambre, le général Diendéré, principal accusé dans ce dossier, est poursuivi notamment pour «atteinte à la sûreté de l’Etat», «crime contre l’humanité». Il se fera notifier ce jeudi 26 octobre les charges qui pèsent contre lui.
Parmi les 107 personnes mises en cause, 21 sont actuellement en détention à la Maison d’arrêt et de correction des armées et neuf autres, en fuite, sont sous le coup de poursuites pour «atteinte à la sûreté de l’Etat», «assassinat» et «complicité». 61 présumés accusés bénéficient quant à eux d’une liberté provisoire.