Seydou Guèye fait le bilan à mi-parcours de la campagne électorale. Le porte-parole de l’Apr, qui affirme que la tendance de Dakar s’est inversée, relève un «deal» entre Khalifa Sall et Idrissa Seck qui est lié à la Présidentielle de 2019.

Quelles lecture faite-vous du drame du stade Demba Diop qui a fait 8 morts ?
D’abord, je m’incline devant la mémoire des disparus et regrette justement ces violences qui commencent à être une habitude dans les grandes manifestations sportives. Je pense, quand même, que le Peuple sénégalais doit faire ce travail d’introspection. C’est un discours que l’on entend après chaque catastrophe. Mais on ne peut plus continuer dans ce sens, et c’est pour cette raison d’ailleurs que le président de la République a ordonné l’ouverture d’une information judiciaire et des enquêtes administratives pour pouvoir situer les responsabilités et faire appliquer la loi dans toute sa rigueur.

L’on a quand même beaucoup souvent critiqué les enquêtes qui n’aboutissent pas. Pouvez-vous, en tant que porte-parole du gouvernement, rassurer cette fois encore les Sénégalais ?
L’enquête ira jusqu’au bout et la loi sera appliquée dans toute sa rigueur, que ce soit du point de vue sportif ou pénal. Puis, des enquêtes administratives et des séquences judiciaires sont ouvertes puisque le procureur de la République a déclenché la procédure de l’enquête judiciaire.

Aujourd’hui on est pratiquement à 8 ou 9 jours de la campagne. Quel bilan en faites-vous de votre côté ?
Ah ! Benno bokk yaakaar concernant la caravane et la campagne de la tête de liste, nous sommes en cohérence avec nos objectifs parce que quand vous allez en campagne, vous avez une stratégie. En termes de vulgarisation, ce sont les réalisations du Président et puis de l’osmose qu’il doit y avoir avec les populations. Je crois que tous les soirs vous pouvez vous rendre compte vous-même, selon les relations qui sont faites de la tête de liste. Avec le Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne, ça se passe très bien. Sur Dakar qui est un enjeu spécifique – je sais que vous allez venir à cette question – ça se passe très bien.

Pas seulement Dakar…
Mais comme on veut localiser cette élection autour d’un enjeu sur Dakar, nous sommes au rendez-vous et aujourd’hui, nous avons inversé la tendance à Dakar. Si vous faites le décompte, nous avons réussi au niveau de la coalition à installer nos 19 comités électoraux sans violence, sans dispute et ça fonctionne. Nous sommes renforcés par la présence dans notre coalition de 12 maires sur 19. C’est important.

12 maires de Taxawu Dakar…
12 maires, puisque nous n’en avions qu’un seul maire sur les 19.
Qui ne sont pas forcément suivis par leurs électeurs…
Bah ! Ce sont les maires qui avaient contribué à faire élire celui que l’on présente comme un épouvantail.

Khalifa Sall ?
En l’occurrence.

Vous le citez ?
Eh oui, voilà.

Est-ce que la seule bataille pour Benno bokk yaakaar, c’est celle de Dakar ?
La bataille pour les Législatives, c’est de donner au Président Macky Sall une majorité à l’Assemblée nationale pour qu’il puisse continuer la courbe des bonnes actions qui sont utiles aux populations. Puisque dans tous les segments de la vie de la Nation, le Président a contribué, en 5 ans, à améliorer les conditions de vie de nos concitoyens.

Est-ce qu’on en n’a pas fait une Présidentielle avant l’heure ?
Non, c’est l’opposition qui veut en faire une Présidentielle.

En choisissant le Premier ministre et l’angle du bilan du Président, n’est-ce pas déjà une Présidentielle ?
Mais ce n’est pas une Présidentielle, puisque ce n’est pas une première qu’un Premier ministre dirige une liste dans notre pays. Le Président Macky Sall, à l’époque Premier ministre, avait conduit une liste aux élections législatives.

C’est dans un contexte de veille d’une Présidentielle…
Et nous ne sommes pas loin de ça. Quand vous avez dirigé un pays pendant 5 ans sur un mandat de 7, vous avez fait beaucoup pour transformer le pays : améliorer le quotidien des Sénégalais, alléger la dépense, régler 4 ou 5 défis essentiels qui sont le défi de la stabilité de la Casamance, celui de l’énergie puisque d’une structure déficitaire avec des émeutes de l’électricité, on est passé de 900 heures de délestage à moins de 36 heures aujourd’hui. Nous avons aussi réglé le défi du financement de notre agriculture puisque nous sommes en voie d’atteindre l’autosuffisance en riz et l’arachide qui est une ressource importante.
On est déjà en 2017 et on ne parle pas encore d’autosuffisance…
Vous vous arrêtez à 2016. La campagne de 2017 n’est pas encore là. Nous avons donc relevé le défi du financement de l’agriculture et de sa pérennisation à travers des programmes tels que le Pracas. Et c’est également important de souligner la stabilité de nos relations avec la Gambie. Chacun de ces 4 défis devrait valoir au Président Macky Sall une réélection en 2019. Je passe maintenant sur tout ce qui a été fait autour de l’inclusion sociale à travers la Couverture maladie universelle, le Prodac, les Bourses de sécurité familiale, le Pudc.

Vous démentez Idrissa Seck qui dit que la vision politique du Président Sall s’arrête à Diamniadio ?
Mais Idrissa Seck ne peut pas parler de vision puisqu’il se définit comme le jardinier des rêves de Me Wade. Il n’a jamais rien pu développer puisqu’il a passé tout son temps à dormir aux côtés de Me Wade.

Voulez-vous dire qu’il est aujourd’hui le «jardinier des rêves» de Khalifa Sall ?
Non moi je trouve ça un peu iconoclaste d’ailleurs. Comment Idrissa Seck qui est chef de parti, qui a été numéro 2 du Pds, 2e à la Présidentielle de 2017, peut-il accepter d’être dirigé par un homme qui n’a pas de parti. Khalifa n’a pas de parti et quand ils mettent l’accent sur Khalifa avec comme slogan «Je vote Khalifa», je dis que c’est eux qui veulent faire de cette élection une Présidentielle, en maîtrisant d’ailleurs tous les alliés Malick Gakou, Cheikh Bamba Dièye…

Idrissa Seck n’est plus un adversaire pour vous ?
Il a choisi le camp de l’opposition, donc c’est un adversaire.

Ou bien le vrai adversaire c’est Khalifa Sall ?
Non, pas du tout.

Pourtant, vous aviez dit tout à l’heure que Dakar c’est une bataille capitale ?
C’est eux qui veulent en faire une bataille et vous les journalistes qui faites de Dakar un enjeu spécifique. Mais moi ce que je retiens, c’est que la coalition Manko taxawu senegaal n’a aucun respect pour Idrissa Seck, Malick Gakou, Mansour Sy Djamil et Cheikh Bamba Dièye. Parce que quand vous dites «Je vote Khalifa», c’est que les autres ne comptent pas.

Mais ils sont dans une liste et il y a une tête de liste ?
Non, tout le monde a compris que le deal c’est : «Je soutiens Khalifa pour bénéficier de son soutien à la Présidentielle.» C’est eux qui sont dans la Présidentielle. C’est ça le deal de Idrissa Seck.

Quand vous le dites, ça veut dire que Khalifa Sall ne serait pas candidat ?
Non, c’est à eux de voir. Moi je ne présume de rien. En tout cas, en termes d’anticipation rationnelle, c’est ce qui est à la base de cette inflexion, de cette génuflexion de Idrissa Seck qui s’est courbé devant Khalifa Sall qui n’a pas de parti, qui n’a jamais été en son nom à une élection de ce type.

Il reste quand même jusqu’ici maître de Thiès que vous voulez aussi prendre à l’image de Dakar ?
Oui, notre ambition c’est de gagner tous les départements du Sénégal, y compris les circonscriptions de l’étranger. Et nous allons le faire sans complexe.

Vous avez, vous aussi, un défi à relever à la Médina ? Quel est votre état d’esprit après ces jours de campagne ?
Très optimiste au regard des dynamiques en œuvre. A la Médina, nous avons réussi à mettre en œuvre une synergie conquérante. Avec l’action des personnalités de l’Apr déjà : la contribution du doyen El Hadj Malick Sy «Souris» qui est le président de notre comité, l’engagement de Eva Marie Coll Seck, la forte capacité de mobilisation de notre jeune frère Cheikh Tidiane Ba. Et nous en avons fait la démonstration, l’autre jour, de Mame Mbaye Niang qui était venu contribuer à l’animation de la Médina.

Vous allez battre Bamba Fall ?
Oui, nous allons battre la tête de liste départementale de Manko taxawu senegaal, tant à la Médina que dans le reste des 18 autres communes de Dakar.

Vous ne craignez pas que Bamba Fall finisse par récolter les fruits de son emprisonnement ?
(Respire fortement) Mais on verra.

Que dites-vous des violences électorales notées à la Médina et à Grand Yoff ?
C’est condamnable, quel que soit le camp qui en est l’origine. Nous ne sommes pas en compétition électorale pour nous mener la guerre, mais pour mettre le citoyen au cœur de nos messages et de nos discours.

A Grand Yoff et à la Médina, on parle de provocation de Bby…
Pour la Médina, il n’y a eu aucune provocation puisqu’il y a 3 jours, le rapport de forces était de 1 à 10 au moins à notre faveur. On était dans une ambiance bon enfant avec le ministre de la Jeunesse. Nous avons fait notre itinéraire qui devait arriver sur le boulevard Général de Gaulle où Maïmouna Ndoye Seck menait une activité de sensibilisation électorale après une visite de proximité. En un moment, nos deux caravanes se sont croisées sur la Rue 22 et ça n’a pas duré 10 minutes. Ils ont attendu la fin de notre caravane pour les attaquer…

Ce sont les hommes de Bamba Fall ?
Bien sûr, c’est la caravane de Manko taxawu senegaal.

C’est la même qui a été accusée à Grand Yoff…
Moi j’appelle au calme et à la sérénité. De toutes les façons, il n’y a aucun intérêt pour continuer dans cette stratégie de violence qui n’est pas le fait de notre culture. L’Apr n’est pas un parti violent dans ses relations avec les adversaires. Il faut, en toute sérénité, savoir que nous sommes dans le temps de campagne qui doit être celui du débat.

La Raddho a dénoncé la photo du Président Sall sur les affiches de Bby. Qu’en dites-vous ?
La Raddho a le droit de penser ce qu’elle pense. Je pense le contraire. Dans ces élections, les candidats sont les candidats d’une coalition et le Président Macky Sall est le président de notre coalition. Ayant la conscience de sa posture de chef de l’Etat, il n’est pas impliqué ni engagé dans la campagne, même s’il a un intérêt évident pour le résultat.

La Raddho convoque «l’esprit» de l’arrêt du Conseil constitutionnel en 2001 interdisant le président de la République de figurer sur un bulletin aux élections législatives ?
Mais en 2002, c’était plus subtil et plus «njomboor (rusé)» puisque faute de vouloir mettre son image, il (Wade) avait voulu mettre son ombre. Il nous faut dépasser ce type de considérations. Le Président Macky Sall est le président de Benno bokk yaakaar.

Doit-il à ce titre battre campagne ?
Il ne bat pas campagne.

Il y en a qui le prônent, Aliou Sall par exemple…
Oui, c’est son point de vue. Le Président ne bat pas campagne. Je ne serais pas gêné, en revanche, dans sa posture de chef de l’Etat, qu’il  demande aux acteurs engagés dans la compétition de débattre.