Avocats de l’Etat : «Cette décision n’impacte pas la procédure»

Pour la Cour de justice de la Cedeao, les droits de Khalifa Sall et Cie ont été violés. Dans son verdict rendu hier, elle condamne l’Etat du Sénégal à lui verser 35 millions de F Cfa à titre de réparation. La défense crie victoire, mais les avocats de l’Etat tempèrent et soutiennent que cette décision ne va pas impacter le reste de la procédure.

Khalifa Sall peut afficher un sourire du fond de sa cellule. La Cour de justice de la Cedeao s’est, en effet, déclarée «compétente» à examiner sa requête introduite pour violation de ses droits ainsi que 5 autres de ses codétenus. «Le droit à l’assistance d’un conseil, le droit à la présomption d’innocence et le droit à un procès équitable des requérants ont été violés», lit-on dans l’arrêt rendu par la juridiction sous régionale. Egalement, elle considère que «la détention de Khalifa Sall, entre la proclamation des résultats des élections législatives par le Conseil constitutionnel du 14 août 2017, et celle de la levée de son immunité parlementaire, à savoir le 25 novembre 2017, est arbitraire». Par conséquent, la Cour en déduit que «la responsabilité de l’Etat du Sénégal, par le truchement de ses autorités policières et judiciaires, est engagée» et le «condamne à payer aux requérants la somme de 35 millions de F Cfa à titre de réparation». Les avocats de Khalifa Sall y voient une décision rendue par une «juridiction impartiale et indépendante» qui «consacre une victoire éclatante, définitive et sans possibilité d’appel» en faveur de leur client. Ils exigent, en conséquence, la «libération immédiate et sans condition» de M. Sall ainsi que «le respect par l’Etat du Sénégal des lois nationales et instruments juridiques internationaux, ainsi que la décision de la Cour de justice de la Cedeao dont l’autorité s’impose aux Cours et tribunaux de la République du Sénégal en application du Traité de la Cedeao et de son protocole additionnel».

«La décision de la Cour n’impacte pas la procédure en cours»
En revanche, le juge sous régional déboute le maire de Dakar et Cie du «surplus de leurs prétentions». C’est pourquoi si la défense du maire de Dakar crie à la «victoire», les avocats de l’Etat du Sénégal, eux, ne le voient pas ainsi. «Ce n’est pas une défaite pour la simple et bonne raison que la Cour de justice de la Cedeao n’a pas suivi la requête du député-maire de Dakar. Ils ont été déboutés, car ils avaient demandé que la Cour se prononce sur l’arrêt de toutes les poursuites et sa libération immédiate. La défaite aurait consisté à ce que la Cour ordonne la libération de Khalifa Sall et l’arrêt des poursuites. Elle n’intervient pas dans le fond du dossier. Elle a estimé, encore là je ne suis pas d’accord, que ses règles n’ont pas été respectées en partie dans le cadre de la procédure. De ce point de vue, il n’y a aucune défaite de l’Etat du Sénégal. Le but recherché par Khalifa était l’arrêt des poursuites et sa libération immédiate. Il avait même demandé 50 milliards de F Cfa et on ne lui a donné que 35 millions», a précisé Me Moussa Félix Sow, joint par téléphone. Il ajoute : «La Cour a demandé à l’Etat du Sénégal de réparer pour certains droits, ce qui veut dire que ça n’impacte pas la procédure en cours. La Cour de justice de la Cedeao n’a pas la même mission ou vocation que la Cour européenne des droits de l’Homme. Elle a toujours déclaré ne pas s’immiscer dans les décisions rendues par des juridictions nationales compte tenu de la souveraineté des Etats.» Me Sow annonce que chaque partie devra défendre ses arguments le 19 juillet, date de l’audience en appel.
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