Cette vérité que l’on ne saurait oublier de vous dire

Cette vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est que la République est au-dessus de tous et transcende les clivages politiques. La République a ses règles, ses principes, et son mode opératoire qui fait de la démocratie l’essence de son fonctionnement. La démocratie ne peut s’accommoder de la violence ni de la haine, elle donne des droits, mais elle impose des devoirs dont celui de respecter les institutions et ses décisions. En démocratie, la légitimité populaire n’émane pas de la rue ou d’un rapport de forces, mais des urnes comme seuls instruments de légitimité. Cette démocratie ne décerne pas une liberté absolue, car comme le dit Abbé Pierre, «la liberté prise comme un absolu peut conduire soit à l’anarchie la plus complète, soit à la loi du plus fort, c’est-à-dire la barbarie». C’est dans la régulation de cette liberté que la légitimité de l’Etat s’impose pour mettre fin au désordre par la force publique et pour faire face à toutes les tentatives de remise en cause de l’ordre républicain, parce que «la démocratie s’arrête là où commence l’intérêt de l’Etat». Malheureusement, «les mots qu’on connaît bien prennent dans ce pays un sens cauchemardesque. La liberté, la démocratie, le patriotisme, le gouvernement -tous ont un parfum de folie et de meurtre».
Cette vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est la défense de l’idéal de la République. Cet idéal qui a permis à des milliers de Sénégalais comme Mbougar, Sarr et Boris Diop de se construire un avenir meilleur et de donner la chance à tous les enfants de la République de s’abreuver aux sources des valeurs de liberté et de fraternité. Aucune République n’est parfaite et ses imperfections doivent être le combat au quotidien de tous ses fils. Des milliers de Sénégalais ont pu, par la magie d’une transmission des valeurs de la République, être inspirés par le parcours académique et administratif de brillants commis de l’Etat, de grands chefs d’entreprise et de talentueux opérateurs économiques. Cette modélisation de notre jeunesse par l’exemple ne doit pas cesser, elle doit être le symbole d’une République qui transforme le fils du Sénégalais lambda des villes et des campagnes en un grand commis de l’Etat, en un chef d’entreprise, elle doit être la source d’inspiration de tous les enfants, mais elle doit être aussi la promesse d’une espérance d’une vie meilleure pour tous ceux et celles qui croient à une République reposant sur les vertus du travail et du mérite.
Cette vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est celle qui attise la rancœur de nos concitoyens et appelle à saper les fondements de notre République par le mensonge, la manipulation et la violence qui «prétend être la solution d’un problème. C’est elle qui est un problème». Le discours haineux qui a envahi l’espace public depuis quelques années est une gangrène dans notre société et a métamorphosé notre jeunesse en une horde de braqueurs et de casseurs. La méconnaissance du danger qui guette notre pays par la force d’attaques répétées s’inscrit dans «l’ignorance (qui) mène à la peur, la peur (qui) mène à la haine et la haine (qui) conduit à la violence». En traçant un chemin en dehors de la République, on construit inéluctablement la chute de nos valeurs sénégalaises fondées sur la paix, le travail, le courage et la foi en notre destin. Par la banalisation de la destruction des biens publics et privés ainsi que le pillage des commerces de simples citoyens, nous inculquons à notre jeunesse la facilité du vol et le renoncement à tout esprit de réussite par l’effort. Si nos jeunes n’ont plus de repères, c’est en grande partie parce que nos hommes politiques ne sont plus des exemples, les insulteurs sont adulés, des repris de Justice sont les vedettes des réseaux sociaux et nos intellectuels ont fui le débat public par peur des invectives et attaques.
Cette vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est celle qui voit des Sénégalais établis à l’étranger encourager et organiser la mise à feu des domiciles de leurs concitoyens et d’appeler aux meurtres, ils oublient que «la non-violence est infiniment supérieure à la violence, le pardon est plus viril que le châtiment. Le pardon est la parure du soldat». C’est à se demander si le bon sens n’a pas définitivement quitté nos compatriotes qui montrent une certaine inconscience en n’épargnant personne, du chef religieux au Sénégalais lambda. Nos valeurs ont toujours privilégié le respect aux institutions, aux chefs religieux et coutumiers, à la femme et aux aînés. Cette vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est celle qui ne donne droit à aucun Sénégalais, loin du pays natal ou à l’interne, de sacrifier la vie d’innocentes personnes qui ne comprennent absolument rien des événements en cours.
La vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est celle qui consiste à demander aux hommes politiques de ne pas sacrifier l’avenir de notre pays en dénonçant des mercenaires de la République qui ont fait le pari de se lier avec le diable pour arriver au pouvoir par tous les moyens. La nature de nos hommes politiques avec une certaine malhonnêteté, ressemble à «(…) un cerf-volant : il est gonflé de vent, il se pare de belles couleurs pour séduire, et lorsqu’il vole, il est en général manipulé par quelqu’un qui tire les ficelles !».
Cette vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est celle qui consiste à faire comprendre aux Sénégalais que les messies n’existent pas en politique et que l’Etat n’est capable, ni aujourd’hui ni demain, d’offrir un emploi à tous ses citoyens, car «la politique est l’art de nous berner et d’abuser de notre crédulité comme dans une scène de somnambulisme». La vérité qu’on ne saurait oublier de vous dire est de cultiver les vertus de la République et d’être des lumières qui éclairent à équidistance des chapelles politiques pour offrir aux Sénégalais un avis éclairé, tout en disant comme Clémenceau que «tout le monde peut faire des erreurs et les imputer à autrui : c’est faire de la politique». Cette vérité qu’on ne saurait oublier est celle qui sensibilise sur la non-violence et forme une jeunesse consciente de son avenir et de ses attentes pour qu’elle ne soit pas «cette jeunesse (…) pourrie depuis le fond du cœur», «malfaisante et paresseuse», celle qui ne sera pas capable «de maintenir notre culture».
Alassane DIALLO
azoudl@yahoo.fr