Hier, l’avocat général de la Chambre criminelle a requis une peine de 15 ans de travaux forcés contre l’accusé Ibrahima Sy pour trafic de drogue. Il nie les faits, mais impute son arrestation au fait qu’il a mis fin à sa collaboration avec des policiers alors qu’il s’activait dans la vente de chanvre indien.

L’accusé Ibrahima Sy a reconnu hier, devant le juge de la Chambre criminelle, avoir été un dealer par le passé. Attrait à la barre pour trafic de drogue, il a porté des accusations graves à l’encontre des éléments de la Police nationale. C’est stupéfiant. Selon lui, il collaborait avec des policiers pour faire tranquillement son commerce illicite, moyennant des commissions. D’après le mis en cause, son arrestation découle du fait qu’il avait refusé de payer le reliquat à ses supposés acolytes policiers. «Je reconnais que j’ai un passé (criminel), mais j’avais tourné la page en 2003. Ça reste toujours dans ma tête. En 2003, j’avais plaidé coupable. Je suis innocent pour cette affaire. Je déteste mentir. Je vous en prie M. le juge !», a laissé entendre le présumé trafiquant après la clôture des débats. Cela suffira-t-il ?
Dans son réquisitoire, l’avocat général a requis 15 ans de travaux forcés contre Ibrahima Sy. Il sera également condamné à payer 10 millions de francs Cfa si la Chambre suit le ministère public. De l’avis de l’avocat général, l’accusé a utilisé «une ligne de défense bizarre et curieuse en jetant l’opprobre sur des policiers». Avant de revenir sur les faits pour lesquels le sieur Sy est poursuivi, le maître des poursuites a d’emblée précisé que c’est quelqu’un qui est bien connu des fichiers de la police. Il s’agit, dit-il, d’un multirécidiviste qui a été condamné à une peine de 2 ans d’emprisonnement ferme. En effet, les limiers exploitaient des informations qui faisaient état d’un trafic de chanvre indien au quartier Thiaroye, situé dans la banlieue dakaroise. C’est alors qu’une descente a été effectuée au domicile de Ibrahima Sy. Ce dernier a déclaré à la barre qu’il avait été arrêté au moment où il s’apprêtait à aller prendre son bain. Et selon l’ordonnance de renvoi, les policiers ont saisi une quantité de 26 kg de drogue conditionnée.
La fouille a également permis de découvrir 20 mille francs Cfa qui seraient le fruit de ses activités de trafic. En plus de cette saisine, les policiers ont mis la main sur sa moto qu’il utiliserait pour écouler la drogue. Tout le matériel, selon le ministère public, a été placé sous scellé. Prenant le contre-pied du mis en cause qui a nié les faits, il a rappelé que Ibrahima Sy avait fait des aveux circonstanciés à l’enquête. Il aurait reconnu que la drogue lui appartenait et qu’il l’aurait reçue d’un certain Alé Diongue. Pour Me Amadou Diallo de la défense, «son client a fait de graves déclarations. On s’attendait à ce que le ministère public nous dise qu’on peut ne pas accorder du crédit à ce qu’il a dit, mais une enquête sera ouverte». D’après lui, il n’y a pas eu de pesée en présence de l’accusé. Et il poursuit que le Pv ne renseigne pas sur les circonstances dans lesquelles cette drogue a été saisie. Donc, dit-il, il y a un problème sur la matérialité des faits. Ce qui fait que le doute est sérieusement permis dans cette affaire.
Par ailleurs, sa consœur Me Ndèye Fatou Sarr a soutenu que leur client «comparaît sur la base de simples déclarations consignées dans le procès-verbal. Les déclarations ne peuvent pas constituées de preuves. Ce sont les enquêteurs qui ont fabriqué ces déclarations. C’est une réalité. Les trafiquants ont toujours collaboré avec des policiers. Les véritables trafiquants ne sont jamais arrêtés». Pour elle, il n’y a pas de certitude sur la quantité de la drogue, car les scellés n’ont pas été produits. Elle conclut qu’il y a un doute sur la culpabilité de l’accusé. La défense a plaidé l’acquittement au bénéfice du doute. Le jugement sera rendu le 20 novembre 2018.
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