Détestable, aimable et surtout une fin heureuse. Avec Delgado, la sensation est garantie. Pour son film «Que le père soit», le réalisateur a pris 4 ans pour servir un produit sans complexe qui n’a rien à envier aux plus grandes productions cinématographiques. Techniquement irréprochable, ce film est un hymne à l’amour dans une société faussement conservatrice. C’est un film à regarder, surtout pour les jeunes couples.Par Malick GAYE –
C’est la blessure de l’orgueil qui crée l’offense. Cette phrase, quoi que répétée depuis des siècles aux hommes, continue de faire son lot de désastres. Jusqu’où on est prêt à aller pour le plaisir de sa femme, son mari, bref son partenaire ? C’est une bonne question qui amène souvent une réponse simple. Seulement, c’est devant l’épreuve que cette interrogation a tout son pesant d’or. Christine et Ferland ne diront pas le contraire. Ce couple qui flirte avec la réussite, titille la perfection. Amoureux, ils sont l’incarnation d’une vie de couple réussie. Christine est une riche femme d’affaires à la tête d’une grande entreprise. Presque rien ne lui manque ! Elle a toujours le bon mot au bon moment, sauf quand elle doit dialoguer avec sa belle-mère. Catholique, la mère de Ferland ne supporte pas cette athée qui partage la vie de son fils. Que peut-elle bien reprocher à Christine ? La réponse est le cadet des soucis de Ferland. Du moment que Christine a fait de lui le père le plus heureux du monde, rien n’a d’importance. L’amour de Ferland pour les enfants l’a conduit à travailler dans une bambinerie. Seulement, 9 longues années après leur mariage, le couple n’a qu’une fille de 8 ans. Ferland aimerait bien avoir un autre enfant mais Christine n’a pas la force de lui refaire ce cadeau. Le miracle se produit dans la boutique de Ferland. Un nouveau-né y a été abandonné. Régalien, Ferland appelle sa femme pour l’accompagner faire la déclaration à la police. Bonjour les problèmes. C’est fou ce qu’un abus de pouvoir peut avoir comme conséquence. Les limiers croient que c’est Ferland qui est le père de l’enfant et veulent en avoir le cœur net. Ils lui ordonnent de faire un test.
C’est le début de la torture pour les spectateurs qui ont fait le déplacement au tout nouveau complexe cinématographique Pathé pour regarder l’avant-première du film «Que le père soit» de Clarence Thomas Delgado. Le disciple de Sembène Ousmane, qui a mis 4 ans pour réaliser ce film, n’a rien oublié des techniques du maître. Ce film est un hymne à l’amour. L’importance de la famille y est magnifiée. Avec sa caméra, il a réussi à tirailler le spectateur entre l’envie de compensation, la volonté de violenter Christine et surtout le sentiment d’applaudir ce couple qui a bravé vents et marées pour surmonter ce qui est plus qu’un obstacle. Le seul hic du film, c’est que la vie occidentale y a été tellement copiée que le spectateur pourrait se perdre au début du film. Mais avec le recul, cet impair se justifie. Le dialogue est omniprésent dans ce long métrage de plus d’une heure de temps. Le décor est assez simpliste. Tout est dans la parole. Clarence Thomas Delgado a réussi à transporter le spectateur dans la religion chrétienne. Il n’a pas non plus maquillé cet aspect social qui fait que la vie de couple au Sénégal s’apparente à une traversée du désir. C’est un tableau brut du Sénégal social qui a été présenté. «Que le père soit» est un film sans complexe, techniquement bien fait. Il n’a rien à envier aux grandes productions. Il est diffusé actuellement au cinéma Pathé de Dakar. Qui, à coup sûr, doit peaufiner les détails techniques pour appâter les cinéphiles. En effet, lors de la projection mardi dernier, plusieurs fois la salle a été placée dans le noir. Mais l’émotion du film était tellement insensé que c’était un ouf de soulagement pour certains spectateurs.
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