Demain, Dame Justice sera auscultée par les différents acteurs du secteur et d’autres citoyens pour lui donner une allure moins controversée. Il est sûr que le principal point sera le fonctionnement du Conseil supérieur de la Magis­trature (Csm), notamment la présence du président de la République. Aujourd’hui, il sera encore difficile de trancher la question : faut-il le sortir, ainsi que le ministre de la Justice, de la structure ? Même des acteurs de la Justice veulent que la présence du chef de l’Etat soit maintenue. Il y a quelques jours, le médiateur de la République, Demba Kandji, plaidait pour la continuité. Evidemment, certaines réticences s’expliquent par la peur d’avoir une structure des juges avec des risques de réflexe corporatiste.

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Mais, il reste constant que pour les acteurs, il est nécessaire de réaménager la composition, le fonctionnement, les attributions du Csm, avec l’érection d’un organe autonome prenant en charge la carrière des magistrats, la garantie de leur indépendance et le respect de la déontologie. Sans oublier son ouverture aux avocats, aux notaires, aux universitaires et à des personnalités indépendantes. Aux yeux de certains, cette sortie de l’Exécutif du Csm permettrait d’assurer une indépendance du pouvoir judiciaire, notamment la gestion des carrières des magistrats, et mettre fin au «recours très répandu à l’intérim», qui remettrait en cause le principe de l’inamovibilité.

Autant ce débat va passionner les discussions, autant le lien ombilical entre le Parquet et la Chancellerie va occuper les débats. Ce pouvoir d’injonction du ministre de la Justice au représentant du Parquet est toujours interprété comme un moyen d’immixtion de la tutelle dans le traitement judiciaire des affaires soumises à la Justice. Alors qu’il est censé représenter les intérêts de la société ? Il est aussi partie au procès, lui donnant en outre des prérogatives immenses à l’état actuel des codes pénal et de procédure pénale. Il a un grand pouvoir sur la détention ou la libération de personnes. Par exemple, son appel ou son pourvoi bloque un citoyen en prison, ou ses réquisitions imposent à un juge d’instruction d’envoyer la personne visée en prison. Ce qui montre le caractère urgent de la mise en place d’un juge des libertés et de la détention.

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Par ailleurs, la généralisation de l’âge de la retraite à 68 ans à tous les magistrats. Jusqu’ici, seuls les présidents de certaines juridictions en sont bénéficiaires. C’est le combat de l’Union des magistrats sénégalais (Csm), qui va sans doute remettre la question sur la table. «Il a été exposé au chef de l’Etat, la différence de traitement existant entre des magistrats du même grade, consistant à voir partir à la retraite les plus jeunes pour laisser en place les plus âgés uniquement du fait de fonctions occupées par les uns et les autres. Cette situation, qui crée de manière flagrante un déséquilibre dans la gestion de la carrière de fonctionnaires régis par le même statut, doit être corrigée», avait exposé le président de l’Ums. Pour lui, «une loi n’est juste que lorsqu’elle impose les mêmes restrictions à chacun, et les mêmes droits. La généralisation de cet âge apparaît donc comme une nécessité absolue et pour reprendre une expression chère à nos amis avocats, ce ne serait que Justice».
Par Bocar SAKHO – bsakho@lequotidien.sn