Voilà un peu moins d’un mois que j’ai adressé, sur mandat du mouvement citoyen Mbakke/ci laa bokk, une correspondance au comptable public pour courtoisement demander la mise à disposition du compte de gestion des années budgétaires 2015-2016 dont les comptes administratifs ont été soumis à l’examen du Conseil municipal du jeudi 18 janvier 2018.
Jusqu’au moment où nous écrivons ces lignes, notre requête n’a pas encore connu de suite et ce, malgré notre coup de fil de rappel auquel le trésorier payeur a opposé une réplique lapidaire : «Je vous répondrai !» or, notre démarche procède d’un droit inaliénable et imprescriptible reconnu et organisé par les textes en vigueur, notamment le Code général des collectivités locales qui consacre la communalisation intégrale.
En effet, la loi du 28 décembre 2013 prévoit les dispositions dont nous nous sommes prévalus dans notre lettre.
L’article 155, alinéa 1, dit : «Tout contribuable, inscrit au rôle de la collectivité locale, a le droit, à ses frais, de disposer de la situation comptable de la collectivité locale.»
L’article 210, alinéas 2, dispose : «Le comptable public est tenu de transmettre à la collectivité locale sa situation comptable mensuelle et son compte de gestion annuelle.»
Enfin, une troisième disposition qui vient fermer la marche tranche net tel un couperet : «En tant qu’organe délibérant, le conseil exerce un droit de contrôle sur le budget de la collectivité locale. Du point de vue légal, cette prérogative peut être remplie par l’examen et le vote avant le 1er octobre du compte administratif de la gestion écoulée. Ce compte administratif qui présente la situation d’exécution du budget, comparativement aux prévisions, doit être voté obligatoirement avec le compte de gestion fait par le comptable public et transmis au maire et au président du Conseil départemental avant le 1er Juillet, avant que le budget à venir ne soit voté.» La sentence est sans appel.
Le compte administratif, adopté sans l’examen contradictoire du compte de gestion, procède d’une manœuvre perfide pour faire sauter le verrou essentiel dans le dispositif de contrôle de l’organe délibérant.
L’adage dispose : «Témoin seul, témoin nul.» Les coups fourrés et les manœuvres sournoises que nous flairons à travers les chiffres suspects des comptes administratifs du maire nous invitent à un devoir de veille et de vigilance pour être mieux imprégnés sur la traçabilité et la moralité des dépenses imputées à l’argent public du contribuable.
Le maire fait état de deux bouches d’incendie au marché central pour 4 millions 100 mille F (voir Ca 702/220523 pendant que ses propres partisans membres du Conseil municipal démentent l’existence de bouches d’incendie au marché où ils exercent. Dans le secteur du transport, le maire parle de relance, alors que les professionnels du sérail l’invectivent sur les destinées du prétendu contrat de sous-traitance de 24 millions F qui tombent annuellement dans l’escarcelle de l’administrateur des bus Tata, sans le moindre investissement et sans la moindre contrepartie pour le Trésor de la commune.
Dans le domaine de la santé, le maire prétend affecter 22 millions F aux produits pharmaceutiques alors que le centre de santé n’a réellement reçu que 12 millions F.
Pour la maintenance des véhicules, le maire de la ville a détourné, en 2015, de leur objectif 5 millions F affectés à l’entretien du parc automobile du centre de santé ;
Au 451/6130, la dotation allouée au carburant d’évacuation sanitaire a subi, sans aucune explication, une coupe sombre de 2 millions F, chutant de 5 millions F à 3 millions F.
Les secours aux indigents 4 million F ( compte administratif 451/64520) ont été utilisés à d’autres fins, de l’aveu même du maire qui déclare avoir soustrait des mains du comptable de la mairie les fonds publics de secours dont il a confié la garde à la 3ème adjointe au maire.
Au 509/612, habillement des personnels (2 millions F), la dépense n’a jamais été exécutée sur la foi des déclarations des travailleurs municipaux et ce, durant tout le magistère du nouveau maire ouvert le 29 juin 2014.
Au 702/2110, malgré la prévision de 4 millions F pour la construction de deux places publiques, aucun équipement du genre n’a encore émergé de terre.
Le compte administratif fait également cas d’une dépense annuelle de 7 millions F (381/622) pour des opérations de curage douteuses de caniveaux, soit 14 fois plus que les prévisions de l’équipe sortante qui affectait 5 millions F à cette dépense.
Le mouvement associatif et sportif, y compris le Conseil communal de la jeunesse, a enfourché ses grands chevaux pour flinguer, à bout portant, le maire de Mbacké qui déclare avoir pris en charge le fonctionnement des associations en prétextant de subventions de 5 millions F attribués une seule fois.
Interpellé au cours du Conseil municipal à propos d’un financement prétendu de 16 millions F pour la mise en place d’un Plan de développement communal 5 (Pdc), le maire panique et parle plutôt d’une contribution de 2 millions F de la part de l’Union européenne (Ue).
A supposer même que le maire ait dit la vérité, quel usage a-t-on alors fait du million 550 mille F restant après déduction faite d’un montant de 450 mille F représentant le coût de formation de neuf (9) enquêteurs pour une période de 10 jours sur la base d’un forfait journalier de 5 000 F par personne.
Le maire déclare devant le Conseil municipal avoir pris en charge la construction du mur d’enceinte des cimetières de Mboussobe, en contribuant pour 60 T de ciment et 60 T de fer.
Or, l’état nominatif des donateurs, dont nous avons obtenu copie, mentionne pour le maire 45 T de ciment, 3 T de fer, 2 camions de 16 m3 de sable et 140 mille F en espèces.
Le premier magistrat, récidiviste, prétend également avoir pris en charge les travaux de construction du mur de clôture des cimetières de Ndoyenne alors que la quasi-totalité des travaux a été supportée par le généreux mécène El Hadji Malick Ndiaye, établi à Tivaouane, qui a mis sur la table la rondelette somme de 2 millions F.
Depuis longtemps déjà, la commune de Mbacké est confrontée à une situation de pénurie drastique de carburant qui contraint le maire à décaisser de sa propre poche un forfait journalier de 20 mille F pour approvisionner en carburant les camions de nettoiement qui ont tous garé depuis plus de trois (3) mois.
Cette situation que nous avons vu venir procède d’une gestion d’incurie et de rapine de la dotation en carburant (10 millions F par an) (313/6130 : cabinet du maire) qui ne présente aucune traçabilité évidente au niveau de la comptabilité-matière de la commune. Je ne conclurai pas mon propos sans faire cas d’une anecdote croustillante, rapportée au détour de la conférence internationale «Afrique-Cités» tenue à Dakar. «Il s’agit d’une jeune fille malaisienne qui a dénoncé auprès de son ministre de tutelle un maire de commune qui s’adonnait à des pratiques de spoliation foncière. La hiérarchie a réagi promptement en dépêchant une mission d’enquête qui a conforté les allégations de la jeune fille.»
Moralité : Le maire a été radié, puis embastillé et l’héroïne du jour élevée à la plus haute distinction nationale.
Cette bonne pratique, dont il faut s’inspirer, fait le lit de valeurs exemplaires sans lesquelles l’émergence et la bonne gouvernance qui lui est consubstantielle resteront à l’état de concepts creux, dépourvus de substance réelle. L’émergence s’éprouve. Elle ne se prouve pas.
Youssoupha BABOU
Instituteur Principal de classe exceptionnelle
Ancien adjoint au maire de Mbacké