A l’image du chanteur toulousain, Claude Nougaro, le parisien Oxmo Puccino manie la rime et les mots du haut de sa grande carcasse. Tels des boxeurs sur un ring, ils usent du microphone pour faire danser les mots sur des images, des choses de la vie : l’impérissable beauté de la poésie. La musique est l’écrin de leur sensibilité, la finesse leur marque de fabrique sur des instrumentaux chaloupés. Gueule cinématographique, Oxmo Puccino de son vrai nom Abdoulaye Diarra est né à Ségou au Mali en 1974 , catapulté en France l’année suivante entre Laumière, Ourcq, Riquet et Danube, là-bas dans le nord-est parisien : 19ième arrondissement. Apparu sur la scène parisienne avec la grande vague du rap français à la fin du siècle dernier notamment avec le collectif Time Bomb autour duquel gravite le jeune Booba, ils signent ensemble le classique Pucc Fiction. Nul ne sert de les opposer, Oxmo Puccino est un esthète des mots et du flow. Il l’a prouvé une nouvelle fois samedi soir dans un concert qui affichait complet, précédé de sa réputation et d’une première partie assurée par le sénégalais Souleymane Diamanka, artisan de la langue française mâtinée de celle du Fouladou.
Réchauffé par le feu des mots du peul, le public, relativement âgé pour un concert hip-hop, s’est attendri à l’arrivée de Puccino et de ses trois musiciens. Un concert de rap n’est jamais chose gagnée surtout lorsque les places sont assises. Alors, on écoute et on vibre de l’intérieur. D’ailleurs, à l’instar d’un de ses morceaux comme pour taquiner la virilité et l’impassibilité des rappeurs, Oxmo Puccino scandait à l’époque : «Nous, on danse pas». Si au cours de sa carrière jalonnée de huit disques éclectiques Oxmo emprunte régulièrement le chemin du persiflage, c’est surtout celui de la rime mélancolique qui tient en haleine son public. Son dernier disque publié sorti en 2015 et baptisé La voie lactée ne fait pas exception à la règle. Pour autant, afin de mieux ferrer son auditoire il le gratifie de ses classiques bien huilés à l’image de L’enfant seul exécuté avec brio. Là, la poésie urbaine rejoint la poésie tout court avec son cortège d’alitérations. Avec le temps, Oxmo Puccino confirme son statut d’icône, adoubé par le milieu du rap et bien au-delà. Enfant de Ségou devenu titi parigot, il conte la rime de son temps d’un débit vocal magnétique qui brise le plafond de verre entre art souterrain et art majuscule.
bdavid@lequotidien.sn

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