La pandémie du coronavirus n’est pas sans conséquences sur la pêche à Saint-Louis. Une des mamelles de l’économie locale, le secteur et ses différents acteurs ressentent déjà les contrecoups des mesures découlant de la mise en œuvre l’Etat d’urgence assorti d’un couvre-feu décrété par le président de la République pour lutter contre cette pandémie.

Si les activités de la pêche dans la zone nord n’ont pas encore fait l’objet d’aucune restriction de la part des autorités administratives, à cause certainement du rôle de premier plan que ce secteur joue et sa contribution substantielle dans l’économie locale, elles subissent cependant de plein fouet depuis quelques jours, les conséquences du couvre-feu en vigueur depuis la semaine dernière. Les acteurs ou en tout cas la plupart d’entre eux disent avoir constaté un ralentissement de leurs activités depuis presque une semaine. Au quai de pêche de Guet-Ndar, le plus grand de la zone nord et l’un des plus grands du pays, règne l’ambiance de tous les jours, mais cette ambiance qui d’habitude renseignait sur le dynamisme du secteur, cache mal les difficultés que vivent ses occupants. Des femmes trouvées sur place ne s’en cachent pas, elles vivent le calvaire en ce moment. Selon ces braves dames qui ne vivent que des retombées de leurs activités, leur temps de travail, qui s’étalait sur toute la journée, est désormais circonscrit dans un laps de temps. Avec le couvre-feu en vigueur, elles sont obligées d’arrêter toutes activités aux environs de 16 heures. Cette nouvelle situation a surtout pour conséquence, la diminution significative de leurs revenus du fait d’abord de la diminution du temps de travail mais surtout de la baisse de leur chiffre d’affaires liée à la diminution des ventes, le quai de pêche étant moins fréquenté que d’habitude.
Du côté des pêcheurs, le constat est le même, ces acteurs incontournables du secteur vivent aussi d’énormes difficultés. En effet, même si l’activité n’est pas à l’arrêt, les pêcheurs parviennent difficilement à mettre la main sur le poisson. Les détenteurs des licences  autorisés à pêcher dans les eaux mauritaniennes malgré la fermeture de la frontière entre les deux pays, ne sont pas autorisés par les autorités de ce pays à débarquer sous aucun prétexte en terre mauritanienne. Cette contrainte fait que les charges sont encore plus importantes et le coût du poisson plus élevé. A cette contrainte s’ajoute le fait qu’avec le couvre-feu, les pêcheurs sont obligés d’écourter leur séjour en mer afin de pouvoir écouler leur produit auprès des mareyeurs obligés à leur tour d’embarquer le poisson en début d’après-midi au plus tard pour le convoyer à l’intérieur du pays. Ces mareyeurs d’ailleurs, subissent aussi de plein fouet les conséquences de la pandémie et du couvre-feu du fait de la diminution du temps de travail. Certains d’entre eux disent avoir suspendu leur déplacement dans beaucoup de zones éloignées du pays qu’ils ne peuvent plus regagner facilement dans la journée avant le début du couvre-feu.
Les pêcheurs ne sont pas les seuls à être impactés par les conséquences de la pandémie du coronavirus et du couvre-feu. En effet, selon le Secrétaire général du Syndicat autonome des pêcheurs artisanaux du Sénégal, Moustapha Dieng,  Saint-Louis compte actuellement plus de 5000 pirogues qui font travailler directement ou indirectement plus de 20 mille personnes, et ces derniers (pêcheurs, mareyeurs, vendeuses, femmes transformatrices, dockers, etc.) aujourd’hui, quel que soit leur niveau d’intervention dans la chaîne, subissent les désagréments de cette nouvelle situation que vit le Sénégal depuis le début du couvre-feu.

La psychose du confinement total 
Si les pêcheurs ressentent de plein fouet les impacts négatifs du couvre-feu, ils parviennent quand même tant bien que mal à assurer la continuité de l’activité de pêche. Toutefois, avec l’évolution et la tournure que prennent les choses avec la propagation progressive du virus, ces derniers redoutent l’arrêt de leur activité avec un éventuel confinement total. En effet, s’il arrivait que le gouvernement décide le confinement total, ces acteurs craignent l’installation d’une crise sans précédent dans le secteur de la pêche qui chaque année en termes de mise à terre, participe pour plus de 10 milliards de francs Cfa dans l’économie locale et nationale. Cette situation est à craindre et surtout à éviter, selon le Secrétaire général du syndicat autonome des pêcheurs artisanaux du Sénégal, qui craint le pire pour les centaines de milliers de personnes qui vivent des revenus de la pêche. Les différents acteurs rencontrés sont d’ailleurs unanimes. Pour eux, le gouvernement doit déjà commencer à réfléchir sur des mesures d’accompagnement à appliquer spécifiquement au secteur de la pêche pour éviter à la communauté des pêcheurs de vivre une crise sans précédent.