L’année 2020 correspond dans le calendrier chinois à l’année du Rat. Peut-être que pour une fois, ce calendrier millénaire s’est probablement trompé d’animal en ne choisissant pas le Pangolin, cet autre animal traité de tous les noms d’oiseau (sic) et accusé sans preuve formelle d’avoir été la source de tous nos malheurs pour avoir transmis la Covid-19.
«L’année du Pangolin», qui n’existe que dans notre imagination fertile, a vu une minuscule créature partie de «l’Em­pire du Milieu», traverser l’Oural, mettre le Kremlin en coupe réglée comme jamais depuis la bataille de Stalingrad. Dans sa  chevauchée funeste, Covid-19 glaçait de terreur Paname, s’offrant Paris sans coup férir pour un défilé sur les Champs-Elysées, vidés de ses âmes bruyantes, au son du Tocsin et au rythme endiablé du Glas.
Les «bateaux mouche» qui jadis, dans un ballet incessant, promenaient leurs lots de touristes pour une visite gastronomique de Paris, Rive gauche, Rive droite, rejoignaient leur port de mélancolie et  regardaient avec effroi la «Ville lumière» happée par le voile de tristesse.
«Covid-19», sans état d’âme, immolait Atalante et Hypo­nème au pied de l’Olympe, sans un regard pour ces boules d’or qui ralentissent sa marche funèbre vers le pays de la bénédiction «urbi orbi». Imper­turbable, elle ruinait les châteaux d’Espagne, sans respect pour les rois, les hommes d’Etat et stars tombés de leur piédestal pour rejoindre le lumpen. Elle scellait les lieux de  culte comme pour couper court à tout espoir de rédemption pour les peuples prostrés, qui cherchent dans les réalités fantasmagoriques du ciel les voies de la rédemption.
L’Afrique, assise en chien de faïence, regardait avec incrédulité les événements surréalistes transmis depuis Wuhan,  Pa­ris,  Madrid, se demandant si elle échapperait à l’hécatombe que lui prédisaient tant de doctes experts en santé publique.
Fin février, début mars, elle voyait enfin arriver «le monstre  invisible», capable en un  jour d’endeuiller une ville entière, sans qu’aucune goutte de sang ne fût versée.
Les premières échauffourées avec le mal, «qui répand la terreur», furent à l’avantage du continent.
Mais endormie par les premières victoires à la Pyrrhus, l’Afrique  a très tôt dormi sur ses lauriers, très peu préparée à la guerre asymétrique que lui imposait l’assaillant.
Dans cette guerre, la «Covid 19» capitalise sur une défense du «faible au fort» en usant de nos propres ressources pour prospérer.
Elle bénéficie aussi de la «surprise tactique» et «opérationnelle» qui lui confèrent  une liberté de manœuvre, difficile à contrer,  lui permettant  d’attaquer en un point (ou un lieu) et/ou à un moment auxquels on s’attend le moins.
Elle nous laisse fort heureusement «la surprise stratégique» qui, utilisée à bon escient, aurait permis  d’assurer l’endiguement du «monstre» par l’action préemptive sur les lignes d’opération (Los) prioritaires de la légitimation (Com­munica­tion/infor­mation/sensibi­lisation/formation) de la gestion des personnes et des territoires.
Ainsi, peu à peu, les lignes de prévention sont percées par les mouvements «browniens» du virus drapé du hâle de «l’incertitude de Heisenberg» qui lui confère une supériorité tactique difficile à inverser une fois installé sur le théâtre des opérations.
Les «clusters» surgissent alors dans la  profondeur stratégique du dispositif, malgré les mesures drastiques prises par les plus hautes autorités pour renforcer l’efficacité opérationnelle de la riposte sectorielle par un contrôle strict des personnes et des biens (Prc : Population ressource control) censé affaiblir l’assaillant en lui interdisant les moyens qui lui confèrent sa dynamique.
Mais finalement, à cause d’un relâchement individuel, moult fois dénoncé par les lanceurs d’alerte, c’est un virus tropicalisé qui prend ses aises, étend ses tentacules sans fin dans les coins les plus reculés où la faiblesse du dispositif sanitaire et les préjugés défavorables aux mesures barrières, amplifiées par les «hoax», lui ouvrent un champ de manœuvre inespéré. Ainsi dans cette confrontation entre l’homme et «l’invisible», ce dernier, comme fatigué de se mouvoir sans réelle opposition, se donnait un temps de répit, im­posé  aussi par l’instinct de sur­vie d’une population, objet d’un véritable battage médiatique pour un retour à l’orthodoxie de la protection individuelle.
Mais malheureusement, dès que le ciel s’éclaircit, les mauvais réflexes d’insouciance des jours heureux se réinstallent, favorisés par une mauvaise interprétation de ce repli tactique considéré comme un recul définitif du mal.
Alors, bas les  masques, adieu la distanciation, les tam-tams sortent des fourreaux, les pieds des danseurs martèlent le sol et la lune, obscurs témoins des réjouissances nocturnes, drapée de son hâle de coton,  regarde  avec appréhension tous ces inconscients qui s’offrent comme des victimes expiatoires au glaive du «monstre».
Celui-ci ne se prive même pas de se mêler à la foule pour prendre part aux festivités pour mieux ferrer ses proies.
Ainsi, comme dans toutes les guerres asymétriques que les stratèges de la guerre redoutent tant, le «faible», après une retraite surprenante malheureusement interprétée comme une victoire décisive, semble reprendre du poil de la bête, lançant sur une multitude de fronts des attaques aussi sporadiques que meurtrières qui réveillent le souvenir des jours de deuil des premiers assauts, saturant les hôpitaux comme pour mieux narguer ceux qui avaient trop tôt sonner le glas de sa marche funèbre.
Et «l’espoir changea de camp, le combat changea d’âme» à l’entame du dernier virage de l’année 2020.
Les troupes remobilisées se ruent sur les faisceaux, pour agripper les armes qui avaient permis d’endiguer le mal.
Nous venions ainsi d’apprendre à nos frais que «Covid-19» n’avait pas de prophètes, rien que des historiens, qu’elle n’est pas une compétition, mais un combat sans répit dans lequel il n’y a jamais d’avantage décisif, seulement des trêves, que nos braves soldats du corps médical n’ont même pas eu le temps de savourer, perdus entre la riposte, la lutte et la recherche d’un remède salvateur.
La Covid-19 nous apprenait aussi que la baisse des contaminations n’était en rien un indicateur de fin de pandémie, mais seulement la preuve de l’efficacité du «plan de prévention et de riposte».
Elle nous dit enfin seul le vaccin peut sonner le glas de sa marche funèbre. Des vérités pourtant connues de tous ceux qui ont élaboré les scénarii de phase pandémique.
Aujourd’hui, en attendant ce vaccin de l’espoir, seul refuge dans ce combat si long et si harassant contre la Covid-19, dans cette année du «Pangolin», année jumelle à laquelle probablement Nostradamus faisait allusion dans ses prophéties, il nous faut remettre le métier à l’ouvrage de l’engagement communautaire et ramener à la raison les récalcitrants, du reste peu nombreux, tout en engageant, sans état d’âme,  la «bataille des clusters» pour combattre le virus dans ses zones de prédilection afin d’éviter sa propagation qui annihilerait tous les efforts pour «tracer», «tester», «isoler» et «soigner» les cas afin d’endiguer le mal.
Nous sortirons nécessairement vainqueurs de cette campagne contre la «Covid-19», mais unis, concentrés, disciplinés, humbles, dans une attitude citoyenne, pour que la victoire soit encore plus belle et le prix à payer moins lourd.
Et au soir de la retraite, nous pourront dire, paraphrasant le Général De gaule : «L‘Afrique outragée, l’Afrique brisée, l’Afrique martyrisée, mais l’Afrique libérée de la «Covid-19» par ses propres fils et filles engagés comme les doigts d’une seule main contre le mal.» Alors nous pourront célébrer nos vaillants hommes de science, nos forces de défense et de sécurité, le personnel de première ligne avant de nous tourner enfin vers les enjeux du moment, que la «Covid-19» avait, pour un temps, relégué au second plan : la paix, la sécurité, pour une cadence forcée vers l’émergence.
Colonel (er) Mamadou ADJE
Expert Wadpi (Initiative
Ouest africaine
de Préparation aux  Catastrophes).
PRP (Pandemic
Response Program)
Programme de
Réponse à la Pandémie
Spécialiste «Communication
de Défense«
makoumba 4@yahoo.fr