A la reprise du procès de Laurent Gbagbo et de son ex-ministre Charles Blé Goudé devant la Cour pénale internationale (Cpi) le 1er octobre, l’accusation a estimé que le procès devait aller à son terme et que les preuves contre les deux hommes existaient bel et bien.

Contestant les preuves du procureur, les avocats de la défense vont demander cette semaine l’acquittement avant même d’avoir présenté leurs propres témoins. Leur répondant point par point, Eric McDonald, le substitut du procureur qui mène l’affaire depuis maintenant plus deux ans, a rejeté chacun de leurs arguments.
La contre-attaque du Parquet a consisté à démontrer – après le passage de ses 82 témoins, la présentation de milliers de documents et le visionnage de centaines d’heures de vidéos – que l’ex-Président ivoirien Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, son ancien ministre de la Jeunesse, ont bien engagé leur responsabilité pénale individuelle et sont responsables de quatre chefs de crime contre l’humanité (meurtres, viols, tentatives de meurtre et persécutions) perpétrés à Abidjan, lors de la crise post-électorale de 2010-2011. Ces crimes, selon l’accusation, auraient été commis conjointement avec les membres de leur entourage immédiat et par l’intermédiaire des forces qui leur sont restées fidèles.

La responsabilité au premier plan
«M. Gbagbo a demandé à ses troupes de poursuivre les combats et de renforcer les barrages routiers. Il était conscient que des crimes allaient être commis par ses subordonnés et autres mercenaires. Il a donc participé à l’élaboration du plan commun, visant à se maintenir au pouvoir par tous les moyens», a accusé Eric McDonald, adjoint de la procureure Fatou Bensouda. Quant à Blé Goudé, il «était parfaitement conscient du fait que ses propos incendiaires par lesquels il stigmatisait les étrangers aboutiraient à des actes de violence».
Le magistrat s’est longuement penché sur «la responsabilité» qui était celle de l’ancien chef de l’Etat Laurent Gbagbo et de l’ancien «général de la rue», en leur qualité de meneurs qui n’auraient «rien fait pour empêcher certains crimes».
Que ce soit à propos de la marche sur la Rti du 16 décembre 2010, du bombardement dans le quartier d’Abobo en mars 2011 ou encore du massacre de civils à Yopougon un mois plus tard, pour lui, pas de doute : les éléments de preuve contre le camp Gbagbo existent et ils sont nombreux.
De plus, ces crimes «n’étaient pas sans lien les uns avec les autres. Ce n’étaient pas des actes isolés. Les éléments de preuve démontrent qu’il existe manifestement une ligne de conduite», a ajouté Eric McDonald en conclusion de sa tirade.
Le Procureur général James Stewart avait lui abordé hier une question d’ordre juridique : la Chambre de première instance doit-elle s’interroger sur l’insuffisance de preuves ? A cette question, James Stewart a répondu par la négative, estimant qu’elle devrait attendre la fin du procès pour se prononcer sur ce point.
Autrement dit, pour l’accusation, les accusés doivent présenter leur défense et le procès doit aller à son terme. Un argumentaire qui n’a visiblement pas totalement convaincu le juge président.
rfi.fr et jeuneafrique.com