L’argent public ou dénier public est l’ensemble des biens, fonds et valeurs appartenant à l’Etat et aux organismes publics. Le décret n°2020/978 du 23 avril 2020 portant règlement général de la comptabilité publique en son article 2 dispose : «les deniers appartenant ou confiés à l’Etat et aux autres organismes publics sont des deniers publics…», l’article 15 précise : «Sous peine des sanctions prévues par la loi, il est interdit à quiconque, fonctionnaire ou particulier, non pourvu d’un titre légal de s’immiscer dans l’exécution de la loi des finances et dans la gestion des biens et deniers de l’Etat.» Par conséquent, il est interdit d’utiliser frauduleusement de l’argent public.

Il est donc temps de criminaliser le détournement de l’argent public, la gestion de fait, l’évasion fiscale, la falsification, la corruption, l’enrichissement personnel sans cause, le blanchissement d’argent, les soustractions et escroqueries sur les deniers publics. Ces mauvaises pratiques ont des effets très dangereux sur la gouvernance et la Nation. Réformer le code pénal en la matière pour éviter les scandales financiers et les fraudes fiscales et douanières. Ces détournements de fonds publics mettent en péril l’économie et créent une situation de corruption endémique qui favorise la criminalité dans toutes ses formes. La culture du détournement et de la corruption fissure progressivement les institutions de la République et creuse sévèrement le déficit budgétaire. Nous devons combattre la mafia autour du système fiscal et douanier pour permettre à nos Etats d’atteindre la souveraineté économique par la mobilisation et la valorisation des ressources internes. Il est urgent de mener des actions sécuritaires à outrance pour protéger notre système de gouvernance contre les organisations mafieuses spécialisées dans la falsification, la corruption et le détournement de fonds publics.

Par rapport à ce phénomène dévastateur, Madame Chris-tine Lagarde du Fmi disait en 2017 ce qui suit : «Les jeunes perdent toute motivation à faire des études, puisqu’ils savent que la réussite dépend des relations et non des capacités. Abandonnant leurs illusions, ils deviennent désengagés, désenchantés. Ils perdent espoir. La corruption empoisonne les âmes.»
L’autre chantier est de réformer la Cour des comptes pour qu’il y ait cohérence entre ses missions fondamentales et les moyens d’action. Les moyens ne permettent d’atteindre les objectifs. Par exemple, rien n’est prévu pour bien remplir les missions telles que la sauvegarde du patrimoine public, l’évaluation des politiques publiques et la vérification du bon emploi des crédits budgétaires.
Il faut permettre au Procureur général près de la Cour des comptes de s’autosaisir et de placer sous mandat de dépôt toute personne impliquée dans des pratiques frauduleuses. La Cour des comptes doit procéder à des contrôles inopinés pour repérer et sanctionner les détourneurs de deniers publics, les délinquants fiscaux et douaniers et tous les criminels financiers. De ce fait, il faut revoir les sanctions prévues par les articles 58 à 60 de la loi organique. La cour doit davantage contrôler la gestion en cours et donner une suite judiciaire aux différents manquements. Le procureur près de la cour doit avoir la possibilité de prendre des sanctions provisoires après le premier rapport. Les ressources financières internes sont la contribution des citoyens, qu’il faut impérativement bien gérer.

En conclusion, je cite le Président Jacques Chirac en 1996 : «A l’heure où les prélèvements obligatoires, au-delà de la fiscalité pure de l’Etat, atteignent des niveaux sans précédent et où les déficits publics fragilisent notre pays, la Cour des compte doit être l’aiguillon d’un Etat moins dépensier et plus efficace.»
Alpha YOUM
Spécialiste de Gestion publique et Droit social