Crise dans le secteur des médias : L’État presse les entreprises

La Coordination des associations de presse (Cap) tire la sonnette d’alarme face à une situation qu’elle qualifie de «très difficile» pour le secteur des médias au Sénégal. Cette crise, marquée par des pressions multiformes sur les entreprises de presse, estime la Cap, a déjà conduit à la fermeture de «Stades», «Sunu Lamb», ainsi que la non-parution de «Vox Pop» hier et la perte d’emplois dans le secteur.
Par Ousmane SOW – L’avenir immédiat des médias semble compromis. La situation «très difficile» que vit le secteur est marquée par une pression multiforme sur les entreprises de presse : environnement économique morose et pressions fiscales. Cela a fait réagir la Coordination des associations de presse (Cap), qui a sorti un communiqué hier pour demander l’ouverture de discussions et concertations. Après la suspension de parution des quotidiens «Stades» et «Sunu Lamb», suivie du licenciement de 20 journalistes et techniciens, la Cap constate également que le quotidien «Vox Pop» n’a pas paru hier. Elle annonce que d’autres publications risquent de suivre cette vague «désastreuse». «La Cap est très préoccupée par la situation très difficile que vit le secteur des médias au Sénégal, marquée par une pression multiforme sur les entreprises de presse. Cela se traduit malheureusement par la fermeture d’entreprises de presse et conséquemment par la perte subite de dizaines d’emplois, chaque fois qu’un support se déclare en faillite économique. C’est déjà le cas avec la suspension de parution des quotidiens «Stades» et «Sunu Lamb», et «Vox Pop» n’est pas paru ce jour (hier). Des informations qui nous parviennent et pour les mêmes motifs, d’autres quotidiens de la place suivront cette vague désastreuse», alerte la Cap.
Africome ferme ses 2 journaux : Fin de partie pour Stades et Sunu Lamb
Dans son communiqué, elle accuse l’Etat de faire preuve de mépris et de ne pas offrir de possibilités de dialogue et de concertation. «Face à cette situation intenable et de faillite de tout un secteur, l’Etat opte pour le mépris et ses démembrements continuent d’enchaîner des décisions et injonctions qui frisent une volonté manifeste et assumée de mise à mort des médias privés du pays», dénonce-t-elle, tout en regrettant le fait que les nouvelles autorités n’aient pas entamé de consultations pour relancer la normalisation du secteur médiatique, malgré l’urgence de la situation. «Elles ont certes trouvé un secteur à l’agonie dont le processus de réforme a été volontairement tronqué par les anciens tenants du pouvoir, mais force est également de constater que le nouveau régime n’a entamé ni consultations ni concertations afin de relancer la normalisation de ce secteur névralgique pour la démocratie», note la Cap. Cependant, elle souligne que les mesures coercitives telles que les contrôles fiscaux, la confiscation du Fonds d’appui et de développement de la presse (Fadp), la mise en demeure de redevances par la Société de Télédiffusion du Sénégal (Tds) et la résiliation des conventions commerciales par les structures publiques ne feront qu’aggraver la situation. «Ce n’est pas en déroulant un agenda de pressions multiformes que l’Etat mettra de l’ordre dans le secteur des médias», avertit la Cap.
Masterclass de Moussa Sène Absa à Cinekap : Les éponges sont les cousins de blague du Bon Dieu
Pour la Cap, «si l’objectif de l’Etat n’est pas la mise à mort de la presse privée, des mesures courageuses de réforme de l’écosystème médiatique, basées sur des concertations franches, sont indispensables». «Seules des mesures hardies de correction et d’adaptation de l’écosystème des médias, prises à la suite de concertations franches, peuvent servir de solutions», souligne-t-elle.
Pour sa part, elle se dit «prête à participer activement à ce processus», en finalisant la revue des conclusions des Assises des médias, entamée il y a plus de deux ans. «La Cap est d’autant plus prête à prendre part à cet exercice qu’elle aborde ce week-end la dernière revue des conclusions des Assises des médias, après plus de deux ans de travaux», dit-elle. Tout en appelant à la vigilance de l’opinion publique nationale et internationale, ainsi que des organisations internationales de défense de la liberté de la presse, face aux dangers qui guettent le journalisme au Sénégal «si rien n’est fait».