Déclaration Abdoulaye Seydi artiste-comédien : «Le théâtre sénégalais est malade»

Il considère que le théâtre sénégalais est «malade». L’artiste comédien Abdoulaye Seydi a organisé un spectacle de théâtre appelé «Des mots pour des maux», en collaboration avec Moustapha Mboup. C’était samedi dernier au Centre culturel Blaise Senghor. Les violences faites aux femmes et l’émigration clandestine ont été, entre autres thèmes, développés.Par Mamadou SAKINE –
Des mots pour des maux, c’est l’intitulé du spectacle de théâtre. Il a eu lieu au Centre culturel Blaise Senghor de Dakar, samedi dernier. En effet, les mots déclamés pour les maux de la société ont pour noms : violences faites aux femmes, émigration clandestine et racisme. Les co-metteurs en scène, Abdoulaye Seydi et Moustapha Mboup, sont derrière cette soirée théâtrale riche en couleurs à laquelle le public a eu droit. Elle a été marquée par des silences, le regard du personnage central, Abdoulaye Seydi, la danse contemporaine, la musique traditionnelle lyrique. Un vent frais caresse le visage de la centaine d’invités en présence du directeur Aliou Kéba Badiane. «Un beau spectacle de théâtre qui donne de l’espoir aux acteurs culturels. C’est un théâtre total. On a vu la musique, la flûte, la danse contemporaine, il y a même le rap à l’intérieur. On a vu une renaissance des écrits d’abord, des déclamations de poème, des chants traditionnels puisés dans le patrimoine culturel du Sénégal. Quand on a entendu la musique de Baba Maal, ça a fait chaud au cœur», commente Fatimata Sall, une spectatrice.
Il s’agit d’un nouveau concept qu’il voulait partager avec ce public, une innovation, indique Abdoulaye Seydi, artiste comédien, co-metteur en scène. Le directeur artistique de la compagnie théâtrale Dialaba de Kolda revient sur les choix des thèmes. Il dit : «J’étais à Paris quand j’ai appris la mort de Yoba Baldé qui est de ma région natale, Kolda. Une femme qu’on avait assassinée, égorgée. Ça m’a beaucoup affecté aussi. Pas que cela, il y avait une femme qu’on avait tuée à Tambacounda. Donc, il y a eu une recrudescence de viols au Sénégal. En tant qu’artiste, je me suis dit qu’est-ce qu’il faut faire. Et j’ai pensé à ce spectacle-là.» Et d’ajouter : «C’est un spectacle d’actualité parce qu’aujourd’hui c’est l’humanité qui va mal. En France, il y a eu le mouvement des gilets jaunes, la mort de George Floyd aux Etats-Unis. Donc, c’est tout ce questionnement que nous avons essayé de concentrer dans ce spectacle-là.» Et le nombre de jeunes qui ont péri en mer en tentant la traversée de la Méditerranée et qui, par moments, était supérieur aux décès liés au Covid-19 au Sénégal, a aussi inspiré. «On est dans la relance du théâtre sénégalais parce qu’il est malade. Donc, ce sont de telles initiatives qu’il faudrait pour que le théâtre puisse reprendre son élan d’antan, mais aussi la formation des jeunes», déclare Abdoulaye Seydi. Ce dernier envisage d’ailleurs d’organiser ce genre de spectacles dans les quartiers, notamment dans les cours de récréation, c’est-à-dire faire le théâtre de rue. «Il faut que le gouvernement aide le théâtre et mette les fonds là où il faut pour que le théâtre redore son blason et que les comédiens vivent de leur art», plaide l’interprète Massaër Diop, artiste-comédien.
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