Le prétexte du cours inaugural de la 4e session du Master en Sécurité a permis aux acteurs de mettre en relief la crise sécuritaire en Afrique dont la fragilité s’explique par diverses raisons.
La crise sécuritaire en Afrique reste marquée par plusieurs raisons. C’est du moins l’avis du général de Brigade Mbaye Cissé, directeur du Centre des hautes études de défense et sécurité (Cheds). A en croire le directeur du Cheds, «la situation sécuritaire dans une grande partie de la sous-région ouest-africaine est caractérisée par sa fragilité, son évolution rapide et donc l’incertitude qu’elle contribue à installer dans les espaces ruraux frontaliers».
Et aujourd’hui, «la carte sécuritaire actuelle du continent permet de voir que l’action violente s’est beaucoup répandue en Afrique de l’Est et de l’Ouest», ajoute le général Cissé pour qui «elle ne cesse d’enrôler de nouveaux acteurs et consolider son lien avec la grande criminalité, en tirant le maximum de profit des frustrations diverses d’ordre politique, économique ou social».
Abondant dans le même sens, Me Sidiki Kaba, qui a présidé à l’ouverture de cette session, pense aussi que le thème choisi pour la circonstance, «Enjeux et défis de la coopération sous régionale dans la prévention et la lutte contre l’extrémisme violent en Afrique», présente un grand intérêt pour les organisations régionales, les Etats et les populations du continent. En ce sens que «la question de la coopération entre les acteurs sous régionaux de la prévention et de la lutte contre l’extrémisme violent se pose avec une grande acuité dans toute la sous-région du continent africain», indique-t-il.
Selon le ministre des Forces armées, l’extrémisme violent se manifeste sous des formes variées à savoir «l’action violente directe sur les populations, les représentants et les symboles de l’Etat, la substitution à l’autorité publique là où l’Etat est absent, la criminalité transnationale organisée et par l’exacerbation de la conflictualité intercommunautaire».
Face à cette violence complexe qui ne cesse d’évoluer, «les Etats réalisent que la seule réponse militaire est insuffisante et qu’une solution plus globale et inclusive est nécessaire», ajoute-t-il.
Et c’est tout le sens de cette session de formation qui va former des acteurs compétents et préparés à relever les nouveaux défis de conception et de la mise en œuvre des réponses adaptées au niveau stratégique. «La formation que vous allez suivre vise à répondre à ce besoin en mettant progressivement à la disposition de nos Etats, des cadres militaires et civils ayant les compétences adéquates pour concevoir, construire, au niveau stratégique, une vision intégrée de la sécurité, au service du développement dans la paix», a indiqué le général de Brigade Mbaye Cissé.
Ainsi, les auditeurs auront à suivre dans leur formation, des modules variés dans les domaines de la sécurité collective, les enjeux régionaux, la sécurité nationale, la gestion de crise majeure, le leadership de haut niveau et la gouvernance de la sécurité entre autres.
En prononçant le cours inaugural de cette 4e session du Master Sécurité nationale, le Pr Abdou Rahmane Thiam, le chef du département de Sciences politiques à la Faculté des Sciences Juridiques à l’Ucad, est revenu d’emblée sur les termes de l’islamisme, du djihadisme, de l’extrémisme et du fondamentalisme en donnant pour chacun la définition et les caractéristiques.
La multitude d’instabilités marquée par des conséquences de la dislocation de deux blocs
Maintenant, quelles sont les solutions que les acteurs étatiques comme non étatiques doivent apporter à cette situation qui menace la stabilité du monde ? En réponse à cette question, l’universitaire a porté son regard sur le défi de la coopération. Selon lui, c’est une exigence pour les acteurs de s’inscrire dans des perspectives globales au niveau mondial comme régional et sur la coopération. Car les défis qui se posent aujourd’hui sur ces questions de menace, pense-t-il, trouvent leur origine dans la guerre froide.
A en croire le Pr Thiam, la multitude d’instabilités dans le monde est marquée par des conséquences de la dislocation de deux blocs qui portaient une influence sur la régulation des relations internationales.
«Cette situation a entraîné un monde unipolaire marqué par l’hégémonie d’une puissance. Ce qui fait que les ennemis circulants non identifiables sont aujourd’hui difficiles à contourner.» Avant de montrer qu’il est difficile aujourd’hui de faire face à certaines menaces si l’on sait qu’il y a des enjeux économiques inhérents aux ressources dans le continent et dans le monde.
Selon toujours lui, l’extrémisme violent s’intéresse à ces enjeux économiques et politiques. Et c’est ce qui explique la montée en puissance du «Djihadisme» avec Aqmi. Ce qui fait que «nous assistons en Afrique de l’Ouest à cette typologie de violence qui fait que les acteurs doivent beaucoup prêter attention à ces menaces», dit-il.
Chômage et pauvreté : parmi les causes de l’extrémisme violent
Estimant qu’il n’y a pas de pays épargné, le maître de conférence à l’Ucad pense que les menaces sécuritaires, les conflits communautaires, la prolifération des armes légères, le trafic de drogue, la criminalité frontalière et les formes de violence qui les engendrent, les conflits religieux qui sont une forme de défense au sens sociologique du terme, trouvent leur explication dans le chômage et la pauvreté.
Comme solutions à l’extrémisme violent, M. Thiam encourage la coopération régionale et sous régionale face à ces défis, la stratégie pour le développement et la sécurité dans l’espace sous régional de tous les Etats membres de l’espace Cedeao.
A son avis, il faut renforcer la sécurité politique, la sécurité, la bonne gouvernance, la promotion de l’éducation et de l’économie et la création des conditions du développement durable, la prospérité et l’épanouissement des citoyens et réduire les attaques terroristes.
Pour mieux se protéger, les Africains ont besoin d’être sensibilisés croit-il en demandant aux gouvernements de mutualiser leurs actions, d’imprimer une approche par le bas en impliquant davantage les populations dans ces luttes. Au plan religieux, il pense qu’il faut également établir le dialogue inter religieux et appuyer les Etats dans leurs actions de promotion de lutte contre l’insécurité et de promotion de la paix à l’extérieur comme à l’intérieur.
Par ailleurs, le programme de Master Sécurité nationale session 2021 a été lancé hier à travers un cours inaugural. La présente session de la 4e Promotion de la session du Master du Centre des hautes études de défense et sécurité (Cheds), totalise ainsi un effectif de 18 auditeurs composés de 4 personnels des forces de défense et de sécurité issus de la Police nationale, des Eaux et forêts, de l’Administration pénitentiaire et des Parcs nationaux et civils.
Selon le général Mbaye Cissé, directeur du Cheds, cette formation de haut niveau réunit les cadres nationaux des secteurs public et privé, civils et militaires «dans le but d’approfondir leurs connaissances dans les domaines de la défense et de la sécurité et de la géopolitique nationale, sous régionale et internationale».
D’après le général Mbaye Cissé, elle présente un grand intérêt pour les Etats. Car «elle constitue une étape importante dans le renforcement du vivier d’experts civils de haut niveau dans les domaines de la défense et de la sécurité», soutient-il.