Déclaration – Mamadou Diop Decroix sur la suppression de l’Usaid : «L’aide ne développe pas celui qui la reçoit, mais plutôt celui qui l’octroie»

La décision prise par le Président Trump de supprimer les programmes d’aide de son pays doit être un électrochoc pour les Africains, afin qu’ils comptent sur eux-mêmes. C’est en tout cas le conseil que semble donner Mamadou Diop Decroix, Secrétaire général d’Aj/Pads, à nos gouvernants. Par Dieynaba KANE –
La suppression des programmes d’aide américains par le nouveau Président des Etats-Unis, Donald Trump, fait réagir le leader d’And jëf/Parti africain pour la démocratie et le socialisme (Aj/Pads). Dans une tribune, l’homme politique fait remarquer qu’en «vérité, l’aide ne développe pas celui qui la reçoit, mais plutôt celui qui l’octroie». D’après lui, «toute l’histoire récente des nations le prouve». Et d’argumenter : «On donne 10 de la main droite pour retirer 100 de la main gauche. Cette réalité n’est aujourd’hui réfutée par personne. Dès lors, que nous reste-t-il à faire ? Compter sur nos propres forces (à distinguer de l’autarcie). Aucune autre issue n’existe.»
Poursuivant ses propos, M. Diop soutient que «compter sur ses propres forces ne saurait être un simple slogan».
Pour Decroix, «c’est pratiquer, dans le contexte du Sénégal, ce que les nouvelles autorités ont baptisé l’Agenda de transformation Sénégal 2050, qui apparaît comme la corde principale qui doit tirer les mailles du filet qui nous libère».
De l’avis du Secrétaire général d’Aj/Pads, «s’il y a un sujet qui mérite qu’on en discute et qu’on s’étripe intellectuellement s’il le faut, c’est bien celui de sortir notre pays de cette pauvreté». Soulignant que pendant que les autres, notamment l’Europe, la Russie, la Chine, l’Amérique latine, sont en train de trouver ou ont déjà trouvé des stratégies pour faire face aux projets de Trump, en Afrique, on fait encore face à des conflits. «Et l’Afrique ? C’est le Sahel et ses guerres télécommandées, c’est le Congo démocratique en cours de dépeçage, c’est le Soudan en flammes après avoir été partagé en deux parties. Cerise sur le gâteau, Mahamat Faki, président de la Commission de l’Union africaine, qui a eu le «courage» au moment de boucler ses huit années de mandature, de dire la vérité et toute la vérité sur l’inanité de cette organisation, et par conséquent sur l’irresponsabilité de l’essentiel des dirigeants africains d’aujourd’hui. Il signale dans une lettre-bilan que le Conseil de paix et de sécurité ne sert à rien, que le fonctionnement de l’institution dépend de l’aide extérieure et qu’en conséquence, il n’y a ni autonomie ni indépendance, et qu’enfin la zone de libre-échange qui aurait pu être un puissant outil de développement est dévoyée par une Union africaine marginalisée devant la bilatéralisation des intérêts en jeu. En somme, rien à attendre de l’Ua», a dénoncé l’ancien ministre de la Communication, de la culture et du commerce sous Abdoulaye Wade. Quant au Sénégal, souligne-t-il, «le contenu du débat laisse penser que tout ce dont il est question aujourd’hui comme défis au plan mondial se déroule plutôt sur la planète Mars, loin de nous». Mais, croit savoir l’homme politique : «Trump se présente comme un véritable électrochoc qui pourrait nous extraire vigoureusement de cette torpeur.» «Le personnage est pittoresque, mais certaines de ses initiatives nous rappellent que nous devons nous soustraire rapidement aux controverses sur les sujets sans intérêt qui peuplent notre landerneau médiatique», a-t-il déclaré.
Mamadou Diop Decroix admet toutefois qu’il y a «certes une relative complexité du contexte où s’entremêlent plusieurs fronts de lutte : la reddition des comptes et le vacarme qui l’entoure, les réformes majeures qu’attend le pays face à des intérêts qui restent puissants et qui n’entendent pas abdiquer, le nécessaire ajustement des citoyens et l’organisation du Peuple tout entier».
Par ailleurs, dans son document, Mamadou Diop Decroix a fait un plaidoyer visant à «rassembler le Peuple». Avant d’envoyer un message au régime actuel : «Les Sénégalais qui n’aiment pas leur pays, qui ont détourné les milliards du Peuple et pillé ses richesses ne font pas 5% de la population. En effet, 5% de la population représentent près d’un million de Sénégalais. Est-ce qu’on peut imaginer que les personnes à poursuivre et à sanctionner font un million ? Bien sûr que non ! Ils ne font même pas le dixième.» Selon lui, «tous les autres sont du Peuple, avec leurs qualités et leurs défauts, leurs capacités et leurs limites, et peuvent, selon certaines conditions, apporter chacun sa contribution dans cette bataille pour recouvrer la dignité». La dignité, fait-il savoir, «ce ne sont pas des mots, ça se construit». Parlant du «bon sens», M. Diop Decroix note que le nôtre «est d’aimer notre pays, d’être fermes dans la défense de ses intérêts et d’être aussi avisés que quiconque d’autre dans le respect et la considération mutuels». «C’est la ligne qui est tracée avec netteté par le nouveau régime et qui devrait rallier tous ceux qui prennent véritablement conscience des défis (anciens comme nouveaux) qui agitent notre planète», a-t-il conclu.
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