Le recueil de poèmes «Entre Ombres et Lumières» de Mamadou Gaye a été présenté au public ce samedi à la librairie Harmattan.
La République des Lettres ouvre ses frontières à un nouvel arrivant. Mais pas un inconnu. Il s’agit d’un scientifique amoureux de la poésie. En publiant le recueil «Entre Ombres et Lumières», Mamadou Gaye intègre l’univers des poètes sénégalais. Samedi dernier à la cérémonie de présentation de son œuvre à la librairie Harmattan, l’émotion était grande. Le désormais poète a, à travers 23 poèmes, bercé ses lecteurs entre dualité et ambiguïté. L’amour charnelle, pudique, la peine, la révolte, l’indignation, l’engagement et enfin l’espoir résument l’œuvre de l’actuel directeur technique bâtiment et génie civil à la Compagnie sahélienne d’entreprises (Cse). Mais un de ses textes a particulièrement retenu l’attention et marqué les esprits de parents, amis, collègues, invités anonymes qui ont effectué le déplacement. Il s’intitule : «Maman quand le moment fut venu !». A travers ce poème inédit, l’auteur avec un cœur lourd de chagrin, adresse une lettre à sa mère décédée à l’âge de 62 ans.
Appelé avoir déclamé ce beau poème, David El Bachir Diallo, collègue de M. Gaye a craqué et fondu en larmes. Ces mots doux, les souvenirs retracés dans ce passage du livre l’ont touché et ému. «J’ai choisi ce poème chers invités parce que je m’y retrouve. J’ai eu ma maman qui a terminé sur une chaise roulante avec le cancer. J’ai eu mon épouse, la maman de mes enfants qui a terminé avec la chaise roulante, le cancer. Si je n’arrive pas à terminer le poème ne m’en voulez pas !» a d’emblée annoncé M. Diallo. Gagné effectivement par l’émotion, il n’a pas pu finir la lecture de ce texte. Parce que lui sont revenus des souvenirs de leur chère maman, qui a vécu et s’est battu pour ses progénitures même dans les heures les plus sombres, essuyant leurs larmes, apaisant leurs faims. Les derniers moments de sa vie dans sa chaise roulante à cause du cancer, sa spiritualité composent ces vers.
Regards critiques
Raphaël Ndiaye, le directeur général de la Fondation Léopold Sédar Senghor a exprimé son incompréhension sur certains points de l’œuvre. «Seuls deux poèmes de l’auteur sur 23 au total sont datés. L’un pour le 28 Octobre 1980 (…) et l’autre le 02 Janvier 1983. Et pourquoi les avoir datés Mamadou Gaye et pas les autres ? Les autres poèmes ont –ils été retravaillés ? Est ce que la version originale a été retravaillée ? Comment un ingénieur trouve t-il le temps de faire de la poésie ?», interpelle M. Ndiaye qui a voulu par ailleurs un éclairage sur le poème titré Soleil couchant. L’auteur, par ailleurs «grand mathématicien», comme l’ont peint ses anciens camarades de classe a d’abord indiqué qu’ «Il ne peut y avoir de confinement entre les scientifiques et les littéraires». «On est l’un et l’autre à la fois.», a-t-il réagi avant de mentionner que le choix du titre de son recueil de poèmes «Entre ombres et Lumières» est un «symbolisme représentant les balancements de succession entre le bonheur et le malheur, déception et satisfaction, épreuve et réussite, bon temps et mauvaise passe, doute et certitude, guerre et paix». Bref, la situation de tout être humain.
Au sujet des datations, le poète Mamadou Gaye a signalé que sa démarche n’est pas un choix. Parce que, dit-il, il a été victime du flot d’arrivée des messages qu’il a juste accompagnés. Mais aussi, ces poèmes ont été rédigés sur plus de 40 ans. «Certains poèmes ont été retravaillés, mais à 90%, ils n’ont pas été retravaillés… Sur le soleil couchant, je n’ai pas vu de contradiction», dit-il. Dans son analyse sur la forme du recueil, Abdoul Alpha Dia, un expert en Ressource Humaine atteste qu’ «On reste toujours dans cette dualité qui symbolise la poésie, dans cette ambiguïté. On a une dualité qui crée une tension permanente. C’est-à-dire la lecture du livre est faite d’une tension qui ne se relâche jamais». Et sur le fond, la lecture de ce livre a été pour lui, «un voyage, un tour du monde des sentiments.»
«J’ai retrouvé, j’ai vécu, j‘ai ressenti toutes les émotions qui peuvent faire de moi l’homme que je suis aujourd’hui», a dit M. Alpha Dia. Quant au préfaceur de ce recueil, le Pr Hamidou Dia, il écrit que «la poésie de Mamadou gaye est redevable de la poésie du 19e siècle, que je considère comme le siècle par excellence de la poésie…» «Ce texte mérite indubitablement l’existence littéraire et une grande postérité», a conclu M. Dia, lauréat du jasmin d’argent de la poésie francophone.
msakine@lequotidien.sn