Démocratie de concordance : Ousmane Khouma et Hamidou Anne corrigent Abdourahmane Diouf

Par Alioune Badara NDIAYE (Correspondant)
– La rencontre citoyenne organisée par la Fondation Sococim sur le thème «L’état de la démocratie au Sénégal et en Afrique de l’Ouest», a servi de prétexte pour une mise au point sur le concept de démocratie de concordance, prôné par Abdourahmane Diouf du parti Awalé. «J’ai un très bon ami, intellectuel et homme politique qui critique beaucoup la démocratie et parle de démocratie de concordance, au lieu de démocratie de concurrence. Je lui ai déjà dit ; je pense qu’il se trompe parce qu’il confond démocratie comme système de valeur et régime», a relevé le politiste Hamidou Anne. «Ce qu’il critique c’est la 5ème République, son fonctionnement, le président de la République qui est l’alpha et l’oméga des institutions. Il parle beaucoup de discours de Bayeux du Général de Gaulle de 1946. Ça c’est un régime, ce n’est pas la démocratie comme système.
Abdourahmane Diouf se trompe», a poursuivi l’universitaire. «Quand on dit que le Sénégal a hérité du discours de Bayeux de de Gaulle, ce n’est pas vrai. De 59 à 62, notre régime était plus de type 4ème République. On avait un régime parlementaire jusqu’à ce que les événements (1963) poussent le Président Senghor à changer», a-t-il encore brandi pour pointer les errements de Dr Diouf. «Tu es plus gentil que moi dans tes remarques (…) Par rapport au régime et non pas au fondement, c’est carrément un problème de démarche épistémologique. Soit on fait un essai, soit on fait un ouvrage», a affirmé pour sa part, le juriste et politiste Ousmane Khouma, qui a révélé avoir échangé avec l’auteur de démocratie de concordance autour du livre. Tous deux ont convenu qu’une telle pratique conduirait à un consensus mou, alors que la vitalité de la démocratie repose sur un consensus fort.
Ce passage brièvement expédié, les animateurs sont revenus sur des questions beaucoup plus importantes. Installations, changements ou /et prolongations anticonstitutionnels de gouvernements : les «impensées» des sanctions de la Cedeao, démocratie «empruntée» ou démocratie «dévoyée en Afrique de l’Ouest», ont en effet été entre autres, les thèmes développés. C’est d’ailleurs d’après eux, le consensus mou qui a été un des éléments ayant déclenché la crise malienne. «Il y a eu la déliquescence des institutions maliennes, le consensus mou et ce que ça a donné, le laxisme, la destruction de Tombouctou, comment l’Etat malien s’est pratiquement effondré, comment la Cedeao en n’opérant pas une intervention, comment l’Ua en ne prenant pas ses responsabilités, comment les Nations unies en ne prenant pas les résolutions qui pouvaient faire sortir de cette logique, ont poussé les Français à s’inviter dans le débat et finalement, on ne pouvait pas s’inscrire dans une continuité rassurante», a résumé Pr Khouma. Des suggestions de réformes ont naturellement jailli lors de la rencontre et en premier, selon M. Anne, c’est de revoir la «présidence impériale», c’est-à-dire la concentration des pouvoirs entre les mains d’un «seul homme très puissant» : le président de la République.
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