«La fête du Travail fut créée parce qu’on n’osait pas fêter le repos», Robert Sabatier.
En ce qu’elle fédère les travailleurs du monde entier, l’aspiration à plus de progrès social a toujours incité ces derniers à s’inscrire dans une dynamique d’unité d’action plus large et dans la perspective de conquête ou de reconquête (revendication de restitutions) d’avantages dans les domaines du travail et de la sécurité sociale.
La fête du Travail, qui est un symbole de cette quête vers un mieux-être, est commémorée le premier mai dans la plupart des pays du monde.
Le choix de cette date, de même que le motif y afférant ne sont pas fortuits.
En effet, le 1er mai, naguère premier jour de l’année comptable pour beaucoup d’entreprises aux Etats-Unis d’Amérique, correspondait aussi au jour du renouvellement des contrats de travail à durée déterminée d’un an, jadis indéfiniment reconduits au gré de l’employeur.
La précarité de l’emploi a donc été déterminante dans l’optimisation de l’effet et de l’action de groupe des syndicats de travailleurs et de la réussite de leur mobilisation lors des évènements survenus le 1er mai 1886 à Chicago.
Quant au motif, au facteur déclencheur ayant conduit à ces évènements, il était lié à la volonté de réduire la durée journalière de travail.
C’est dans ce contexte de précarité de l’emploi et aux fins de remédier à la pénibilité du travail que la Fédération américaine du travail a pu réussir la prouesse de mobiliser les 340 000 salariés n’ayant pas pu obtenir gain de cause dans leur aspiration de voir leur horaire de travail journalier limité à huit (8) heures.
Le bilan fut macabre : trois grévistes, puis quinze policiers tués, cinq leaders syndicaux pendus et trois autres condamnés à la prison à perpétuité.
Mais, essaimant à travers le monde et s’étendant dans le temps, la prise en charge de cette revendication contre la pénibilité du travail aboutit, après la Première guerre mondiale, à la signature, à Versailles, le 28 juin 1919, du Traité de paix entre l’Allemagne et les Alliés qui fixe, en son article 247, «l’adoption de la journée de huit heures ou de la semaine de quarante-huit heures comme but à atteindre partout où elle n’a pas encore été obtenue».
Auparavant, les bases de la création de l’Organisation internationale du travail (Oit) avaient été déjà jetées en début 1919 avec la rédaction de la Constitution de l’Oit par la Commission du travail présidée par Monsieur Samuel Gompers, président de la Fédération américaine du travail.
Depuis lors, tant aux niveaux international que national, d’importants progrès ont été réalisés par les mandants tripartites en matière de justice sociale et de promotion du travail décent, avec l’adoption et la ratification de normes internationales du travail.
Une des morales de ce pan important de l’histoire de l’humanité, c’est que la solidarité et l’unité d’action syndicales ont toujours été le levain de l’amélioration des conditions de travail et du pain quotidien des masses laborieuses.
Aussi, en auraient-ils eu la prémonition par une lecture prospective du climat social d’alors que ces employeurs du 19ème siècle auraient sans doute anticipé en rendant plus décentes les conditions de travail de leurs employés.
En cela ressort la nécessité pour tous les employeurs, de toutes obédiences, y compris l’Etat-employeur, d’adopter une veille sociale permanente dans le champ des relations professionnelles pour prévenir les conflits collectifs de travail et éviter que ceux-ci n’affectent négativement leurs objectifs de croissance économique, de stabilité et de développement social.
Au demeurant, la précarité de l’emploi et la pénibilité du travail étant encore de mise sous de nouvelles formes, les mandants tripartites nationaux devront donc plus que jamais se résoudre à faire face au défi de compétitivité des entreprises dans un contexte marqué :
d’une part, par la nécessité de replacer la protection sociale des salariés au centre des priorités vu la récurrence des difficultés des entreprises et le risque accru de prévalence des risques en matière de sécurité sanitaire ;
d’autre part, par l’intrusion de la numérisation et de la digitalisation dans le champ des relations de travail.

Bonne fête du Travail !
Oumar FALL,
Inspecteur du Travail et de la Sécurité sociale,
Secrétaire exécutif du Haut Conseil du Dialogue social oumarfall8@yahoo.fr