Récemment, Monsieur le Premier ministre Ousmane Sonko a émis l’idée de développer la pisciculture dans la zone littorale des Niayes. Le développement de la pisciculture dans cette zone passera forcément par une approche écosystémique conformément à la Constitution du Sénégal en ses articles : 25-1, intitulé : «Des droits des citoyens sur leurs ressources naturelles et leur patrimoine foncier», et 25-2, intitulé : «Du droit à un environnement sain.» Du coup, se pose une question majeure : «Quel système de production mettre en œuvre pour une pisciculture durable dans cet écosystème souvent très sollicité et fragilisé par l’activité humaine ?»

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Seul un système intégré et adapté au milieu permettra de valoriser les déchets des filières existantes (aviculture et pêche), accroître les rendements des cultures horticoles et limiter les polluants par l’usage des engrais chimiques. La pisciculture plaide bien pour ces causes. En effet, l’aviculture (élevage des volailles), par ses apports de fertilisants, peut contribuer efficacement à intensifier la production et le développement de la pisciculture (élevage des poissons) dont les eaux usées, riches en engrais organiques, fertilisent efficacement les cultures maraîchères. Quant à la pêche, elle peut constituer une source d’approvisionnement en farine de poisson au niveau des points de fumage le long de la côte. Il existe en effet beaucoup de déchets constitués de poissons braisés, fumés et séchés, mais cassés ou trop cuits, non présentables à la vente. Ces sous-produits souvent non valorisés, sont jetés, utilisés comme engrais dans les cultures maraîchères ou collectés pour être vendus aux éleveurs de poulets. Une fois broyés et proprement mis en sac, ces déchets transformés en farine de poisson pourront être utilisés dans l’alimentation des poissons.

Un «Programme de développement de la pisciculture dans la zone littorale des Niayes» peut donc bien être développé selon trois systèmes :
Un système de pisciculture en eau douce de «Tilapia» (Oreochromis niloticus) en étang, en bassin ou dans des réservoirs d’arrosage des maraîchers ;
Un système de pisciculture en eau salée ou saumâtre de «Tilapia» (Sarotherodon melanotheron heudelotii), espèce endémique dans la zone et vivant de préférence entre les deux eaux, est élevée en aquaculture intensive par «Crams» (producteur et provision d’alevins) à Mbour et dans la lagune de Mbodiène. Ces alevins produits pourront servir à l’empoissonnement des étangs ou des plans d’eau de marées inter-dunaires dans la zone littorale des Niayes.

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Un système de pisciculture en eau douce «semi intensive» ou «intensive» de Silures (Clarias senegalensis), espèce aussi endémique, actuellement élevée au Sénégal en très haute densité dans les systèmes d’élevage. Le système proposé s’intègre dans les activités de cultures maraîchères qui utilisent les eaux souterraines peu profondes, accessibles grâce à des puits ou des forages. L’eau est d’abord stockée dans un bassin, une sorte de réservoir, avant d’être puisée pour l’arrosage des cultures maraîchères. L’intégration du système consistera à placer un bassin d’élevage de silures entre le puisard et le réservoir d’arrosage.

En 2023, l’Ansd (Agence nationale de la statistique et de la démographie) a dénombré 908 628 ménages qui ont une activité agricole, soit 45, 6% des ménages du Sénégal ; environ 16% des ménages s’adonnent à l’horticulture. Sur la base d’une production d’au moins une tonne par ménage, le potentiel de production piscicole dans la zone littorale des Niayes peut être estimé à près de 50 à 100 000 tonnes. L’intégration de la pisciculture permettra donc de diversifier les activités horticoles, accroître les revenus des horticulteurs et générer des retombées socio-économiques sûres pour la communauté côtière.
Dr Tidiane BOUSSO
Océanographe biologiste