Diomaye à New York : «Nous aimerions que le Fmi presse un peu le pas»

Le Président Faye a demandé au Fmi de faire vite pour permettre au Sénégal de savoir sur quel pied danser. C’est un appel pour un dégel entre les deux partenaires suite aux révélations du Premier ministre sur les chiffres falsifiés des comptes publics le 26 septembre 2024.
Les relations entre l’Etat et le Fmi sont toujours glaciales. Dans un entretien avec France 24, en marge de l’Assemblée générale de l’Onu à New York, le Président Bassirou Diomaye Faye a mis l’institution devant ses responsabilités. «Nous voulons que le Fmi presse un peu le pas pour que nous sachions sur quel pied danser…», appelle-t-il. Il a fait une longue lecture expliquée de la situation actuelle pour assurer que le gouvernement a fait l’essentiel : «En 2018, j’avais écrit une lettre qui avait été portée par le seul député que nous avions à l’époque, l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko, qui a été remise au Fmi, alertant sur le dépassement sur les ressources extérieures. A l’époque, le montant n’était «que» de 236 milliards. Le Fmi non seulement ne nous avait pas répondu, mais n’avait pas fait les diligences normales pour mettre un garrot sur ces pratiques.» Il poursuit : «Six ans plus tard, je suis devenu président de la République et j’ai demandé l’application de la loi portant Code de transparence dans les finances publiques. Nous avons fait tout ce que nous devions faire, pas pour le Fmi, mais pour la crédibilité de notre pays. Le Fmi est libre de faire les démarches additionnelles qui le rassurent, mais nous voulons que le Fmi presse le pas pour que nous sachions sur quel pied danser. Et que les partenaires qui attendent le signal du Fmi sachent aussi à quoi s’en tenir.» En clair, la balle est dans le camp de l’institution de Washington, qui traîne encore les pieds avant la signature d’un nouveau programme. «Tout ce que nous devions faire, nous l’avons déjà fait, non pas pour le Fmi, mais pour les dirigeants que nous sommes et pour la crédibilité que nous avons vis-à-vis de notre Peuple.»
En plus, la question sur d’éventuelles poursuites contre Macky Sall a été aussi au cœur de l’entretien. A ce propos, il est resté sur les principes qui gouvernent la Justice. Il dit sans équivoque : «Je fais toujours la différence entre faire la justice et rendre la justice. Rendre la justice suppose respecter la présomption d’innocence de chacun, respecter ses droits à une défense libre et lui assurer un procès juste et équitable. C’est ce à quoi nous nous en tenons au Sénégal, quel que soit le citoyen concerné, ce sont les règles de procédures et le Droit sénégalais qui vont s’appliquer. Il ne saurait y avoir de présomption de culpabilité sur personne. Chacun est maintenant libre d’exprimer ses opinions, mais quand la Justice va se prononcer, quel que soit le cas, elle le fera de manière sereine, sur la base de preuves matérielles qui seront versées devant un juge indépendant et libre.»
Par ailleurs, il est revenu sur le départ des troupes françaises du Sénégal. Il dédramatise tout : «Nos populations ont une forte aspiration à la souveraineté… Quand nous avons demandé le départ des Eléments français du Sénégal, nous avons en même temps réaffirmé notre volonté de ne plus avoir de présence militaire quelconque dans notre pays. Cela a pu être perçu malheureusement comme une volonté de rupture… mais nous n’avons jamais été dans cette démarche. J’ai toujours considéré que la France était un partenaire important pour le Sénégal.» Tout en rappelant qu’un séminaire intergouvernemental entre la France et le Sénégal se tiendra en novembre à Dakar, retardé surtout par le changement de Premier ministre en France.
Quid de la menace terroriste ? «Elle n’est pas simplement qu’à l’Ouest du Mali ou à l’Est du Sénégal. Je suis convaincu que le phénomène du terrorisme, où qu’il soit, est une menace», assure le chef de l’Etat, qui soutient que la surveillance est renforcée au niveau des frontières. «Nous renforçons notre sécurité sur l’ensemble des frontières, parce que la menace peut venir de partout et elle peut être multiforme», souligne le président de la République, convaincu que pour venir à bout de ce phénomène qui prend de l’ampleur, il faut «une démarche intégrée, combinant l’échange de renseignements, le dialogue entre les puissances et les pays impliqués, mais aussi avec les pays dont les frontières sont menacées».