«Les hôpitaux sont maintenant comme des cliniques. Ils ne recherchent que de l’argent. Ils n’en ont cure de la situation sociale du malade. C’est seulement l’argent qui compte à leurs yeux.» Ce diagnostic d’un médecin-chef de région présentement à la retraite lors d’une réunion des directeurs d’hôpital cadre parfaitement avec ce qui se passe actuellement au Centre hospitalier régional Heinrich Lübke. Dans cet établissement de santé de niveau 2, la situation est très préoccupante. Les tarifs pour l’accouchement passent de 10 mille à 12 mille 500 F Cfa. L’analyse pour le groupage sanguin passe de 2 000 à 3 000 F Cfa. Les patients, en plus de souffrir de la pathologie qui les a contraints à fréquenter la structure, souffrent aussi le martyre d’avoir à débourser de l’argent pour acheter le carburant s’ils doivent être référés vers d’autres structures de santé. Une situation que déplore le Syndicat national des travailleurs de la santé (Syntras).
Observant depuis hier une grève de 48h, Moussa Guèye et Boubacar Dacosta, respectivement chargé des revendications et de l’administration, ont fait face à la presse. Selon Moussa Guèye, «la décision prise par le directeur El Hadji Amadou Dieng est inadmissible. Les malades sont obligés de payer le carburant pour être évacués. Cela n’est écrit nulle part. Il a dit que le malade doit participer. Imaginer un malade qui n’a même pas de quoi payer un ticket pour la consultation, comment peut-il débourser de l’argent pour son évacuation ? Il y a le non-respect du protocole signé». Et le chargé des revendications du Syntras de poursuivre : «Les conditions des malades sont déplorables. Ce qui se passe dans la cuisine est inacceptable. C’est comme si ces gens étaient des prisonniers. Le repas n’est jamais venu à l’heure. Les malades ne mangent pas à leur faim. Le repas servi n’est pas de bonne qualité.»
Après avoir diagnostiqué les difficultés des malades, il expose celles des employés. «Le directeur impose la dictature au sein de l’hôpital. Son prédécesseur avait régularisé 23 personnes et lui, lorsqu’on lui a demandé de le faire, il n’a régularisé que 10. Depuis 2003, il n’y a pas d’avancement. Nous avons négocié avec lui. Il ne respecte pas l’harmonisation des salaires. Il y a une cinquantaine de prestataires qui attendent toujours. Le directeur est un chasseur de primes. Il a refusé d’occuper le logement qu’on lui avait donné. Il a pris un propre logement en ajoutant 100 mille francs de Cfa comme indemnités. C’est un vrai dictateur. Il a interdit aux agents qui ne sont pas de garde de manger à l’hôpital. Il est le premier directeur à licencier des travailleurs. Il a licencié trois travailleurs sans aucune raison», avance M. Guèye.

Un hôpital sans orthopédiste
Par ailleurs, les patients souffrant de fracture ne sont pas les bienvenus dans cet hôpital. Depuis 4 mois, l’unique chirurgien-orthopédiste est parti en hexagone. Moussa Guèye, chargé des revendications dudit syndicat, déplore : «Il y a maintenant 4 mois que l’hôpital n’a pas d’orthopédiste, quelque chose de primordial dans cette structure.» Interpellé sur ces accusations, El Hadji Amadou Dieng, le directeur de l’hôpital, précise : «C’est une obligation du malade de participer à son évacuation. L’évacuation est une prestation payante. C’est comme une consultation, donc le malade doit participer. Sur la demande, ce n’est pas ces questions qui ont été dites. La question qui a fait qu’ils sont en grève est le problème de l’indemnité de transport. Ils veulent le conserver même s’ils sont en congés. Les autres problèmes n’ont jamais été soulevés. Sur le protocole de 2015 dont ils parlent, tous les points ont été réglés, la régularisation est effective», a-t-il dit.
badiallo@lequotidien.sn