Le départ de Amadou Bâ de l’influent ministère de l’Economie et des finances peut être considéré comme une disgrâce. A moins de l’épargner des tirs contre lui, comme il l’a fait avec Dionne en envisageant la suppression du poste de Pm, Macky Sall va décider de l’avenir du nouveau ministre des Affaires étrangères aux prochaines Locales. Tout dépendra des investitures à Dakar.

Il est vrai que la nouvelle équipe de Dionne est aussi… Locales. Macky Sall entend donc poursuivre son compagnonnage avec ses alliés dans Benno bokk yaakaar. Et c’est pourquoi l’Afp et le Ps notamment restent et conservent leur quota dans le gouvernement. C’est encore une «armée» préparée à aller à l’assaut des collectivités locales, ce qui explique d’ailleurs la promotion de certains responsables qui ont gagné leur localité et d’autres qui sont lancés dans la course. Mais il est vrai aussi que des responsables qui ont des résultats positifs dans leur fief n’ont pas été récompensés. Ou en tout cas pas à la hauteur de leurs attentes. Quelque part, cela peut ressembler à une sanction ou disgrâce. Le cas Amadou Bâ. Beaucoup ont vu son départ du département de l’Economie, des finances et du plan aux Affaires étrangères comme une sanction. Une purge. Possible puisqu’au regard de l’influence de l’argentier de l’Etat, il n’aurait pas craché sur ce ministère liquide. C’est en grande partie ce département qui a le poids d’un mini-gouvernement qui l’a fait. Politiquement. C’est aussi le Cv qui lui donne le privilège de trôner sur l’Apr et Benno bokk yaakaar de Dakar, après une rude bataille en sourdine avec Abdoulaye Diouf Sarr. Même si la confiance du président de l’Apr a aussi pesé. Bien évidemment, le Président Macky Sall a arbitré en sa faveur. Mais en acceptant de prendre aussi le risque de perdre une capitale acquise, un moment, par Khalifa Sall, Amadou Bâ jouait son avenir. Encore que c’était moins évident pour la Présidentielle où l’ex-maire de Dakar avait soutenu Idrissa Seck. Donc, logiquement -mais ce n’est pas toujours le cas en politique- il ne pouvait qu’être récompensé, quoique la victoire ne soit pas de son seul fait. Les promotions politiques sont aussi le fait de celui qui nomme et dégomme. Qui investit et n’investit pas. Macky Sall lui-même, après avoir «réélu», en tant que directeur de campagne, Abdoulaye Wade en 2007 dès le premier tour et lui avoir «offert» la majorité aux Législatives de la même année, même si l’opposition significative les avait boycottées, a été déchargé de ses fonctions de Premier ministre pour aller à l’Assemblée nationale. Ce qui n’était pas de son goût. Comme quoi les succès ne sont pas toujours récompensés.

En attendant les investitures
Cependant, en prenant les Affaires étrangères, le désormais ex-Mef peut bien se sentir «dégradé». Dans un contexte de dernier mandat et de succession qui se joue, il aurait naturellement préféré rester argentier. Il aurait plus les coudées franches dans ce département que là où le Président l’a mis. Les Locales se pointent, sauf report, et la politique se passe à l’intérieur. Alors que lui sera plus dans les dossiers de l’Extérieur et de la diplomatie. Aura-t-il le temps nécessaire pour se déployer ? De ce point de vue, il pourrait perdre de l’influence. Disgrâce ? Peut-être. Mais il y a à relativiser ce choix présidentiel. Le patron de l’Apr des Parcelles Assainies n’était pas loin d’un poids Premier ministre. Il était la cible comme pouvait bien l’être Boun Abdallah Dionne. Encore que tout dépendra de ce que ce dernier sera et fera en tant que Secrétaire général de la Prési­dence. Les mêmes raisons qui ont poussé le chef de l’Etat à vouloir supprimer le poste de Pm pour, entre autres, étouffer toutes velléités de succession prématurée ont dû prévaloir dans le cas Bâ. Certains le voient même comme un plan «naturel» pour Macky Sall. Voilà pourquoi on ne peut pas ne pas penser qu’en le déplaçant, Macky Sall lui enlève le «statut» de fusible. Il est encore le patron de Bby à Dakar. Et les investitures aux prochaines Locales clarifieront les choses. On verra si Macky l’«Amadou» toujours. Ou s’il veut le reléguer au «Bâ» de la liste.
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