Des Libanais trouvés sur l’Avenue Lamine Guéye ne semblent pas affectés par la double explosion qui s’est produit au port de Beyrouth, ce mardi, et qui a fait une centaine de morts et des milliers de blessés. L’écrasante majorité des personnes approchées est occupée à gagner de l’argent avec son commerce.
Le Liban pleure une centaine de morts et son personnel médical est en train de s’occuper de plusieurs milliers de blessés victimes de la double explosion qui a eu lieu le 4 août au port de Beyrouth. Une situation qui n’entrave en rien la bonne marche du business à l’Avenue Lamine Guèye où des Libanais tiennent des boutiques de tissus. Entre amadouer le client pour qu’il franchisse le seuil de la porte et attendre de potentiels acquéreurs, les Libanais trouvés sur cette avenue n’ont pas l’air d’être affectés par ce drame. Leur arracher quelques mots sur cette explosion relève d’une mission impossible. «Je ne peux pas parler de cette affaire car je n’ai pas suffisamment d’éléments», balance une femme, la quarantaine, lunettes noires vissée sur la tête tout en utilisant un journal pour se ventiler.
C’est le même son de cloche quelques mètres plus loin où une personne du 3ème âge est en train de compter des billets de banque. «Faites le tour et si vous ne trouvez pas d’interlocuteur, revenez me voir. J’aurai du temps libre» est la façon gentille de décliner la proposition de donner son avis.
Après plusieurs tours, Leila Badréodine, la quarantaine, vendeuse de chaussures, accepte de s’épancher sur le sujet. «L’explosion est causée par des déchets toxiques stockés au port depuis 12 ans», explique-t-elle en se basant sur un message vocal que lui a transmis sa sœur du Liban. «Comment peut-on stocker pendant autant de temps des produits toxiques au port et le risque qu’ils occasionnent ? Ils n’ont même pas pensé qu’il y a des personnes qui vivent près du port. Je ne comprends pas ce que les Libanais ont dans la tête. Ils n’ont pas pitié. Qu’est-ce qui les empêche de sortir les déchets du port avant l’explosion ? Je ne peux pas comprendre qu’on puisse y stocker des produits toxiques pendant 12 ans», a-t-elle lâché avec étonnement. «Ça fait trop mal. Il fallait voir comment les gens tombaient par terre après l’explosion. J’attends les conclusions de l’enquête. A coup sûr, on va parler de médecin après la mort, mais j’attends l’enquête pour connaître les responsables», renchérit-elle.
Si Leila est impatiente de connaître les causes de cette double explosion afin de situer les responsabilités, Hussein Daher, un homme de 37 ans qui a fait 15 ans à Dakar, a déjà trouvé les responsables : ses gouvernants ! «Le Liban est un pays riche mais mal gouverns. Des ministres volent l’argent du pays sans être inquiétés. Ce sont eux les responsables de cette catastrophe», a-t-il dit. Avant de préciser : «Ce qui s’est passé au Liban me fait vraiment mal parce que le Peuple libanais ne mérite pas ça. Le Liban est un très bon pays. Nous avons 4 saisons. Nous aimons vivre. J’ai même pleuré parce que j’ai des parents là-bas. Nous habitons à 12 km du port. Pourtant nous avons ressenti comme un tremblement avec l’onde de choc. Toutes les vitres sont cassées. Des membres de ma famille ont été blessés.» Hussein Daher sollicite le soutien de la Communauté internationale pour aider le Liban.