La tentative de rallier l’Espagne a tourné au drame avant même le départ de la pirogue. Une descente des Forces de défense et de sécurité sur la plage près de la Gare maritime de Rufisque a été fatale à Mbaya Fall Ngom, mortellement atteint par balle. Par Alioune Badara NDIAYE –
«Il y a d’autres manières de disperser la foule si tant est que l’objectif est de les empêcher de partir vers l’Espagne.» C’est le cri du cœur lancé jeudi par Momar Ngom, habitant de Diokoul, dans une déclaration à la presse. Son cousin Mbaya Fall Ngom, 32 ans, a été en effet mortellement atteint par balle dans la nuit du mercredi au jeudi près du Quai de pêche de Ndéppé, alors qu’il était avec d’autres candidats à l’émigration dans l’attente de l’embarcation qui devait les convoyer. Une descente avec fracas des Forces de défense et de sécurité a fait capoter le projet de voyage périlleux vers l’Espagne. «Nous étions sur la rive en attendant d’embarquer, ils ont surgi et ont ouvert le feu sur la foule. C’était la débandade ; certains ont pris la mer pour s’échapper et d’autres ont escaladé les rochers pour s’enfuir. Ce sont des minutes après qu’on a découvert Mbaya, gisant à terre après avoir pris une balle au niveau de la gorge», a indiqué l’un des candidats retraçant le film de leur mésaventure. «C’étaient des hommes de tenue. Je ne peux dire si ce sont des gendarmes ou des policiers, mais ce qui est certain, c’est que ce sont eux qui disposent d’armes à feu», a-t-il poursuivi, notant que plusieurs de ses camarades dont même des filles, en sont sortis avec des blessures causées par les rochers qu’ils ont escaladés dans leur fuite. «Cette propension des hommes de tenue à tirer facilement sur les populations m’intrigue vraiment et c’est ce qui est constaté lors des manifestations», a brandi Momar Ngom, assurant avoir été informé par son cousin du voyage. «On communique sur tout. J’étais au courant de l’entreprise, car il m’a appelé pour me dire que la pirogue devait partir le soir. J’étais à Mbour», a relevé Ngom ayant été aussi informé de la mort de son cousin à 2 heures du matin. «J’ai rappliqué dare dare après avoir reçu la nouvelle», a-t-il dit non sans appeler à l’ouverture d’une enquête pour édifier sur cette mort qu’il ne s’explique pas. Pêcheur de son état, Mbaya Fall Ngom est marié et père d’un enfant de deux mois. Sa mort brusque plonge son quartier Diokoul Kao dans la tristesse et la consternation, mais plus encore une colère grandissante des populations qui ne comprennent pas la facilité avec laquelle les intervenants ont choisi de tirer sur la foule. Plusieurs arrestations ont aussi été opérées parmi les candidats. Aucune communication officielle pour l’heure sur cet événement malheureux intervenu dans un contexte de résurgence du «barça ou barsakh».
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