Droits des travailleurs migrants : L’Ue invitée à la protection

La présidente du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (Cmw), Dr Fatimata Diallo, a profité de la Consultation des experts des Nations unies pour l’Afrique sur les droits des migrants tenue à Dakar, pour inviter les Etats, surtout ceux membres de l’Union européenne, à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.Par Dialigué FAYE –
«Si un certain nombre d’Etats membres de l’Union européenne ont ratifié les conventions de l’Oit (Organisation internationale du travail : Ndlr) relatives à la migration pour l’emploi et aux travailleurs migrants, aucun de ces Etats n’a signé ou ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille», a relevé la présidente du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (Cmw), pour le regretter. Dr Fatimata Diallo intervenait lors de la Consultation des experts des Nations unies pour l’Afrique sur les droits des migrants tenue à Dakar du 5 au 6 novembre 2024. Pour elle, «la ratification des traités peut avoir un effet transformateur». En effet, «les gouvernements ont utilisé les dispositions des traités et les recommandations des organes de traités pour faire avancer des changements sociétaux complexes qui se heurtent à des résistances au niveau mondial, comme l’adoption d’une législation complète sur la non-discrimination. Il est important que les Etats membres de l’Union européenne envisagent de ratifier cette convention, non seulement parce que l’Ue est une destination importante pour les migrants, mais aussi parce que la ratification par ces Etats enverrait un message fort concernant l’appui apporté à cet instrument fondamental relatif aux droits de l’Homme», plaide Dr Diallo.
Cette convention, rappelle le directeur de Cabinet du secrétaire d’Etat aux Sénégalais de l’extérieur, a été adoptée depuis 1990, afin de protéger les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille. Mais jusqu’à présent, des réticences sont notées auprès de certains partenaires, notamment les pays d’accueil. Face cette situation, recommande Ibrahima Cissé, «il va falloir faire beaucoup de plaidoyers pour les amener à comprendre que la problématique de la protection des migrants et des membres de leur famille doit profiter à tout le monde et que certaines réticences, certaines craintes du migrant envahissant ne devraient pas être une sorte de foulard rouge qu’ils vont soulever pour pouvoir refuser cette ratification. Si nous continuons ce processus de plaidoyer, avec conviction, nous allons parvenir à une plus grande ratification qui donnera beaucoup plus d’impact à cette convention qui est très importante».
Faire des plaidoyers
Dans le même sillage, Robert Kotchani, Représentant régional du Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme en Afrique de l’Ouest, souligne que les Nations unies avaient remarqué qu’il y avait beaucoup d’atteintes aux droits de l’Homme dont étaient victimes les migrants. Elles ont ainsi décidé de mettre en place cette convention dont la ratification est en cours. «Après le Sénégal, c’est la Côte d’Ivoire qui l’a ratifiée dernièrement, dans la sous-région. Nous sommes heureux que cela progresse, afin que les droits des migrants soient protégés», note M. Kotchani.
Toutefois, Fatimata Diallo exprime-t-elle la «vive préoccupation du Cmw face à l’augmentation croissante du nombre des disparitions forcées observées dans le contexte des migrations internationales. Aujourd’hui, nous observons malheureusement des familles endeuillées de façon accrue par la disparition d’êtres chers, d’innombrables cas dans lesquels des migrants avaient disparu alors qu’ils faisaient route vers leur pays de destination ou après leur arrivée. Déclenchées par des mouvements migratoires massifs, les disparitions forcées dans le contexte des migrations sont devenues des violations des droits de l’Homme de plus en plus préoccupantes qui se produisent le long de diverses voies migratoires à travers le monde». Raison pour laquelle appelle-t-elle «tous les Etats signataires, Etats-non parties à la convention et qui ont souscrit au Pacte mondial pour les migrations, y compris les pays de destination, de reconsidérer leurs positions et de ratifier la convention et ce au moins pour deux raisons principales : d’une part cet instrument juridique est le meilleur rempart pour prévenir les vulnérabilités et protéger les migrants contre les abus et la traite des êtres humains, et d’autre part, à quelques exceptions près, il ne crée pas des droits nouveaux autres que ceux qui sont proclamés par les autres traités des droits de l’Homme».
L’objectif de cette consultation continentale est de «présenter aux représentants des États, des parlements, des agences des Nations Unies, de l’Union Africaine, des institutions nationales des droits de l’homme, et des organisations de la société civile deux projets d’observations générales conjointe n° 38/7 et 39/8 sur les politiques publiques globales visant à combattre et à éradiquer la xénophobie et son impact sur les droits des migrants, de leurs familles et des autres non-nationaux (ou perçus comme tels) touchés par la discrimination raciale et tous les motifs de discrimination qui s’y rattachent». Elle vise à «adopter des orientations faisant autorité et destinées à répondre de manière globale à l’un des défis les plus pressants dans un monde où la mobilité humaine est devenue un phénomène structurel et multidimensionnel qui façonne de plus en plus les sociétés et les communautés».
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