«Zic zac» est une chorégraphique interprétée par Hardo Kâ et Coumba Dème. A travers cette danse contemporaine, la parole est donnée au corps pour susciter la réflexion afin d’ouvrir notre regard et nos ressentis vis-à-vis des personnes victimes d’un handicap.
La compagnie Hardo Kâ a voulu donné un message fort poignant à la société vendredi dernier, à l’Institut français de Dakar. Zic zac interroge nos perceptions et préjugés afin d’ouvrir notre regard et nos ressentis vis-à-vis des personnes victimes d’un handicap. A l’image de la littérature et de la musique, la danse a aussi une vocation d’éducation, de conscientisation.
Dans un décor riche en lumières, Hardo et Coumba ont «presté» Zic zac. Une pièce qui a été d’abord jouée à Saint-Louis, au centre culturel Le Châteaux. Coumba et Hardo Pape Salif Kâ abordent le thème du «handicap» visible ou invisible et donnent parole au corps. Cette création chorégraphique zigzague hors des chantiers battus, bouscule les codes esthétiques à la recherche de l’harmonie, des gestes de l’âme. Soulignant leurs fragilités, le handicap n’étant plus une limite, le corps à corps est une acceptation de la différence, un combat et une réflexion pour la dignité humaine.
Qu’est-ce qu’un handicapé ?
Qu’est-ce qui est normal et qu’est-ce qui ne l’est pas dans une société ? Qui est handicapé et qui ne l’est pas ? Est-ce qu’être handicapé, c’est avoir une jambe qui ne marche pas ou des yeux qui ne voient pas, ou bien une bouche qui ne parle pas ? Ce sont ces questions que Hardo s’est posé pour la réalisation de cette chorégraphie. Pour lui, c’est la société qui emprisonne, brise, brime certaines personnes qui sont en situation de handicap. Et M. Kâ parle de handicap visible et de handicap non visible. C’est le deuxième cas qui devrait, selon lui, être considéré comme handicap. «Il y a des gens qui ont toutes les facultés, mais qui commettent des bêtises qui font vraiment d’elles des personnes en situation de handicap, même si ce n’est pas visible», dit-il. Avant de donner une véritable leçon de morale qui a été même démontrée sur scène. Il dit : «Celui qui n’a pas encore traversé la rive ne doit pas se moquer de celui qui se noie.» Sur scène, Hardo qui se moquait de Coumba, une personne à mobilité réduite, peine à se mettre debout lorsqu’il se retrouve avec une jambe ligotée.
«Tout est possible quand on a l’esprit»
Quand Coumba est sur scène, elle dégage une force incroyable, une énergie vive. Et c’est avec des gestes minutieux qu’elle a interprété Zic zac avec Hardo. «Etre une personne à mobilité réduite et danseuse, ce n’est pas facile», avoue-t-elle. N’empêche, considérant la danse contemporaine comme son métier, Coumba s’entraîne durement pour donner du courage aux autres qui se trouvent dans la même situation qu’elle. «Ça permet aux autres handicapés qui sont limités par leurs pensées négatives ou par des préjugés de se ressaisir et de prendre leur destin en main. Etre dans cette situation ne doit pas nous obliger à quémander.»
L’idée de la chorégraphie Zic zac a jailli lorsque les chemins de Coumba et de Hardo Pape Kâ se sont croisés. «En 2010, je donnais un stage à Blaise Senghor. Et Coumba était venue. J’étais vraiment étonné de voir une personne en situation d’invalidité faire un stage parce que souvent ce ne sont que les personnes valides qui le font. Donc, cela a changé toute ma façon de voir. De ce fait, Coumba était presque le centre de ce stage. Et ça nous a permis de découvrir… C’était extraordinaire pour les danseurs d’expérimenter des situations de personnes infirmes», se rappelle M. Kâ.