Économie, sécurité, coopération… : Ben Bourgel sans langue de bois

C’est une tradition, comme presque tous ses prédécesseurs, l’ambassadeur d’Israël à Dakar a pris les «Marches du Quotidien». Dans cet entretien grand format, Ben Bourgel, arrivé à Dakar en août 2021, décortique les relations entre le Sénégal et Israël, et entre Israël et ses voisins. Il dit tout avec parfois une langue de bois ou avec un langage diplomatique.Ce qui frappe quand on suit l’actualité internationale, c’est le bouillonnement du pays à l’heure actuelle avec tout le bruit autour de la réforme constitutionnelle. Nous, de l’extérieur, quand on voit ça, c’est comme si le pouvoir en Israël voulait se donner une certaine impunité par rapport à la Justice, à la magistrature, comment expliquer cela ?
Je vais me départir de la langue de bois tout en ne sortant pas de ma position de diplomate (rires). Ce que je propose, c’est de faire un descriptif analytique de la situation. Israël a pris son indépendance en 1948, avec une démocratie parlementaire qui n’est pas dotée d’une Constitution, et donc l’articulation des différents pouvoirs, l’exécutif, le législatif et le judiciaire, est basée sur la loi, et ces lois se sont ajoutées à la jurisprudence au fil des années. A cette jurisprudence se sont ajoutées des lois fondamentales dont l’interprétation est laissée à la Cour suprême. Pour une partie de l’échiquier politique, cette interprétation devrait être cadrée, pour une autre partie, il ne devrait pas y avoir de changement. Et le gouvernement, qui a été élu fin décembre 2022, a eu comme priorité d’effectuer une réforme qui permettrait de mettre les choses au clair du point de vue du gouvernement, d’établir les droits et obligations du judiciaire, et l’articulation du judiciaire avec les autres pouvoirs. Pour une partie importante de la population qui est représentée par l’opposition, il s’agissait du changement, du statu quo. Ce dont nous avons été témoins, c’est un bouillonnement de deux parties de la population qui se sont concentrées justement sur cette question et qui redoutaient, d’un côté comme de l’autre, un changement des termes de référence, peut-être du contrat social. Pour le gouvernement élu, il s’agissait d’exercer son mandat. C’est dans le programme du gouvernement, et d’exercer et d’effectuer cette réforme. Pour l’opposition et une bonne partie de la population, il s’agissait d’exprimer son mécontentement dans le cadre du droit à la liberté d’expression et de manifester. L’exercice de ces deux droits, qui sont l’apanage des démocraties, crée une situation de tension que nous n’avons pas connue jusqu’à présent. Cette situation de tension est arrivée à un point tel qu’il y a un mois, le Premier ministre a décidé de suspendre les réformes afin de lancer des concertations menées par le chef de l’Etat d’Israël qui n’est pas un Président à fonction exécutive mais solennelle. Parmi ses fonctions solennelles, il y a celle de garder l’équilibre et la cohésion nationale. Et les leaders de l’opposition ont accepté de venir siéger et de discuter justement de la nécessité et du champ de cette réforme. Il ne s’agit en aucun cas de passer à la trappe les différences de principes et les différences idéologiques qui peuvent exister et qu’on trouve dans la plupart des démocraties libérales. L’idée était avant tout d’éviter un délitement et de partir du principe que toute réforme de cette nature qui change les termes du contrat doit se baser sur un consensus large. Ces discussions sont en cours depuis un mois, leur contenu reste discret pour éviter tout déraillement. Aujourd’hui, si vous interrogez les gens, vous verrez qu’il y a une partie qui est pour, une qui est contre, mais l’immense majorité de la population veut que quoi qu’il arrive, que cela se passe dans un consensus large pour garder cette cohésion nationale. Alors oui nous sommes dans l’œil du cyclone, mais au moins, ces termes ont été mis en place.
Mais si le gouvernement cherche un large consensus, pourquoi n’avoir pas proposé un référendum par exemple ?
L’idée est que ces discussions devaient se passer dans le cadre parlementaire. Le gouvernement a reçu il y a 4 mois un mandat du Peuple et comptait l’exercer dans le cadre parlementaire. Aujourd’hui, l’outil qui a été choisi, c’est la discussion hors du cadre parlementaire sous les bons auspices du Président.
Vu le contexte, est-ce qu’il est possible d’avoir un consensus avec un Premier ministre qui n’arrive pas à avoir une majorité stable pour gouverner ?
Ça, c’est l’apanage de tous les gouvernements de coalition, des jeux d’équilibre doivent se faire. Le gouvernement d’Israël est composé de 5 partis, chacun représentant une section de la population dont la base et une base idéologique large. Le dénominateur commun le plus bas, une base solide du point de vue du gouvernement. Le rôle du Premier ministre, qui a nommé un chef de la coalition au sein de la majorité parlementaire, est de faire ces équilibrages et arbitrages pour arriver à garder cette cohésion, c’est un travail de longue haleine qui se fait au quotidien, que ce soit ce gouvernement, le précédent, celui d’avant… Le Premier ministre doit participer à des arbitrages.
Est-ce que vous pouvez comprendre que ce soit un Premier ministre qui traîne beaucoup de casseroles sur le plan judiciaire qui amène une réforme qui concerne la Justice ?
En tant que diplomate, j’ai une obligation de réserve, je ne peux pas présenter mes positions personnelles. Tout ce que je peux vous dire, c’est que moi, je représente un gouvernement démocratique…
Israël se vante d’être le chantre de la démocratie au Moyen-Orient, mais nous on se dit que c’est une démocratie à double vitesse parce que s’il y a des citoyens qui vivent cette démocratie, il y a d’autres en décalage, notamment les populations arabo-israéliennes, les Palestiniens dans les territoires occupés, les populations de Gaza, pratiquement sous embargo à la cubaine… ?
Avec votre permission, je vais commencer par Gaza, parce que l’actualité nous rattrape. Les événements qui se déroulent dans notre région depuis une semaine arrivent à un point culminant. Pendant les grandes fêtes des religions monothéistes, c’est-à-dire le Ramadan, la Pâque juive, celle chrétienne, on a connu une période de tension très intense qui s’est manifestée par des troubles à Jérusalem, des tirs de roquettes à Gaza, des attaques terroristes contre des populations israéliennes et même des tirs de roquettes par le Hamas du Liban. Ce que nous voyons, c’est un cercle de violence qui se déclenche autour de ces tensions. Ces tensions se sont apaisées et elles ont repris la semaine dernière avec le Jihad palestinien, un mouvement radical allié avec l’Iran, qui a tiré sur Israël 104 roquettes, des attaques terroristes depuis le depuis début de l’année. Dans la souffrance on se retrouve tous, il y avait des Juifs, des Arabes, des musulmans et des Palestiniens qui ont été victimes de ces attaques, et les attaques continuaient de grandir, et nos services étaient au fait d’opérations qui devaient avoir lieu dans un avenir proche et qui pouvaient avoir un effet désastreux sur la situation. Et donc on a pris la décision de cibler le Jihad islamique à Gaza. Ce sont 3 cadres militaires du Jihad islamique, des installations militaires et encore aujourd’hui une équipe de lanceurs de roquettes qui a été ciblée dans la Bande de Gaza.
Vous pouvez nous dire pourquoi cette riposte, pourquoi décider de prendre l’initiative en ce moment ?
C’est parce que tout simplement la situation nous l’impose et que la trajectoire que nous voyons, c’est d’un côté une vague de normalisation avec les pays de la région, normalisation qui est formelle avec par exemple le Bahreïn, les Emirats arabes unis, le Maroc, d’autres pays marquent leur intérêt, on voit même dans nos rapports avec les citoyens des pays plus d’ouverture, de volonté de communiquer, donc une trajectoire allant vers la normalisation, et d’un autre côté un axe radical mené par l’Iran qui cherche à imposer son ordre du jour et d’utiliser la violence dans notre région. Et aussi en prônant la violence hors de notre région, comme on peut le voir en Europe avec l’utilisation de drones, des actions terroristes qui sont déjouées dans les 4 coins du monde. Pour ce qui est de Gaza, pour nous la situation est simple, ce que notre gouvernement a fait ces 5 dernières années, ce sont des efforts pour stabiliser économiquement et au niveau sécuritaire, sans jamais transiger sur les impératifs sécuritaires puisque in fine, ce sont nos populations qui sont exposées aux tirs de missiles, aux attaques terroristes, avec toutes les menaces proférées par les extrémistes. Maintenant, pour parler de la situation en Israël et des inégalités, je rappellerai le cadre légal pour les citoyens israéliens. La déclaration d’indépendance détermine l’égalité de droit absolu entre les différents citoyens et au sein de nos services, parmi les opérateurs économiques, on peut rencontrer des individus de toutes les confessions, de toutes les origines. Cela n’empêche pas qu’il y ait des efforts à faire pour permettre une égalité sociale, pour permettre à chacun d’obtenir toutes ses chances. Et ce sont des efforts qui sont faits au niveau gouvernemental dans le cadre du plan pour soutenir les minorités arabophones, que ça soit du point de vue de l’éducation, économique, et c’est ce qui est fait de manière générale dans l’application de la loi. Vis-à-vis des Palestiniens, la situation est d’une complexité déroutante du fait que les progrès ne se font pas, on peut tous le déplorer, au rythme que nous souhaiterions.
En aucun cas, les déroutes, nous ne les souhaitons ni pour les uns ni pour les autres parce que, au final, les premières victimes de cette situation de conflit, ce sont les Palestiniens et les Israéliens.
Il y a beaucoup d’efforts qui sont en train d’être faits, autant par les Israéliens que par les Palestiniens. Est-ce que, aujourd’hui, on peut espérer que cela puisse ouvrir la porte vers cette stabilité ?
Je vais me départir de la langue de bois. Il s’agit d’un conflit intergénérationnel. Il a commencé il y a 100 ans avec des droits présentés légitimement par chacune des deux parties. Et il s’agit d’un conflit qui nécessite pour chaque partie de prendre des décisions qu’elle devra présenter à sa population. Je pense que pour que cela puisse se faire, il faut que la confiance soit regagnée. Mais pour Israël, la principale condition, c’est d’abord de renoncer au terrorisme.
Il faut aussi créer les conditions économiques. Et les gouvernements israéliens de ces dernières années sont allés dans ce sens, sans pour autant négliger les impératifs sécuritaires. Alors, ça se traduit par des autorisations de travail qui sont données aux citoyens ressortissants de l’autorité palestinienne, même de la Bande de Gaza malgré la situation conflictuelle de pouvoir venir y travailler. Ça passe aussi par la création d’emplois, des aides économiques au sein des instances des Nations unies, mais aussi au sein des groupes de donneurs. Donc, notre volonté réelle, c’est d’avoir toute une stabilisation qui puisse faire avancer les choses.
Un autre axe, c’est le cercle de la paix. A savoir si vous voyez dans la carte, Israël, ce sont 22 145 km2 pour 9 millions d’habitants, soit 0, 12% de la population terrestre. Avec des frontières avec des Etats dont certains ont des accords de paix avec Israël, d’autres pour lesquels ce n’est pas le cas. Le sentiment de base anti-Israël a été créé. Et c’est un sentiment de forteresse. C’est pour dire, plus les relations s’approfondiront avec les voisins d’Israël, plus ce sera facile d’envisager pour les deux parties, c’est-à-dire d’un point de vue israélien pour sentir la sécurité, la confiance de pouvoir avancer, et pour les Palestiniens, pour ceux qui souhaitent la paix, d’accepter que d’autres ont été là avant eux. Après, la question sera de voir comment savoir ? Et comment arriver à des termes acceptables pour les 2 parties ?
La formule n’est pas nouvelle. Elle a été établie déjà en 1994. Il s’agit de négociations directes sans préconditions qui permettront aux parties de discuter et d’arriver, on espère, rapidement à une solution qui sera acceptable pour tous, sinon dans notre intérêt à tous.
La création de l’Etat palestinien se pose souvent…
Alors, à ma connaissance, Israël n’a jamais remis en cause les textes qui ont été signés auparavant. Et l’idée est d’arriver à une solution acceptable pour les deux parties par la négociation.
A quelle solution arriveront les deux parties ?
Je dis cadre conventionnel et surtout accord entre deux parties, étant donné qu’au final, les choses doivent se décider avec une prise de responsabilité d’un côté comme de l’autre. Nous avons nos attentes, c’est-à-dire renoncer à la violence, une solution pour la question des réfugiés palestiniens, une question pour les lieux saints. Si les choses étaient déjà préconçues, il n’y aurait pas de raison pour la négociation. Pour arriver à cette solution, il faut que les parties s’asseyent et décident ensemble, discutent de ces questions et de la terminologie qui sera adoptée. Vous me disiez solution des deux Etats, ça peut vouloir dire différentes choses pour différentes personnes. Donc, la question avant de donner le titre, c’est de parler du contenu pour éviter les malentendus et de perpétuer le conflit.
Est-ce qu’il y a des contacts entre les deux parties ?
Les contacts sont permanents. Les contacts sont techniques, c’est-à-dire Israéliens et Palestiniens vivent ensemble. Mais, les pourparlers n’ont de sens que si la confiance existe. Et le but aujourd’hui, il y a un certain nombre de processus qui sont en cours qui regroupent Palestiniens, Israéliens et les pays voisins qui doivent décider et qui aident à la pérennité de la possibilité de retourner à des discussions. Mais chacun doit venir avec une vision très sobre de la façon dont on doit aborder ces questions. Encore je le dis, c’est une situation intergénérationnelle qui n’a pas encore été réglée. Et aujourd’hui, le fait d’avoir les uns et les autres qui s’asseyent et discutent sur le terrain, une coordination qui a eu lieu, ça fera peut-être les conditions pour pouvoir aller loin.
Le problème entre Israël et la Palestine, est-ce que ça ne va pas au-delà ? Vous avez parlé de l’Iran, du Liban. Est-ce que tous ces Etats-là ne doivent pas être impliqués dans le processus ?
Alors, ceux qui le souhaitent le sont aujourd’hui. Le Liban aura un problème à être impliqué dans le processus parce qu’il ne reconnaît pas l’existence de l’Etat d’Israël. Il y a toute une série et pour nous, le but est de pouvoir justement discuter de ces questions, les aborder et d’en parler sans langue de bois si possible. Il y a un certain nombre d’acteurs dans notre région qui refusent de reconnaître l’existence d’Israël.
Cela n’a aucun sens puisque nous sommes là, puisque la frontière existe, puisque parfois les frontières sont délimitées, puisqu’on ne partira pas. Donc, la question principale est de savoir justement comment modifier ce paradigme, à savoir le dogmatisme de refuser l’existence d’Israël, et de pouvoir discuter et prendre acte des faits.
Pour nous, quoi qu’il arrive, on est là. Mais, certains doivent prendre acte de la réalité telle qu’elle est et ne pas espérer l’utilisation de la force pour supprimer un problème. Et ce que l’on voit, c’est justement certains agents de notre région qui pensent encore que c’est par la force qu’ils pourront régler ce qu’ils appellent le problème d’Israël.
Le Premier ministre d’Israël a fait, si on peut le dire, sa devise que l’Iran ne doit pas avoir la bombe atomique. Et l’Iran est en train de s’approcher de cet objectif et de s’ouvrir à d’autres alliés. Est-ce que vous pensez qu’Israël a les moyens de contraindre l’Iran à rester pacifique ?
Le régime iranien, au pouvoir depuis 1979, constitue un danger vital pour l’Etat d’Israël. Un danger qui s’exprime par la rhétorique, mais aussi par les actes. Quand on voit entre 120 et 150 roquettes du Hezbollah d’une distance de 30 km entre la frontière nord d’Israël et le fleuve Lakhish. Les visions expansionnistes de l’Iran sont partagées par tous les acteurs modérés de la région. Et je pense même que sans m’avancer trop que ses rapprochements au sein de la région sont liés aussi à la menace que constitue l’Iran pour les Etats du Moyen-Orient, les Etats du Golfe et même d’Asie centrale et d’Europe. Nous, nous continuerons à appeler à faire front uni et à se préparer tout d’abord diplomatiquement, soit par le biais des pressions, soit de sanctions, mais tout étant parés à toute éventualité. Je pense que les messages resteront assez constants à cet égard et que nous continuerons à partager.
A toute éventualité, qu’est-ce que cela veut dire ?
Je ne me substituerai pas à mon gouvernement pour l’interpréter et Israël se défendra.
La menace d’un conflit entre les deux pays existe ?
La menace d’une déflagration dans notre région existe toujours, c’est pour cela que les efforts sont faits par tous (par le gouvernement, les diplomates) pour arriver justement à la solution souhaitée, à savoir éviter la nucléarisation de l’Iran, éviter cette attitude expansionniste dans notre région et la promotion du terrorisme dans notre région, et en premier par les moyens diplomatiques. C’est notre souhait.
Qu’est-ce que cela vous fait d’être ambassadeur d’Israël dans un pays comme le Sénégal, et comment analysez-vous les relations entre nos deux pays ?
Si vous me le permettez, je ferai une petite digression. Je ne suis pas arrivé à Dakar par hasard. En 2009, en tant que stagiaire au ministère des Affaires étrangères, on m’a envoyé en stage francophone à Dakar, et c’est là que j’ai rencontré Gideon Behar (ancien ambassadeur d’Israël au Sénégal), et après une semaine sur place, je me suis dit qu’il faut que je revienne. A la première occasion, il faut que je revienne parce que ce que j’ai vu, je ne le connais pas. Mon orientation générale est plutôt européenne, je connais les relations entre mon pays et les pays de l’Europe. La nature des relations telles qu’elles existent entre Israël et le Sénégal, et entre Israël et le continent africain de manière générale, était quelque chose de nouveau pour moi. J’ai eu l’occasion de découvrir que ce sont des relations qui ont été créées au moment des indépendances. On s’enorgueillit d’être les premiers à être à Dakar. Ce qu’on voit aujourd’hui et surtout depuis 2017, c’est une volonté du gouvernement israélien de se réengager en Afrique et le Premier ministre de l’époque et même l’actuel avaient lancé une politique intitulée «Israël revient en Afrique et l’Afrique revient en Israël» dont le but est de repartir sur les bases qui avaient été posées dans la coopération dans les domaines de l’agriculture, de l’eau, de l’éducation. Le Sénégal a beaucoup de partenaires et d’amis, et il ne s’agit pas de se substituer à qui que ce soit, ni d’avoir des prétentions déguisées de notre portée régionale, mais plutôt de partager l’expertise qui est acquise chez nous et bénéficier de l’expertise de nos partenaires. Et un exemple, le «goutte-à-goutte», qui est une image de marque d’Israël. 50% du système de goutte-à-goutte dans le monde sont d’Israël. Le fait que nous soyons un petit pays, le fait que nous soyons entourés parfois avec un sentiment de blocus, nous fait donner une valeur particulière à la relation qu’aux résultats et c’est peut-être ce qui nous anime. On peut faire plus car il y a encore un potentiel à exploiter. On peut faire plus pour permettre à des opérateurs économiques d’Israël et du Sénégal d’entretenir des relations. En tout cas, moi, depuis que je suis arrivé, je travaille à agrandir la taille des opérateurs économiques pour la région et pour le Sénégal. J’ai eu à suivre une conversation d’introduction entre une entreprise sénégalaise et une start-up israélienne dans le domaine, en matière de purification de l’eau. Ainsi, c’est à nous de créer le cadre pour permettre aux uns et autres de se rencontrer. Quand les Israéliens et les Sénégalais se rencontrent, en général cela se passe très bien.
Vu la solidité et l’ancienneté des relations entre les deux pays, comment expliquez-vous qu’il n’y ait jamais eu un dirigeant sénégalais qui s’est rendu en Israël et vice-versa ?
Alors, le Président Senghor s’est rendu en Israël avant 1973. Je pense que vous mettez la balle dans mon camp pour nous dire que c’est à nous de veiller à ce que cela arrive (rires).
Mais, vous n’avez pas d’explications ?
L’explication, c’est que justement il faut peut-être permettre à nos dirigeants de se rencontrer, de créer les volumes. Et en général, quand nos dirigeants sont en interaction, ça se passe bien.
Un de vos prédécesseurs à l’ambassade d’Israël, à cet endroit où vous êtes assis, se plaignait que le Sénégal n’ait pas ouvert d’ambassade en Israël. Ça a été corrigé ?
Je m’associerais diplomatiquement au propos de mon prédécesseur en appelant à l’ouverture d’une ambassade sénégalaise en Israël. Ce sera un acte important qui permettra la promotion des relations et l’augmentation du volume des échanges.
Pensez-vous que les bonnes relations que le Sénégal a avec certains pays arabes puissent être un frein à l’amélioration des relations entre votre pays et le Sénégal ?
Je prends au pied de la lettre la doctrine sénégalaise selon laquelle pas d’exclusion pas d’exclusivité. Je vois au contraire les relations que le Sénégal peut avoir avec le monde arabe, l’extension des relations entre Israël et le monde arabe comme des atouts qui peuvent nous permettre de nous rencontrer davantage. Au contraire, je pense que cette nouvelle trajectoire d’extension du cadre de la paix, du cercle de la paix, le renforcement des relations entre Israël et ses voisins ou les pays du monde arabe, du monde musulman en général, sont des éléments qui doivent nous permettre d’approfondir nos relations avec le Sénégal et avec les pays sahéliens de manière générale.
On connaît les domaines de coopération traditionnelle…
Dans l’agriculture, dans la santé, dans l’éducation, dans la formation, partout où on va, on va rencontrer des gens qui ont été en Israël, partout, dans les coins les plus improbables, soit parce qu’ils ont fait partie des voyages en Israël, soit ce sont les domaines dans lesquels on se rencontre. Maintenant dans des domaines comme le sport, même la culture de manière générale, la cuisine… beaucoup doit encore être fait. Lors du dernier au Festival de jazz de Saint-Louis, un des invités de marque était Avichai, un jazziste de renommée mondiale. Kalidou Kassé était en Israël avec une délégation il y a déjà un moment, pour renouveler des actions de cette nature. On voit aussi de grandes figures de la culture sénégalaise, comme Youssou Ndour, qui sont connues en Israël et très appréciées. Donc il y a un espace encore pour plus de coopération.
Est-ce que dans le domaine de la coopération, il y a un volet sécuritaire ?
Nous sommes ouverts à des coopérations dans le domaine sécuritaire. Il y a une expertise israélienne qui a été acquise à la dure dans la stabilisation, dans la lutte contre le terrorisme. Avec tous nos partenaires dans la région, nous serons ouverts à avoir des relations sécuritaires. Si ces relations ont lieu, je pense qu’elles sont gardées secrètes.
L’ambassade connaît ou ne connaît pas ?
Je pense que si elles ont lieu, elles sont gardées secrètes.