Alors que la colère était contenue, les jeunes de Ranérou commencent à exprimer à haute voix leur mal-être. Face à la paupérisation du département, ils demandent aux autorités de doter Ranérou, dont la plupart des villages ne sont pas électrifiés, d’un plan d’urgence de développement.

Au zénith, le soleil est accablant à Ranérou, plongée dans une ambiance de fête. En ce samedi ensoleillé, la population du Ferlo est sortie en masse pour accueillir le Président Sall, qui a passé 8 jours dans les régions de Saint-Louis et aussi Matam. Entre inaugurations et poses de première pierre, le chef de l’Etat veut procéder à la transformation de ces zones. A Ranérou, qui a étrenné un Daara moderne, les urgences sont nombreuses, même si le projet Pré-Ferlo d’un coût de plusieurs milliards F Cfa va participer à changer le visage de ce département.
Figées dans l’attente, les populations ploient sous le poids des urgences. Et elles commencent à l’exprimer de façon bruyante : Depuis quelques jours, il y a une montée des revendications et la naissance de mouvements de contestation des jeunes qui aspirent à de meilleures conditions de vie. Au début du mois de juin, les populations de la commune de Vélingara-Ferlo ont marché pour réclamer le bitumage de leur route, l’affectation d’un infirmier-chef de poste et l’électrification de la zone. «Nos revendications sont très simples : Nous demandons la communalisation, le désenclavement et l’électrification de Younouféré», campe Ibrahima Diallo, porte-parole des jeunes de ce village, situé dans la commune de Houdallaye. Son réquisitoire est sans appel : «Nous achetons un sachet de glace à 400 F. Vous vous rendez compte. C’est comme si nous n’étions pas des Sénégalais.»

Seules deux villes électrifiées
La piste latéritique qui relie la localité à la Rn3, située seulement à 3 km, est un calvaire pour les populations en période hivernale. Le bitumage de cette route est une vieille doléance, mais les choses ne bougent pas, au grand dam des habitants de cette localité. Passablement agacé par la situation, il enchaîne : «En période d’hivernage, un marigot se forme sur le chemin, empêchant l’acheminement des nourritures. Nous sommes obligés d’aller jusqu’à Ranérou ou à Houdallaye pour acheter du riz ou de l’huile. Macky Sall n’a rien fait pour nous depuis qu’il est à la tête du pays. En 10 ans à la tête du pays, il n’a pas posé une seule pierre pour changer le visage de nos localités. Le collège et le dispensaire ont été réalisés par le Président Wade. Notre député (Ndlr : Aliou Dembourou Sow) offre des moutons aux ministres et au président de la République. Alors que nous n’avons même pas d’ambulance.» Il en veut à la classe politique locale, notamment les élus du département qui «ne font rien pour changer la situation». «La politique du ventre est terminée. Les jeunes ne vont plus accepter d’être achetés avec du riz ou de l’huile, ou quelques billets. Ça va changer pour que Ranérou devienne un département doté d’infrastructures. Il n’y a que Ranérou et Loumboul qui sont électrifiées dans tout le département. La politique, ce n’est pas une religion. Nous allons combattre les élus qui ne font rien pour changer les conditions de vie des populations», rappelle Ibrahima Diallo. Malgré les «pressions», les jeunes de Younouféré vont continuer à «manifester» pour pousser le gouvernement à mettre en place un «plan d’urgence de développement» de Ranérou. «Nous allons continuer à nous battre. Nous attendions le Président Sall sur la Rn3 pour lui faire part de nos revendications, mais on nous a envoyé des gendarmes et un camion de nervis pour nous mater. Cela ne nous empêchera pas de poursuivre notre combat», prévient M. Diallo.