Chaque année, environ 700 mille décès dans le monde sont liés à la Résistance aux antimicrobiens (Ram). En 2050, ces décès seront de 10 millions de personnes dont les 4,1 millions sur le continent africain. La Ram est ainsi au centre d’un atelier qui se tient à Dakar depuis hier sous l’égide de la Fao.

Chaque année, environ 700 mille décès dans le monde sont liés à la Résistance aux antimicrobiens (Ram). L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (Fao) projette une mortalité de 10 millions de personnes en 2050 dont les 4,1 millions sur le continent africain. La Résistance aux antimicrobiens (Ram) est ainsi devenue un enjeu de santé publique et depuis octobre 2017, le Sénégal bénéficie, dans le cadre du soutien au Programme de sécurité sanitaire mondiale (Ghsa) dans la lutte contre les zoonoses et le renforcement de la santé animale en Afrique, de l’appui de la Fao et de l’Usaid pour la mise en place d’un système de surveillance/suivi intégré et adapté dans le domaine de l’utilisation d’agents antimicrobiens et de la résistance aux antimicrobiens. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’atelier de formation et de sensibilisation des vétérinaires praticiens et des para-vétérinaires sur la Ram qui s’est ouvert hier à Dakar. «Depuis quelques années, les microbes résistent de plus en plus aux molécules utilisées pour lutter contre eux. Ce qui pose un problème de santé publique, parce que les médicaments qui étaient efficaces auparavant ne le sont plus et que la panoplie de médicaments dont nous disposons n’est pas si large», alerte Dr Abdoulaye Soum­boundou de l’Ordre des médecins vétérinaires du Sénégal (Odvs). Selon le conseiller technique du ministre de l’Elevage et des productions animales, Dr Khadim Guèye, l’utilisation des antibiotiques est en nette progression au Sénégal avec 14 mille 547 kg en 2017 contre 11 mille 435 kg en 2015. Cette utilisation pose problème dans la mesure où des limites techniques se posent aux quelques 400 vétérinaires que compte le pays, constate Dr Soumboundou. «Tout traitement antibiotique doit être précédé d’un antibiogramme, mais on se rend compte qu’il n’y a pas assez de laboratoires sur le territoire», explique-t-il. Du coup, «pour un praticien exerçant à Kédougou, le temps d’acheminer les résultats, il est obligé d’utiliser un antibiotique. Dans ce cas, on a un traitement kamikaze parce que soit ça marche, soit ça ne marche pas, mais la résistance se développe».
Autre obstacle détecté par les praticiens, c’est la mauvaise utilisation des antibiotiques. «La règlementation est très claire. Aussi bien pour la santé animale que pour la santé humaine, les antibiotiques ne peuvent être prescrits que par un prescripteur autorisé», indique le président de l’Inter-ordre, Dr Mouhamadou Sow. «Ces prescripteurs sont le médecin ou le vétérinaire, le dentiste et peut-être, pour une liste limitative, la sage-femme», ajoute-t-il, en faisant état des risques encourus par les patients. «Le premier risque, c’est la mauvaise prescription. Il y a des dosages sur les médicaments et si les posologies ne sont pas adaptées par rapport au patient, cela peut générer des résistances», alerte Dr Sow.

Règlementer l’exercice
Plus grave, dit-il, c’est l’utilisation des antibiotiques par les guérisseurs traditionnels. «Nous avons constaté que les guérisseurs traditionnels diluent ces médicaments dans les potions qu’ils administrent aussi bien aux hommes qu’aux animaux. C’est très grave, d’autant plus que le malade ne sait pas qu’il prend des antibiotiques», souligne Dr Sow qui en appelle à une discussion sérieuse autour du projet de loi sur la pratique de la médecine traditionnelle. «Nous acceptons qu’il y ait une réglementation, mais le contenu actuel du texte présenté à l’Assemblée nationale doit être révisé. Nous demandons que ce texte nous soit remis pour qu’on créée un cadre de concertation avec l’Inter-ordre, l’Etat et les autres partenaires pour qu’on puisse définir un texte adapté», dit-il.
L’atelier qui est destiné aux professionnels du secteur va permettre, explique M. Reda Lebtahi, représentant de la Fao, «de doter les participants des compétences nécessaires pour jouer pleinement leurs rôles dans la lutte contre cette menace».
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