La restructuration de la Senelec n’est pas perçue comme opportune par les travailleurs. Il faut se concentrer sur l’approvisionnement domestique en carburant plutôt que diviser la Senelec en filiales, afin de libéraliser le marché de l’énergie. Ils ont ainsi proposé des pistes de réflexion pour améliorer l’efficacité de la Senelec. 

Par Malick GAYE – La baisse des prix de l’électricité pour la tranche sociale ne va pas, pour longtemps, maintenir la Senelec dans un climat social apaisé. Pour cause, la restructuration de l’entreprise ne semble pas enchanter les travailleurs. «Il est envisagé la fin de l’exclusivité qui plaçait la Senelec en position de monopole sur toute la chaîne production-transport-distribution et vente d’électricité au Sénégal.» C’est la lecture faite par Al Hassane Ba du projet de restructuration de la Senelec consacré par la loi 2021-31 sur le Code de l’électricité au Sénégal. Le Secrétaire général du Syndicat unique et démocratique des travailleurs de l’énergie (Sudeten) demeure convaincu que ce projet est une «privatisation» qui ne dit pas son nom. Samedi passé, au deuxième Congrès ordinaire du Sudeten, M. Ba a affirmé que «cette situation, en prélude à une privatisation qui ne dit pas son nom, nous interpelle tous. De sombres perspectives se dressent devant nous au regard des conséquences néfastes des privatisations sauvages opérées ailleurs, sur les avantages des travailleurs, la stabilité du secteur et le coût social élevé que peuvent engendrer ces réformes entreprises sans dialogue ni concertations. Pour le moment, nous n’avons aucune visibilité sur le contenu, l’agenda et les implications socio-économiques de ces réformes pour les travailleurs et la clientèle».

Pour Al Hassane Ba, la réforme devra se faire en prenant en compte «l’intérêt des travailleurs, la priorisation de leur sécurité ainsi que de leur bien-être, la viabilité de l’emploi, l’intégrité d’une Senelec au service du Peuple et pour le Peuple». Toutefois, a-t-il souligné, le Sudeten est disponible, ouvert à un dialogue sincère et fécond sur ces projets de réforme. Qui devront nécessairement permettre à la Senelec de «reprendre toutes les activités confiées aux prestataires avec un renforcement du personnel, avec le bouclage du réseau interconnecté et la situation des travailleurs des centrales régionales et secondaires qui demeure préoccupante ; convoquer une réunion plénière pour partager les conclusions des journées de réflexions stratégiques de la production avec les travailleurs et proposer les solutions idoines pour sauvegarder la production de la Senelec».

Dans la même dynamique, la présidente d’honneur a affirmé que les Assises des travailleurs ont été organisées au mois de mars dernier. Les conclusions recommandent de les «considérer comme une industrie», par conséquent, les autorités doivent être lucides devant «un pilier pour le développement économique et social de notre pays. Les autorités doivent y regarder de plus près avant toute décision de libéralisation». Il a été souligné qu’en dehors «du financement, le problème majeur était les coûts du combustible. Avec l’arrivée du gaz et du pétrole, ce problème de cherté du coût de l’énergie sera dépassé dans un proche avenir ; il faut s’orienter vers des financements innovants tels que les partenariats public-privé, etc., qui sont en cours partout dans le monde pour pallier la rareté des financements concessionnels».

Selon Aby Dieng, sur le plan structurel, il a été démontré à travers des études de la Banque mondiale, grâce à l’apport de notre cher expert Abdoulaye Sène, que les modèles de privatisation ont été partout des échecs et n’ont pas eu les effets escomptés. Par conséquent, «une révision du Code de l’électricité s’impose, notamment des articles 5, 6, 11, 16 sur le rôle des institutionnels, particulièrement les prérogatives données au ministère de l’Energie, du pétrole et des mines, prérogatives qui sont des fonctions d’exploitation que seule une société organisée peut assumer, notamment concernant l’établissement du plan d’investissement triennal et la passation des marchés. Le ministère étant une administration et non une industrie».

Pour rappel, dans le cadre de la mise en œuvre du second compact du Millenium challenge account (Mca) Sénégal, il était prévu de dégrouper les activités de la Société nationale d’électricité en l’organisant en trois filiales : filiale production, filiale transport et filiale distribution et vente. Un premier pas a été franchi, disait-on, notamment la séparation comptable des activités de la Senelec.
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