Le Saes ne veut pas être tenu pour responsable des perturbations qui guettent les universités. En conférence de presse hier, les syndicalistes ont dénoncé les engagements non tenus par le gouvernement et aussi les fermetures intempestives des universités au gré du calendrier électoral.Par Dieynaba KANE –

L’année universitaire ne risque pas de démarrer sous de bons auspices.

En plus des problèmes notés pour l’ouverture des universités, le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (Saes) fait remarquer les lenteurs dans le respect du protocole d’accords signé avec le gouvernement. En conférence de presse hier, le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur est revenu dans les détails sur les différents points qui n’ont pas été respectés par le gouvernement. Concernant la revalorisation des salaires, le Secrétaire général du Saes fait savoir que le gouvernement avait accepté «la revalorisation des enseignants-chercheurs et chercheurs en deux temps (janvier 2023 et janvier 2024)». David Célestin Faye, Sg du Saes, note que «l’échéance de 2023 a été respectée», mais il y a eu des «problèmes de versement par le ministre des Finances et du budget», des montants «correspondant à l’augmentation».

Conséquence, informe le Saes, il y a des «retards dans le paiement des salaires et des sommes dues», le «non-reversement des cessions sur salaires et des retenues sur salaires pour la retraite, l’impossibilité pour les enseignants-chercheurs d’effectuer leurs missions de recherche, etc.».

Les enseignants du supérieur rappellent que le gouvernement s’était engagé «à rétablir immédiatement les veuves et veufs des enseignants-chercheurs et chercheurs dans leurs droits en effectuant le calcul de la pension de réversion, conformément aux textes en vigueur». Ils constatent, pour le déplorer, que le «décret modifiant et complétant le décret n°2020-1788 du 23 septembre 2020, créant une allocation spéciale de retraite au profit des enseignants et chercheurs titulaires des universités, a été modifié avec le ministère des Finances, mais n’est pas encore signé».

Concernant l’évaluation des réformes (système Lmd, orientation des bacheliers, etc.), les notes du Saes sur les engagements du gouvernement ne sont pas bonnes. «La Commission d’évaluation des réformes n’a pas jamais été convoquée, l’atelier d’évaluation du Lmd a été convoqué ce jeudi 12 octobre 2023, puis reporté à une date ultérieure, aucun acte concret en vue de l’évaluation de la Cnaes», renseigne le syndicat.

Il en est de même, selon toujours le Secrétaire général du Saes et ses camarades, de «certains blocs scientifiques et/ou pédagogiques entamés depuis 2015 dans les universités qui n’ont toujours pas été livrés, encore moins équipés, le projet des «100 laboratoires» est totalement bloqué malgré la cérémonie de remise d’une partie du matériel toujours pas réceptionné par les universités». Pis, d’après les syndicalistes, «aucun chronogramme précis pour la finition des infrastructures pédagogiques et sociales malgré l’afflux massif de bacheliers». A les en croire, «les seuls chantiers pour lesquels le Saes a constaté un avancement satisfaisant, sont ceux gérés par la Présidence». Ceux gérés par le Mesri, regrette le Saes, «peinent à avancer depuis 2015».

Aucun chronogramme précis pour la finition des infrastructures
Quid du recrutement conséquent d’enseignants-chercheurs afin d’atteindre un taux de 70% de permanents ? M. David Célestin Faye déclare : «Le gouvernement n’a ouvert que deux cent dix (210) postes de Per en 2015 et deux cents (200) postes en 2019, sans l’accompagnement nécessaire budgétaire pour les derniers postes.» Dressant le tableau de la situation actuelle, le Saes informe qu’il y a «2400 Per permanents, 6600 vacataires pour plus de 170 000 étudiants». A l’échelle nationale, souligne le syndicat, «les vacataires représentent 73% des Per, dans certaines universités comme l’Université du Sine-Saloum El Hadji Ibrahima Niasse (Ussein), cette répartition est de 7% de permanents et 93% de vacataires». Et les membres du Saes d’ajouter : «Les prévisions montrent que les candidats au Baccalauréat sont supposés augmenter au même rythme que les dernières années (12% par an) et le taux de réussite se maintenir à 43%. Le nombre d’enseignants rapporté au nombre d’étudiants indique, sans les vacataires, un taux d’encadrement 1/71. La norme de l’Unesco est de 1/20 pour le taux d’encadrement.»

Sur la question de l’audit du foncier, le Saes rappelle que le gouvernement avait décidé de veiller «à ce que les recteurs effectuent l’audit et la sécurisation du patrimoine foncier de toutes les universités publiques».

Pour le cas de l’Esea, le Saes souligne que les autorités avaient promis qu’un «acte annulant l’affectation d’une partie de l’assiette foncière de l’Esea à un promoteur privé sera pris dans les meilleurs délais».

D’après les syndicalistes, «l’audit n’a pas été effectué et l’acte annulant l’affectation d’une partie de l’assiette foncière de l’Esea à un promoteur privé n’a pas été pris». Dans la même veine, dénoncent-ils, «les enseignants sont toujours harcelés par les prédateurs fonciers».

Et de préciser : «Le Saes peine à avoir les documents administratifs sur ses terrains à Dakar et à Thiès.» «Tous les efforts consentis pour un retour à un calendrier académique normal anéantis», ajoute le Sg du Saes. Les griefs des enseignants du supérieur concernent aussi le calendrier académique. Pour David Célestin Faye et ses camarades, «tous les efforts consentis par les enseignants-chercheurs pour un retour à un calendrier académique normal ont été anéantis par les fermetures intempestives et continues des universités publiques au gré du calendrier électoral». Soulignant qu’un «seul semestre a été effectué dans les universités pour l’année universitaire 2022-2023, alors que les nouveaux frappent déjà aux portes des universités», les membres de cette organisation syndicale affichent leur préoccupation concernant «la survie des universités». Et de fustiger : «Même en Ukraine où il y a la guerre, les universités ne sont pas fermées.»

Le Saes exige ainsi «la réouverture immédiate de toutes les universités, sans quoi il ne pourra en aucun cas être tenu responsable des menaces sur la validité de l’année académique». Analysant la situation, le Saes estime que «l’enseignement à distance pour un effectif de plus de 150 000 étudiants des universités publiques ne s’improvise pas». D’ailleurs, il informe qu’à l’Ucad, «les enseignants sont prêts pour la reprise et l’essentiel des facultés sont à même de reprendre». En outre, les syndicalistes ont tenu à préciser que leur organisation «n’est pas un syndicat va-t-en-guerre», car en 38 années d’existence, le Saes n’a déposé que huit préavis de grève. «Le dernier mot d’ordre de 48h date du 30 novembre 2021», rappelle le Secrétaire général du Saes. Il a réitéré sa «ferme volonté d’assurer à l’enseignement supérieur une stabilité durable pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés».
dkane@lequotidien.sn