S’il admet que Moustapha Cissé Lô est «coutumier des faits», le secrétaire national adjoint à la Formation et à l’idéologie du Pds constate que l’Apr n’en faisait pas cas lorsqu’il s’attaquait aux opposants. Magatte Sy, qui est par ailleurs secrétaire national adjoint chargé des Elections, estime que l’on doit connaître la date des élections locales.
Que vous inspirent les révélations de Cissé Lô et ses insultes contre certains responsables de l’Apr ?
C’est un bonhomme qui est coutumier des faits. D’abord, dans la forme, je condamne fermement ces insultes, venant surtout d’un vice-président de l’Assemblée nationale, de quelqu’un qui a été président du Parlement de la Cedeao. Mais dans le fond, il a fait des révélations très graves. Et un député cité a reconnu avoir reçu un certain tonnage de semences et promet de dire ce que Cissé Lô a reçu. C’est un aveu. On apprend aujourd’hui qu’il a été exclu de son parti parce qu’il a attaqué certains de ses camarades. Alors tant qu’il insultait Karim Wade et tous les autres opposants, l’Apr considérait qu’il était un bon pote. Qu’est-ce que cela aurait été si c’étaient des gens de l’opposition ? Mais où est le procureur de la République ? La vérité est que ce régime ne sait faire que générer et promouvoir des voyous de la République.
Etes-vous d’accord avec le Président Sall que nous devons «vivre avec le virus» ?
Nous avions cru entendre le Président Sall dire «Vivre en présence du virus». Vingt-quatre heures après le Président Macron qui demandait aux Français de «vivre désormais avec le virus». Certains esprits taquins avaient vite fait de dire que la formule de notre Président n’était que la version tropicalisée de celle du chef français. Quoi qu’il en soit, l’un mis dans l’autre, avons-nous vraiment le choix ? Face à un ennemi invisible, sournois, agressif et aux effets dévastateurs, nous devons être résolument déterminés. Contre ce virus, il n’y a encore ni vaccin ni traitement efficace reconnu. Nous ne devons pas avoir peur, même si nous devons craindre d’être infectés. Nous devons continuer de vivre dignement en allant travailler, à nous épanouir, même si les habitudes doivent changer. Nous devons nous adapter au contexte. Tant de relâchement, tant de négligence, tant de laisser-aller nous confortent dans ce que nous pensons et disons à chaque occasion. Nous souffrons d’un déficit criard de citoyenneté.
On n’entend plus votre parti, le Pds, sur les décisions prises par le chef de l’Etat depuis les fameuses concertations…
Au lendemain de l’annonce de l’Etat d’urgence, lorsque le Président rencontrait l’opposition, notre parti s’était exprimé, notamment sur la situation d’urgence et les mesures d’accompagnement. Un message fort du Président Abdoulaye Wade avait été transmis au Président Sall par Tafsir Thioye, notre porte-parole qui, dans sa communication publique, avait exprimé la solidarité de notre parti et de son secrétaire général national avec le Peuple sénégalais, en ces temps de guerre contre le Covid-19. Lorsqu’il s’est agi de la saisine de l’Assemblée nationale par le Président Sall pour une loi d’habilitation, le Pds s’est fait entendre à suffisance. Le député Serigne Cheikh Mbacké Bara Doli, président de notre groupe, a porté officiellement notre parole en disant éloquemment et solennellement au Président Sall : «Oui, mais.» Au sein du comité de suivi de la mise en œuvre des opérations du Force Covid-19, notre frère Toussaint Manga et notre sœur Adja Gnagna Touré y disent tout ce qui doit l’être au nom du parti, même s’ils y sont aussi respectivement au nom de l’opposition parlementaire et de l’opposition en général. Dans d’autres domaines, les cadres du parti s’expriment régulièrement et suffisamment à travers les médias traditionnels et les réseaux sociaux. A l’occasion de chaque événement, heureux ou malheureux, le Président Wade s’exprime en son nom propre et en celui du parti. Idem pour notre frère et candidat Karim. C’est cela la vie d’un parti en période de guerre sanitaire et de semi-confinement. Évidemment, nos amis d’en face et leurs nouveaux alliés auraient bien voulu nous entendre nous exprimer bruyamment sur chaque vol de moustique, afin d’en profiter pour faire un ramdam et détourner les attentions sur les errements qui caractérisent leur gestion de la crise du Covid-19.
Les Commissions de dialogue (national et politique) doivent-elles reprendre leurs travaux pour éviter un énième report des Locales ?
Ce dialogue national est un leurre et un ensemble d’artifices mis en place par le Président Sall. En plus de mener en bateau toute la Nation, l’objectif principal est de faire valider son plan pour briguer un troisième mandat. Quant à la Commission dite politique, dont le début des travaux est antérieur à l’ouverture du «Dialogue tapalé», l’appellation qui lui sied le mieux est «Commission technique de révision du Code électoral». Elle s’inscrit désormais dans la tradition de nos soubresauts démocratiques. Avec la disparition de l’Etat d’urgence et contraints que nous sommes de vivre en présence du virus, il va bien falloir faire boucler les travaux de cette commission en sifflant la fin de la récréation. D’une manière ou d’une autre, bien que le Pds ne participe point à ces travaux, nous sommes en droit de savoir le traitement réel réservé au fichier électoral et surtout connaître la date des élections locales. Le ministre de l’Intérieur avait lié l’annonce de la date précise de la tenue des élections aux conclusions des travaux de cette commission et s’était avancé seulement sur une période, avant mars 2021, s’inscrivant ainsi dans la tradition de gestion électoraliste de ce régime : Le flou-obscur. Une élection, c’est un calendrier, des dates précises et des opérations bien définies. C’est pourquoi le respect du calendrier républicain est un indice démocratique. Si le Président se décidait à organiser les élections au plus tard en mars 2021, la date la plus lointaine dans cette option serait celle du dimanche 28 mars 2021. Dans ce cas, le collège des électeurs devrait être convoqué par décret au plus tard le vendredi 8 janvier 2021. Les déclarations de candidatures devraient être publiées au plus tard le lundi 18 janvier 2021. D’ici là, les listes électorales devraient être révisées et publiées selon des délais précis, en plus d’une période contentieuse avant la phase de distribution des cartes. Au rythme où traîne l’émergence, avec les nouveaux vocables qui nous sont servis, telle que la récession, vous nous en voyez fort sceptiques. De là à venir demain nous annoncer qu’il n’y a pas d’argent, que le Sénégal ne peut pas s’offrir le luxe d’organiser deux élections de suite en l’espace d’un an, le pas est vite franchi.