Entretien – Mariama Signaté, invitée du Cnoss à «Dakar en Jeux» : «Je vois qu’il y a beaucoup d’envie, beaucoup d’engagement pour ces Joj»
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Malgré la fin tardive, mardi soir, du lancement de la 2e édition de «Dakar en Jeux» au Monument de la Renaissance, où elle faisait partie des invités du Cnoss, Mariama Signaté a été ponctuelle le lendemain au rendez-vous pris avec Le Quotidien. Elle était même en avance sur l’heure prévue. Une disponibilité remarquable pour cette sportive de renommée, spécialiste en communication, ancienne internationale de handball, double vice-championne du monde avec la France, en séjour au Sénégal sur invitation du président Diagna Ndiaye. Dans cet entretien, la Franco-Sénégalaise, native de Dakar, parle des «Joj 2026», de son souhait pour la jeunesse et de la «petite balle» qui l’a révélée.Quelles sont les raisons de votre séjour à Dakar ?
D’abord, le Sénégal, c’est mon pays d’origine, je suis née ici. J’ai encore de la famille ici. Et après, c’est un plaisir de revenir à Dakar. J’ai eu la chance de rencontrer le président Diagna Ndiaye. On a pu échanger et je lui ai souligné mon envie de travailler avec le Sénégal, avec mon pays d’origine, d’apporter mon expertise sur différents aspects, pour pouvoir aider le sport sénégalais à se hisser au plus haut niveau.
Actualité oblige. Vous êtes là à l’occasion du lancement de la 2e édition de «Dakar en Jeux», qui a eu lieu mardi au Monument de la Renaissance…
Ah oui ! J’ai beaucoup aimé. C’était un très bon moment pour nous, avec un beau spectacle en sons et rythmes. C’est une manière de célébrer le sport à l’africaine, à la sénégalaise. C’était aussi le moment de rencontrer du monde, de voir l’équipe du Cnoss en action, comprendre le fonctionnement ici, de célébrer le sport olympique. Moi, j’ai eu la chance de faire deux fois les Jeux Olympiques, en 2008 et 2012, Pékin et Londres. Donc, c’était le bon moment de venir communier avec le Peuple sénégalais et commencer à réfléchir comment je pourrais apporter ma pierre à l’édifice pour faire de «Dakar en Jeux» un évènement encore plus extraordinaire, même si je sais que les équipes en face font un travail déjà remarquable. Je me dis qu’on n’est jamais de trop pour pouvoir donner la meilleure image possible du Sénégal à travers le monde.
Surtout que ce sera une première fois que l’Afrique, à travers le Sénégal, accueille un événement olympique mondial…
Exactement, c’est la première fois qu’un événement de ce type a lieu au Sénégal. Donc, on a un devoir envers tout le Peuple africain, de montrer qu’on a des compétences. On veut être exemplaire dans l’organisation des évènements sportifs.
Vous aviez aussi à vos côtés des autorités et personnalités sportives marquantes…
En effet, déjà c’était très bien parce qu’il y avait pas mal de personnes qui ont été mobilisées. Il y avait, entre autres, le maire de Dakar, son homologue de Ouakam, le parrain de cette 2e édition, Paul Tergat, le champion du monde kenyan. Donc, on sent que tout le monde se mobilise pour faire de cet événement un moment de communion. J’ai vu des gens très engagés hier. Je pense qu’on va attendre beaucoup de monde sur les différents ateliers sportifs. Donc, après, moi, je viens voir mon Peuple et puis, par la suite, l’objectif, c’est de profiter de mon expérience. Parce que j’ai une longue expérience sportive. J’ai fait tout le parcours de performance en France, où je suis arrivée à l’âge de 5 ans. J’ai fait les détections des moins de dix ans. Enfin, toutes les étapes de l’Equipe de France. J’ai joué en Espoir, Sport-études, le fonctionnement des clubs professionnels. C’est aussi ça que j’aimerais apporter à la jeunesse africaine.
Avec le lancement mardi de la 2e édition «Dakar en Jeux», on sent que ça vibre en direction des Joj de 2026…
Effectivement, on voit que le président du Cojo, Diagna Ndiaye, et son coordonnateur, Ibrahima Wade, sont très impliqués. Autour d’eux, ils ont une équipe qui est très ouverte. Je vois qu’il y a beaucoup de ressources, beaucoup d’envie, beaucoup d’engagement en direction des Joj. C’est vrai, on est à trois ans, mais ça donne envie de rejoindre l’aventure parce que ça se structure, il y a une vraie volonté de rejoindre un bon niveau de performance.
Avant les Joj, il y a un événement intermédiaire, les Jo Paris 2024, comment ça se passe sur place ?
C’est vrai, les Jo 2024, c’est particulier. Maintenant, quand on est dans une grosse capitale comme Paris, l’organisation, c’est toujours le petit point d’interrogation. Parce qu’en termes d’hébergement, c’est l’effervescence. Mais après avoir visité le Village olympique, avec de superbes conditions d’hébergement, il y a des raisons d’espérer pour une bonne réussite de l’évènement. Après, ce sera une dernière ligne droite vers les Joj, où on devrait prendre le flambeau pour des Jeux réussis.
Parlons de la discipline qui vous a révélée, le handball. Vous avez définitivement tourné la page ?
J’ai en effet pris ma retraite en 2019. J’ai joué au plus haut niveau, un peu partout, en France, Danemark, Hongrie… J’ai eu environ 150 sélections avec l’Equipe de France, j’ai été double vice-championne du monde en 2009 et 2011, et meilleure joueuse à mon poste. Pour moi, c’est une page accomplie de ma vie.
Je m’intéresse toujours à cette discipline, d’ailleurs je suis consultante comme ancienne joueuse à la télévision. Mais aujourd’hui, mon focus, c’est un peu plus sur l’avenir du handball sénégalais. Il y a ici beaucoup de ressources à exploiter. Après, il faut savoir les mettre dans les meilleures conditions. J’ai un peu de contact au niveau du Sénégal et on va essayer de voir ce qu’il est possible de faire, avec l’entregent du président du Cnoss, M. Diagna Ndiaye. Maintenant, il faut garder en tête qu’on arrive devant un système qui est en place. Et toutes les personnes qui rejoignent ce système doivent être là pour apporter une plus-value, pour pouvoir s’intégrer. C’est une démarche progressive par rapport à ça. Il faut réussir à construire un cadre qui se rapproche du haut niveau, des meilleures équipes. Je vais faire profiter mon expérience pour avoir eu la chance de jouer au plus haut niveau. Mais un cadre, ce sont des investissements, c’est un engagement, autant au niveau des fédérations que de l’Etat, pour faire en sorte que quand les joueurs et les joueuses arrivent, qu’ils fassent focus sur la compétition et que l’objectif soit une moisson de médailles, et non pas des contraintes qui les perturbent.
A part le handball, vous vous intéressez aussi au e-sport ?
Effectivement, j’ai un de mes meilleurs amis qui est un fan du e-sport. On a eu l’idée ensemble de construire un club. C’est une activité qui monte. Surtout au temps du Covid, où les gens étaient obligés, à un moment donné, de rester à la maison. Ce qui a poussé à jouer un peu plus. On s’est dit qu’il faut développer l’activité. Ça génère énormément de revenus à travers le monde. Mais on n’est pas égaux en termes de moyens, de visibilité. Donc nous, notre objectif, c’est de créer un club au Sud de la France, à Toulon, et aussi profiter du e-sport pour rassembler le maximum de gens possible. Parce que c’est un moyen de télécommunication au niveau de la technologie. On aimerait après s’expatrier en Afrique. Parce que quand on construit un projet solide et qu’on arrive à créer un business-modèle, il faut l’importer un peu partout. Surtout dans des endroits où on a besoin de booster l’activité locale.
Justement, au Sénégal, un nouveau Comité national de promotion du e-sport a été mis sur pied. Vous envisagez de les contacter ?
Ah oui ! D’une manière générale, j’ai envie de travailler avec le Sénégal. J’ai envie de travailler avec le Sénégal au maximum, de construire ensemble. Je suis disponible à travers le président Diagna Ndiaye. Je suis prête à saisir les opportunités où je peux mettre en avant mes compétences, surtout en matière de communication, partager mon expérience. La féminisation du sport aussi m’intéresse beaucoup, parce qu’on n’est pas tous égaux en termes d’accès au sport. On est des produits africains, même si on a évolué ailleurs. Si on est partis, c’est pour chercher un meilleur futur, parce qu’il y a plus de ressources. Mais derrière, il faut qu’on réussisse à construire localement pour que nos jeunes n’aient pas besoin eux-aussi de partir. Et aussi qu’on puisse regarder tous les autres pays droit dans les yeux. Il y a aussi cette hiérarchie mondiale qui s’est installée et qui n’est forcément pas logique quand on regarde toutes nos ressources, autant humaines que matérielles sur le continent.
Si vous avez un message pour la jeunesse, quelle serait sa teneur ?
Ce que je voudrais dire à la jeunesse sénégalaise, africaine, c’est d’être dans cette dynamique de partage, de transmission. Leur dire qu’on est vraiment capables de tout et qu’il faut que chacun apporte son soutien à l’autre. Qu’on soit dans cette dynamique de partage, de transmission pour pouvoir faire grandir la Nation, à travers nos forces. C’est une roue éternelle où quand on met de l’énergie, on est capables de faire de plus en plus de choses. Je peux être un liant sur ça, transmettre ce que j’ai vécu après ma carrière sportive, à travers le partage d’expérience. J’en parlais avec Amadou Dia Ba, c’est important de transmettre l’expérience, pas seulement transmettre notre histoire, mais savoir transmettre notre compétence.
Recueillis par Hyacinthe DIANDY / hdiandy@lequotidien.sn