Depuis quelques décennies, la Journée internationale de la femme est institutionnalisée par les Nations unies. A l’image de toute journée commémorative, celle-ci est une occasion privilégiée, au-delà de la simple célébration, d’interroger la situation des droits des femmes. Au Sénégal, la célébration se fait sous plusieurs formes. Mais elle se transforme de plus en plus en un moment d’interpellation, de solidarité et de communion – – comme c’est d’ailleurs le cas dans la plupart des pays du monde.
«Penser équitablement, bâtir intelligemment, innover pour le changement» est le thème retenu cette année par la communauté internationale. Bien qu’intéressante et actuelle, cette thématique mérite d’être réorientée dans une perspective de tropicalisation. C’est dans en ce sens que notre réflexion est intitulée «Equité et Innovation pour changer le statut de la femme sénégalaise».
Cette contribution est une participation au débat national sur les droits des femmes de façon générale et sur la condition féminine de façon spécifique. En s’interrogeant sur l’équité et l’innovation pour changer le statut de la femme sénégalaise, nous cherchons à analyser la plus-value de l’innovation et l’équité dans la réalisation des droits des femmes sénégalaises. . Il s’agit de montrer quelles sont les innovations à apporter dans la mise en œuvre des droits des femmes pour améliorer leurs conditions d’existence ?. Une telle interrogation repose la question du statut juridique et social de la femme ou encore des conditions de vie des femmes.
L’équité occupe une place de choix dans la littérature sur le genre. Elle est souvent assimilée à l’égalité alors qu’elle s’impose comme un complément essentiel de l’égalité. L’équité vise à satisfaire les besoins spécifiques de chaque catégorie de personnes. Elle cherche à restaurer l’équilibre en prenant en compte les particularités. Quant à l’innovation, elle s’est imposée comme un challenge dans plusieurs secteurs de la vie. Elle est considérée comme un changement, une nouveauté dans une perspective de faire la différence. Prises sous cet angle, l’équité et l’innovation peuvent être des valeurs ajoutées dans la mise en œuvre des droits des femmes.

Quelle place pour l’équité dans la réalisation des droits droits ?
L’équité dans la réalisation des droits des femmes est un défi au Sénégal, puisque les femmes ne sont pas un groupe homogène et ont des besoins différents. Si certaines d’entre elles veulent accéder à la formation et à l’emploi, d’autres plus instruites et diplômées aspirent à des hauts postes par voie élective ou de nomination. Celles qui s’activent dans les affaires réclament plus de places dans les marchés, alors que celles qui sont dans l’entreprenariat veulent accéder aux ressources.
Mais que dire des femmes rurales sénégalaises dans leur écrasante majorité majorité ? La corvée d’eau, l’obscurité, la recherche de bois mort, l’éloignement des structures de santé, la l’indisponibilité d’un personnel de santé qualifié, sans oublier l’accès à la terre et aux intrants, demeurent entre autres les difficultés qui jalonnent leur quotidien.
Pour dire que chaque catégorie de femmes a ses besoins spécifiques, ; d’où l’intérêt de placer l’équité au cœur des actions en faveur des droits des femmes.

Quelles sont les innovations à apporter pour l’accès aux droits ?
Au regard de la situation des droits des femmes, des innovations s’imposent pour l’effectivité leur effectivitédes droits des femmes.
La plus grande innovation consiste à intégrer les besoins specifiques spécifiques des femmes dans les politiques publiques relatives aux secteurs clés de notre économie, qui prennent en compte les préoccupations des femmes. La Stratégie nationale d’équité et d’égalité de genres (Sneeg), cadre de référence, est un acquis, mais son opérationnalisation reste encore un défi, ; d’où la nécessité de disposer de ressources financières suffisantes à partir du budget consolidé d’investissement pour valoriser les acquis et combler les gaps. Malheureusement, les programmes et politiques en faveur des femmes et des filles sont généralement impulsés et soutenus, non pas par l’Etat, mais par des partenaires. Il faut impérativement changer de paradigme et faire en sorte que les ressources ne soient pas seulement assujetties aux financements des partenaires techniques et financiers, qui n’ont pas forcément les mêmes préoccupations que nos Etats. Dès lors, il faut trouver des sources alternatives et innovantes de financement en mettant en contribution le secteur privé dans sa diversité.
Il faut de l’Innovation l’innovation dans l’accès aux ressources, notamment l’accès aux crédits, avec l’octroi de crédits conséquents et «dignes». Mais on constate que, malgré les efforts consentis par les décideurs, l’accès aux ressources financières est un grand problème pour les femmes. Les mécanismes utilisés pour donner les financements sont souvent partisans et parfois dévalorisants. Ces fonds sont généralement octroyés lors de manifestations grandioses où des centaines de femmes sont mobilisées pour applaudir un «leader» (souvent homme) pour ne recevoir que de «maigres montants» qui créent plus de problèmes qu’ils n’en règlent. Il faut plus d’équité et de «cœur» pour renforcer les droits économiques des femmes à travers le financement des activités génératrices de revenus et l’entreprenariat féminin. Les femmes réclament des financements honorables et la jouissance des ressources qui doivent être réparties de façon équitable.
Il faut de l’innovation dans le renforcement du leadership des femmes en leur ouvrant la voie aux postes de responsabilités, pour celles qui en ont les compétences. Le pays regorge de femmes compétentes dans plusieurs domaines, qui peuvent faire la différence. Mais faudrait-il qu’on leur accorde une place méritée dans les instances de décision à travers un encadrement et la mise en œuvre de mesures incitatives leur permettant d’allier vie sociale et vie professionnelle, au grand bénéfice de la société.
Il faut de l’innovation dans le renforcement du leadership des femmes en leur permettant aux méritantes (compétentes) d’accéder à des postes de responsabilités. Le pays regorge de femmes expérimentées dans plusieurs domaines, qui peuvent faire la différence. Mais faudrait-il qu’on leur accorde une place méritée dans les instances de décision à travers un encadrement et la mise en œuvre de mesures incitatives leur permettant d’allier vie sociale et vie professionnelle au grand bénéfice de la société.
Des innovations sont possibles. Une réelle volonté politique des décideurs, l’ingéniosité des femmes leaders, des experts et expertes, la perspicacité des activistes et défenseurs des droits des femmes en sont des débuts de réponses.
De la prochaine ministre de la Femme dans le gouvernement à venir, nous attendons plus d’innovations tout en observant le principe de l’équité, mais aussi des mesures capables de hisser les femmes sénégalaises à des sommets jamais atteints en termes de promotion.
A toutes les femmes et aux hommes épris de justice qui les soutiennent au quotidien, nous souhaitons une bonne célébration.
Dr Zeinab Kane BODIAN
Juriste Enseignante chercheure 
Université Alioune Diop de Bambey
kanezenab@yahoo.fr