Le décès en détention de François Mancabou a été précédé de propos et de pratiques politiques et répressifs criminels de plus en plus ethnicisés visant nos frères et sœurs de la Casamance. Ce constat objectif est étayé par des témoignages des arrêtés lors de la résistance de mars 2021 auxquels des policiers demandaient leurs origines casamançaises ou non avant de les libérer ou de les garder. Des agressions verbales publiques et insultes ethnicistes sont devenues courantes de la part de hautes autorités gouvernementales, de députés de la majorité présidentielle et de voyous stipendiés se réclamant ouvertement du pouvoir de Macky/Apr/Bby. Les protestations pacifiques du Peuple contre l’autoritarisme liberticide du pouvoir libéral néocolonial sont amalgamées avec la «rébellion casamançaise» prétexte à l’utilisation de nervis et des Forces de l’ordre et de sécurité pour les mâter illégalement et faire diversion en les judiciarisant. Des tirs à balles réelles contre des manifestants pacifiques viennent se surajouter à la sale guerre de Macky/Apr/Bby en Casamance. Les faits sont nombreux.
Le néocolonialisme est l’association de la bourgeoisie bureaucratique civile et/ou militaire, de la féodalité, bref des classes exploiteuses locales à l’oppression nationale impérialiste sur le pays colonisé. L’accaparement du pouvoir d’Etat néocolonial par ces classes autochtones locales est le principal moyen par lequel celles-ci accumulent par le vol des deniers publics le capital d’Etat pour le privatiser dans leur rôle de sous-traitants associés aux grands monopoles impérialistes de l’agrobusiness, des services, industriels et bancaires.
La bourgeoisie d’Etat néocoloniale est ainsi un appendice local au service de la domination impérialiste qui a capitulé sur la souveraineté nationale pour se mettre au service du maître impérialiste en lieu et place de sa mainmise sur l’économie nationale à son profit en tant que classe sociale. Au Mali avec la «transition» actuelle, on assiste à un début d’inversion de cette tendance servile qui caractérise le «pré-carré» françafricain depuis 1960 à l’exception de la Guinée de Sékou Touré, du Mali de Modibo Keïta, du Togo de Sylvanus Olympio, du Burkina de Thomas Sankara, de la Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo.
Ici au Sénégal, Macky/Apr/Bby, ces prédateurs des richesses nationales pour le seul bénéfice des Multinationales impérialistes, de leur famille et leur clan s’embourgeoisent en milliards et jouent sur la peur de «perdre le grenier du Sénégal qu’est la Casamance» pour diviser et régner sur et contre le Peuple dans sa totalité. Le Président parjure, s’approprie l’argent du pays alors que la Constitution dit que seul le Peuple est propriétaire des richesses nationales.
La question Casamançaise est ethniquement instrumentalisée par Macky/Apr/Bby pour masquer et faire diversion sur son funeste projet anticonstitutionnel de troisième candidature illégale. Au «tout sauf Macky» du Peuple, la voyoucratie de l’Apr/Bby met en branle l’ethnofascisme du «tout sauf Sonko» pour juguler et diviser la montée en puissance du patriotisme d’une jeunesse qui en a marre d’être condamnée à alimenter les cimetières à ciel ouvert que sont le désert du Sahara, la Méditerranée, l’Atlantique, la Libye post-Khadafi et Ceuta ou Melilla, ces possessions coloniales espagnoles du Maroc.
1982-2022, cela fait 40 ans que le Mfdc a repris sa revendication indépendantiste à laquelle la seule réponse de notre Etat néocolonial a été une succession de guerres et d’accalmies relatives faites de «ni paix ni guerres» sans véritables négociations, mais ponctuées de flots d’argent pour corrompre, soudoyer et diviser. 40 ans aussi de silence global des forces démocratiques, panafricaines de notre pays alors que les principaux leaders et militants du Mfdc continuent de subir des arrestations, la torture, la prison arbitraire à l’instar du journaliste René Capain et des mandats d’arrêt.
Il faut lever tous les mandats d’arrêt et cesser toute persécution arbitraire contre le Mfdc. L’option fraternelle réaliste est et doit être un règlement démocratique pacifique de la question Casamançaise sur la base du principe énoncé dans les années 30 par Tiémokho Garang Kouyaté : l’union libre des peuples libres dans une optique d’unité panafricaine des peuples. Une telle politique progressiste permet d’envisager comme étape vers l’unité africaine, un processus d’union démocratique pacifique avec la Gambie et la Guinée-Bissau puis Conakry et de retrouver la défunte Fédération du Mali avant de l’élargir à la Cedeao.
Et voilà qu’apparaît sur la scène politique nationale, Sonko leader du parti Pastef, de la coalition Yewwi et de l’opposition, originaire de la Casamance par son père et du Nord du Sénégal par sa mère. Depuis 2014, naissance de son parti, l’hégémonie culturelle du libéralisme néocolonial apatride qui a emporté les directions des partis et la majorité des leaders de la gauche historique est en cours d’être battue par le nouvel «arôme culturel hégémonique» (Gramsci) salutaire du patriotisme. Sonko symbolise le patriotisme panafricain de cette jeunesse en quête d’une gouvernance débarrassée de la corruption, respectueuse de l’Etat de droit et du patriotisme économique au service du Peuple.
Au lieu d’un combat politique loyal qui respecte l’Etat de droit, on assiste à un banditisme politique d’un régime néocolonial aux abois tenté par l’ethnofascisme pour se pérenniser au pouvoir en infraction totale avec la Constitution afin de poursuivre le pillage des richesses et l’enrichissement illicite d’une caste bourgeoise, féodale et clanique.
Dans un tel contexte, il est fondamental que les bouches des non Casamançais s’ouvrent pour condamner avec la dernière énergie, ces dérives ethnicistes fascisantes jusqu’ici inconnues au Sénégal. Le silence s’apparente objectivement à une complicité non assumée que le pays va payer tôt ou tard.
Partout en Afrique à l’instar de l’ethnicisme ivoiritaire de Bédié ou de l’ethnofascisme du Hutu Power au Rwanda, le mouvement démocratique s’est laissé museler par la peur de l’autre au point de subir la catastrophe d’une guerre civile ethnicisée exploitée par des «élites» bourgeoisies toujours inféodées à l’impérialisme. C’est seulement ensuite que les uns et les autres subissent à leur tour la terreur tyrannique de la dictature dont l’autre nationalité a été victime alors qu’ils étaient vautrés dans une passivité que le Pasteur Niemöller dénonçait ainsi : «Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ ai rien dit, je n’étais pas communiste. Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit, je n’étais pas social-démocrate. Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste. Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester.»
Il est encore temps de dire stop ! Alors parlons, levons-nous vent debout pour sauver notre beau pays du fléau ethniciste hérité du système colonial qui l’a toujours utilisé pour diviser et soumettre l’Afrique.
DIAGNE Fodé Roland
rolandfode@gmail.com