Evaluation du pèlerinage par les voyagistes privés : Un Hajj pas de tout repos
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A en croire l’évaluation des voyagistes privés, le dernier pèlerinage a été une addition d’épreuves qui les a poussés à publiquement dénoncer la gestion du Hajj et du délégué général considéré comme «un dictateur».
Le séjour des voyagistes privés sénégalais à la Mecque lors du dernier pèlerinage n’était pas de tout repos. Ils ont rencontré d’énormes difficultés, notamment sur le plan de la restauration. «Le pèlerinage s’est bien passé malgré quelques couacs enregistrés au niveau de la restauration à Mina», avoue colonel Moustapha Diongue, président du Regroupement national des organisateurs privés du Hajj et de la Umra au Sénégal (Renophus), lors de leur assemblée d’évaluation. Une responsabilité qu’il impute aux traiteurs. «En fait, j’ai voulu dégager la responsabilité des privés et de la délégation parce que les engagements qui avaient été pris n’ont pas été entièrement respectés par les traiteurs», dit-il. Il précise : «Nous avons intégralement payé ce que nous devions aux traiteurs, mais ils n’ont pas respecté leurs engagements à Mina.» Pourtant, les voyagistes privés avaient fait des recommandations pour conjuguer au passé ces difficultés qu’ils ont rencontrées à Mina. Dans ce cadre, ils avaient envoyé une mission en Arabie Saoudite pour essayer d’éviter d’éventuels couacs. «Au cours de cette mission, nous avons rencontré les traiteurs saoudiens. Et ces mêmes traiteurs sont venus au Sénégal pour nous proposer leur produit. Au cours de la rencontre avec la Délégation générale du pèlerinage (Dgp), l’un des traiteurs nous a dit qu’il ne pouvait pas pratiquer des prix inférieurs à 300 rials pour les 5 jours à Mina. Le deuxième traiteur était d’accord pour 251 rials. Effectivement, la délégation a accepté le prix de 251 rials.» Ce n’est pas tout : «Comme on n’avait qu’un seul traiteur, il fallait chercher 2 autres. La délégation a pris contact avec les 2 autres dont l’un a été désigné par la délégation elle-même. Le deuxième traiteur était dans la sous-région pour faire une tournée. A l’occasion de celle-ci, nous l’avons contacté et amené au niveau de la délégation générale du pèlerinage qui a signé un contrat avec lui. Donc, tous les traiteurs ont signé un contrat avec la délégation. Cela va de 250 à 251 rials», explique colonel Diongue.
«Le délégué général est un dictateur»
Ce discours assez diplomatique de l’officier est différent de la tonalité des confessions de certains voyagistes qui ont toujours du mal à oublier certains impairs. Gora Seck a crevé l’abcès pour essayer de situer les responsabilités. Il dit : «Il y a réellement des problèmes. La restauration a des problèmes. On n’arrivait même pas à boire. On nous a parachutés une délégation qui ne nous accorde aucun respect, qui prend des décisions de manière unilatérale, nous les impose et nous fait comprendre que c’est le Premier ministre qui lui a donné des instructions et nous devons les exécuter ou bien elle va prendre des décisions. Elle nous impose sa façon de faire. On n’est d’accord sur rien du tout. C’est comme si elle parlait à des enfants.» Il regrette que les privés ne soient pas associés aux discussions sur l’élaboration du cahier de charges. «Si on ne mêle aucun privé aux négociations, donc il y a problème. Moi je parle en mon nom, pas pour le Renophus. On n’est pas des bambins, on est des responsables. On est venu jouer notre partition et on est des contribuables sénégalais.» Le patron de Sabrou Voyage a du mal à s’accommoder de cette «dictature» dans la gestion du pèlerinage. «Même le Premier ministre à qui je donne le plus grand respect ne doit pas nous imposer sa façon de faire. Il doit nous faire participer à ces cahiers de charges, à ces listes. Mais il ne doit pas prendre d’une manière unilatérale des décisions pour nous les imposer en nous disant qu’il y a des sanctions qui nous attendent. On ne participe pas à la discussion sur la réduction du billet d’avion, on ne négocie pas avec la compagnie. C’est la délégation qui négocie avec la compagnie et vient nous imposer ces décisions», tempête-t-il.
Quid de la gestion du délégué général, absent de leur réunion d’évaluation ? «C’est parce qu’il ne nous respecte pas et il nous divise. Il nous a fractionnés pour avoir une force. Il a cherché ses gars en bas qui le représentent ici et qui lui rendent compte. Il leur a promis monts et merveilles. On a un problème d’éthique, le délégué est un dictateur. Il vient nous imposer sa politique, ce n’est pas normal. Nous sommes majoritaires. Il doit jouer un rôle de régulateur et non nous imposer sa politique», dit-il.
Aujourd’hui, la privatisation du pèlerinage se précise comme le confirme l’augmentation de leur quota qui a atteint cette année 2000 pèlerins. «Est-ce que c’est une privatisation ? Ils veulent le beurre et l’argent du beurre. On ne peut rien faire, on a les mains liées. On est devant un gouvernement dictateur qui nous guide et qui prend ses décisions d’une manière unilatérale partout et à tous les niveaux», insiste M. Seck.
justin@lequotidien.sn