Dans le site du Daaka de Médina Gounass, les pèlerins partagent, à peu près, les mêmes conditions de séjour, s’adonnant presque aux mêmes activités de dévotion pendant 10 jours. Des pèlerins dévoilent leur agenda journalier.Par Abdoulaye KAMARA – 

Dimanche 27 avril, 1er jour du Daaka de Médina Gounass. Les pèlerins continuent de débarquer en ces lieux, à 10 km des habitations de la cité religieuse. Les commerces sont installés tout autour de l’espace-mosquée grand de plus de 2 ha de surface. Des allées commerçantes divisent en 2 les habitations des pèlerins ou Daaka, qui constituent des dortoirs mais aussi des lieux de dévotion. Tout le long des artères sont installés des étals pour vendre boissons diverses, sachets de glace, nattes, chapelets, bonnets, vêtements, tissus ou éventails.

A 100 m au nord de l’espace-mosquée, des pèlerins dissertent à haute voix. Chapelets et Coran à la main. Ils n’ont pas totalement fini de s’installer. Leur base-vie est délimité par des briques hautes de 30 à 40 cm, tout au plus. Des piquets en bois hauts de 4 à 5 m retiennent une toiture en tôles. C’est ici que près de 400 musulmans, ressortissants tous de 5 villages de la zone de Nguidjilogne, à l’extrême-Nord du Sénégal, vont séjourner jusqu’au 2 mai prochain, coïncidant avec la fin de la retraite spirituelle. Il s’agit des villages de Aly Woury, Ndodou, Soma, Mbagane et Nguidjilogne. Tous passent leurs journées sur des nattes à même le sol. Chacun ayant sa valise ou ses vêtements comme oreiller. «Ici, toutes les conditions sociales sont égalisées.» A dit, d’emblée, Abou Amadou Sall, natif du village de Aly Woury, qui, en plus de ses activités de dévotion, est venu avec un lot de pagaies à vendre. Il poursuit : «Dans ce Daaka, se retrouvent de hauts fonctionnaires à la retraite, des gens en activité de la diaspora, des pêcheurs, des guides religieux, de riches commerçants. Nous passons tous la nuit à même le sol, consommons les mêmes mets et sommes soumis aux mêmes dures conditions d’existence. Personne ne s’en plaint. Tous les ans, le nombre de pèlerins augmente.» Puis de dévoiler l’agenda au quotidien de chaque pèlerin : «Après la prière du petit matin, chaque pèlerin doit s’obstiner à observer les recommandations du khalife, notamment réciter 12 000 fois la Salaatoul Fatihi, en plus d’autres invocations, participer aux 5 prières journalières en commun et lire le Coran. Vous voyez que l’on n’a du temps que pour la recherche de la Face de Dieu au Daaka. Et cela nous porte chance. En tout cas, l’an passé, j’ai passé tout mon Daaka à prier pour que ma fille qui candidate au Baccalauréat réussisse. Elle a réussi d’office, et c’était son premier essai. Les souhaits dans ce Daaka sont exaucés.» Pour se rendre au Daaka, la bande à Abou Amadou Sall a payé une participation de 20 000 francs chacun pour le transport aller-retour, a donné une contribution de 5000 francs pour les repas, en plus d’avoir apporté 2 kg de riz et 2 kg de couscous. Les pèlerins des 5 villages (tous des hommes) préparent à tour de rôle les repas.

«Les prières et souhaits formulés dans ce Daaka sont tous exaucés.» C’est la conviction de l’imam-enseignant, directeur de l’école maternelle Salifou Baldé de la commune de Vélingara, Amadou Diouldé Bâ. Rencontré sur les allées piétonnes du Daaka, l’enseignant dit ne rater aucune retraite spirituelle depuis des années. Il explique : «Le Daaka m’a permis de faire de bonnes connaissances ici et de raffermir ma foi. Ici, les vœux formulés sont exaucés. Je puis l’attester.» C’est aussi la conviction de Tidiane Moussa Bâ, natif de Médina Gounass, qui déclare : «Chaque pèlerin a une préoccupation particulière en venant au Daaka. Certains prient pour trouver un emploi, d’autres pour effectuer un voyage, d’autres parce qu’ils ont maille à partir avec la Justice ou encore parce qu’ils ont des soucis de santé. Chaque prière formulée avec foi et ferveur trouve un début de réponse positive. C’est sûr. Croyez-vous que c’est le fait du hasard que malgré les dures conditions d’existence, les incendies mortels, la chaleur, l’éloignement, les privations diverses, le nombre de participants augmente après chaque Daaka ? Les prières sont acceptées et les souhaits exaucés.» A laissé entendre, avec force conviction, ce quadragénaire de pèlerin.
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