La société civile réclame l’adoption d’un nouveau Code de l’environnement pour minimiser l’impact de l’exploitation des ressources gazières et pétrolières au Sénégal sur la pêche. Ce Code devrait prendre en charge cet impact sur les activités agricoles qui nourrissent les Sénégalais.

Dans la perspective de l’exploitation des ressources gazières et pétrolières, le Sénégal a adopté un nouveau Code pétrolier en 2019 et gazier en janvier 2020. Cependant, le gouvernement n’a pas encore mis à jour le Code de l’environnement. Pourtant, ce texte fondamentalement attendu permettra de poser les contraintes environnementales fortes aux activités extractives. L’offshore sénégalais consacré pour l’essentiel jusqu’ici à la pêche, la mise à jour de ce Code a été plaidé hier par les acteurs de la société civile à travers un panel sur le thème «Répartition des ressources publiques, contenu local et gestion des impacts environnementaux dans les exploitations gazières et pétrolières».
D’ores et déjà, l’on signale l’inquiétude des communautés qui seront impactées par l’exploitation prochaine du gaz dans la région de Saint-Louis. «Les pêcheurs, qui sont les communautés directement impactées, sont extrêmement inquiets par rapport à l’exploitation offshore à Saint-Louis», a rapporté Papa Fara Diallo, coordonnateur régional de l’antenne Publiez ce que vous payez (Pcqvp) à Saint-Louis.
D’après une étude d’impact environnemental et social réalisée par la Direction de l’environnement et des établissements classés (Deec) et soumise à la Commission néerlandaise d’évaluation environnementale pour un avis, l’activité de pêche qui est toute une chaîne risque d’être durablement impactée par l’exploitation du gaz. La Com­mission néerlandaise avait recommandé à l’Etat du Sénégal, selon le coordonnateur adjoint de l’antenne régional Pcqvp, de n’autoriser le projet tant que certains manquements majeurs notés dans l’étude d’impact n’étaient pas corrigés. Parmi ceux-ci, l’absence d’analyse approfondie de l’écosystème marin pour mesurer l’impact par rapport à la faune marine. Cependant, «avant que la Commission néerlandaise ne donne son avis, le gouvernement du Sénégal a pris la décision d’accorder le quitus environnemental, d’onc d’autoriser l’exploitation du gaz offshore», regrette Papa Fara Diallo. A l’en croire, depuis la phase de prospection avec les fouilles sismiques, les lumières, le bruit qu’il y a en pleine mer, les poissons ont commencé à émigrer et se font rare. «Une étude récente de l’Inspection départementale de la pêche a montré qu’il y a eu des baisses dans les prises journalières. Les communautés de pêcheurs affirment que leurs débarquements journaliers ont drastiquement baissé», rapporte l’enseignant-chercheur en science politique à l’Université Gaston Berger.

Aucune forme de compensation pour les pêcheurs
La pêche génère plus de 200 milliards de francs Cfa pour l’Etat du Sénégal et emploie directement ou indirectement plus de 600 mille personnes, alors que le gaz va concerner environ 20 ou 30 mille personnes. «Comment faire pour que l’impact ne soit pas trop négatif et que la découverte du gaz et du pétrole ne délaisse pas les activités agricoles qui sont génératrices d’emplois, mais également de revenus», se demande Cheikhou Oumar Ba, directeur exécutif d’l’Initiative prospective agricole et rurale (Ipar), un think tank ouest africain. «Com­ment peut-on sacrifier une activité qu’on fait depuis plus de trois siècles et qu’on fera probablement si on le gère bien pendant très longtemps encore, au profit d’une ressource tarissable, non renouvelable», renchérit Papa Fara Diallo.
Il a par ailleurs regretté l’absence d’une quelconque forme de compensation pour les communautés impactées dans la loi sur la répartition des revenus. «Il n’y a pas de mesure de mitigation prévue pour juguler le manque à gagner en termes de production journalière et de compensation», dénonce M. Diallo.