Dans le cadre de son programme pour la saison artistique 2021, la compagnie du Théâtre national Daniel Sorano, en partenariat avec le Théâtre noir de Paris, accueille l’exposition consacrée à Paul Robeson, chanteur, acteur, sportif et artiste. L’exposition dresse le portrait de la première «star» noire de l’époque des industries culturelles qui a tenté, tout au long de sa vie, de lier pratique artistique et engagement politique.Par Ousmane SOW
– Paul Robeson a marqué l’histoire politique et artistique du monde anglo-saxon et de l’Europe des années 1930 aux années 1960. Dénonciation de la ségrégation raciale, de la colonisation et du fascisme, soutien aux mouvements ouvriers : son combat politique a été total, sans dissociation entre lutte sociale, anti-fasciste et anti-colonialiste. Il revendiqua ainsi une identité multiple et cosmopolite, en perpétuelle interaction avec le monde et anticipa en cela sur le «Tout-monde». C’est à cet homme que le Théâtre national Daniel Sorano consacre une exposition dénommée Harlem renaissance. Le vernissage s’est déroulé mercredi dernier en présence des autorités. Selon le ministre de la Culture et de la communication, Abdoulaye Diop, «cette cérémonie de vernissage aurait dû en vérité prendre une plus grande ampleur et battre le rappel d’un nombre impressionnant de femmes et d’hommes de culture de notre pays et du reste du monde». Il ajoute que «cette exposition qui marque le début d’une série d’activités du festival célébrant cette année le 100ème anniversaire du mouvement Harlem renaissance, intitulé ‘’Paul Robeson (1898-1976) : Un homme de tout monde’’, met en lumière l’affirmation de l’identité noire dans l’œuvre de l’artiste éponyme, une des figures se rattachant au génie et au talent illustratif de Harlem renaissance». Il a souligné par ailleurs que n’eussent été les restrictions imposées par la pandémie de Covid-19, en acceptant de nouer un partenariat naturel avec le Théâtre noir de Paris pour l’organisation Festival Hommage à Harlem renaissance, «le Théâtre national Daniel Sorano aurait conféré à cet évènement tout l’éclat mémorable qu’il a mérité».
L’exposition, organisée dans le cadre des 100 ans de ce mouvement de renouveau culturel, intellectuel et urbain de Noirs américains nés à Harlem, est le fruit d’une collaboration entre le Théâtre Sorano, le ministère de la Culture, le Théâtre noir de Paris, le Musée du Quai Branly et l’ambassade des Etats-Unis. «On ne le rappellera jamais assez, en créant notre compagnie, désormais entrée dans la légende, la jeune République du Sénégal posait l’un des jalons fondateurs de sa volonté de manifester à la face du monde la richesse multi séculaire de son patrimoine culturel et artistique», a dit M. Diop. Le ministre Abdoulaye Diop a affirmé que Benjamin Jules Rosette, fondateur du Théâtre noir de Paris, n’a jamais cessé de lui rappeler que Harlem renaissance est «l’affirmation altière et flamboyante de l’immortalité de l’âme et de leurs ancêtres par les descendants d’esclaves noirs». «C’est par une immersion sublime dans toutes les expressions artistiques que la création noire a illuminée le monde», se réjouit-il.
Paul Robeson : un modèle pour la jeunesse
Benjamin Jules Rosette, directeur du Théâtre noir de Paris, souligne que Paul Robeson fut une personnalité africaine-américaine célèbre à la fois pour sa carrière internationale de chanteur baryton, d’acteur de théâtre et de cinéma, pour ses liens avec les avant-gardes, et pour son engagement politique. «Simplement, j’ai voulu que cette exposition soit ici au Sénégal parce que, depuis plus de 40 ans, j’écris sur le théâtre noir et j’ai fait connaître pas mal de grands auteurs d’Afrique francophone, des Caraïbes et de la diaspora», déclare-t-il. Lancé par des descendants d’esclaves, victimes encore de discriminations raciales, le Mouvement Harlem renaissance a pris de l’ampleur entre les deux guerres, entre 1918 et 1937, avant de conquérir Paris. «J’ai fait ce travail de longue haleine et j’ai pris un temps de réflexion. Maintenant, je navigue vers d’autres territoires francophones. Et c’est la raison pour laquelle j’ai voulu rendre un hommage à Harlem renaissance qui est le plus grand mouvement culturel des Etats-Unis, mais aussi montrer à tout le monde ce que les Noirs ont fait à cette époque», explique M. Rosette. «J’ai voulu, en voyant l’itinéraire de cet homme, Paul Robeson, que cette jeunesse africaine en général et sénégalaise en particulier découvre ce personnage. C’est une légende, ce travail qu’il a fait tout au long de sa vie. Et j’ai l’impression quelque part aussi que je pourrais être son fils spirituel», affirme M. Rosette. Outre cette exposition, le Festival Hommage à Harlem renaissance comprendra «des représentations théâtrales intra-muros et dans des établissements scolaires, des spectacles de musique et de danse», informe le ministre de la Culture.
Stagiaire