Après son installation à la présidence de la République, Son Excellence Diomaye décida de démissionner de ses responsabilités politiques pour, avait-il dit, être au-dessus de la mêlée. Un acte qui fut salué par la classe politique et une bonne partie de l’opinion nationale et internationale.

Malgré ses deux coups fourrés, à savoir la réponse du Conseil constitutionnel cachée aux acteurs politiques pour donner de l’avance à son parti et le reniement de sa parole concernant la Dpg pour couvrir le Premier ministre, son président de parti, les gens continuaient à croire qu’il allait se ressaisir pour respecter sa décision.

Les félicitations adressées au parti Pastef après les Législatives lors d’un Conseil des ministres, sans aucune mention de la participation des autres partis, ramèneront des doutes quant à sa volonté de rester équidistant des acteurs politiques.

Cette fois-ci, face à la presse, tous ces doutes se sont volatilisés après les réponses apportées à plusieurs questions des journalistes.

Nous l’avons tous entendu par rapport à une éventuelle réforme constitutionnelle, dire ce qui suit : «Gnou woté référendum gnou dorat lène parce que niolène eup dolé» («nous allons à un référendum et nous allons les battre parce que nous sommes plus forts qu’eux»).

Là, il est dans la mêlée, pas au-dessus.
Force est de constater que sa démission n’est que théorique, il reste et restera plus que jamais engagé activement pour son parti. D’autres occasions à l’horizon le confirmeront, à moins qu’il remette cette veste au manteau du bureau politique.

Sur l’amnistie et la loi interprétative
Le President se demande «qui ont été amnistiés» alors que lui et son mentor ont été les premiers à en bénéficier.

Cela m’amène à rappeler les propos de Ousmane Sonko à sa sortie de prison. Face à la presse, il a confirmé avoir discuté avec le Président Macky Sall sur plusieurs points qu’il a préféré nous cacher, en s’arrêtant sur les points de désaccord.

Sur d’autres, il avait également dit qu’il se devait en tant que responsable, à partir d’une incertitude de gagner la Présidentielle, de s’arrêter et d’évaluer l’étape dans laquelle il était avec son parti.

Il a ainsi mentionné les centaines de ses militants en prison dans des conditions très difficiles au moment où il ne se plaignait guère dans son hôtel étoilé, contrairement à son candidat d’antan, devenu President, oubliant son «pantré» exigu.

Très facile n’est-ce pas, après une telle péripétie, de venir aujourd’hui nous dire que lui, Ousmane Sonko, et le parti Pastef ne voulaient pas de l’amnistie.
Les allers et venus entre Pros (en prison) et le Président Macky Sall, ainsi que la visite nocturne de Tata Marème à Mermoz, attestent bien du contraire.
Moustapha Diakhaté a raison de se demander ce qui s’est passé entre le moment des accolades et du prêt de l’avion pour les besoins du Umrah et cette prolongation du «Mortal kombat».

Au lieu de remercier le Président Macky Sall pour le grand boulevard qu’il a ouvert pour qu’il s’y engouffre tout droit au Palais, lui et son mentor continuent de lancer le reste des cocktails Molotov vers le Maroc, via drone invisible, pour amener l’ancien chef d’Etat et ex-ami à arrêter ce qu’il fait dans l’ombre.
Bien sûr, je ne suis pas de ceux qui pensent que quel que soit le scénario, Pastef allait gagner l’election présidentielle passée. Pour moi, tout était possible et une analyse lucide des conditions dans lesquelles le candidat Amadou Ba a été tardivement désigné, les soubresauts préélectoraux, notamment cette tentative de repousser la date de l’élection, la tumultueuse campagne électorale du candidat de Bby abandonné par plusieurs de ses partisans et enfin le pourcentage pas trop élevé du candidat vainqueur attestent indubitablement qu’une election à deux tours était possible. Pour revenir à l’amnistie et à la loi interpretative, j’estime que c’est injuste de dire   : «Def lignouy def rey ay bakhène, amnistié sène bopp. Sou kènene niowè def nonou» («Faire ce qu’ils ont fait, tuer des gens pour ensuite s’auto-amnistier. D’autres viendront et feront la même chose». N’est-ce pas ce qu’a dit Son Excellence ?
Les faits qui nous ont amenés à l’amnistie, partant de 2021 à 2024, sont bien moins vagues que ça Monsieur le Président !

Beaucoup de choses ont précédé les morts auxquels vous faites allusion.
Parlant de «fagagal un adversaire politique» ne les change pas car ils n’avaient justement rien de politique, ensuite sont différents des cas Khalifa et Karim sur lesquels vous adossez votre argumentation.

Le cas Sonko, avec l’accusation injustifiée du Président Macky Sall de complot alors que tout le monde sait qu’il s’agissait d’une affaire entre deux citoyens, ne saurait être considéré comme une tentative de bloquer électoralement un adversaire politique.

C’était de l’attitude responsable du concerné dont dépendait la suite, et malheureusement, les choses se sont enchaînées autrement et ce que nous avons vécu trouble encore nos mémoires et sont loin d’être du «netalli bou rafet» comme le chef de l’Etat le pense.

Cette péripétie de notre histoire est horrible et c’est ce qui nous a conduits là où nous sommes aujourd’hui, avec un pays encore divisé, une amnistie remise en cause par une dangereuse loi interpretative qui cible, entre autres, celles et ceux qui ont défendu la République au prix de leur vie, à des moments où notre pays pouvait basculer.

Pour répondre à la question de la journaliste Astou Dione, Président Diomaye a dit que s’il était à la place du Président Macky Sall à l’époque, «Deuk bi dou yengou» -le pays n’allait pas être dans la tumulte- et «que si les Sénégalais sont sortis pour se battre, c’est parce que la culpabilité n’était pas établie». Il n’appartient pas aux Sénégalais de déterminer la culpabilité dans un dossier de Justice, M. le Président !

La vérité historique est que Ousmane Sonko, après avoir été accuse, a appelé ses partisans à la résistance pour défendre le projet. La réaction des autorités découlant de cela ne peut pas être la cause de l’instabilité que nous avons connue.
L’honorable députée Ousmane Sonko nous rafraîchit la mémoire en interpellant le ministre de la Justice sur la nécessité d’un retour de Adji Sarr, parce que c’est «la principale actrice».

Ce film avait aussi un principal acteur, en l’occurrence son «homonyme».
Sur l’orthodoxie budgétaire : comment peut-on parler d’orthodoxie budgétaire si on reconduit toutes les agences après avoir maintenu tous les fonds, y compris ceux «Harams», gonflé certains budgets et maintenu des postes non rentables comme les chargés de mission sans mission ni bureau ?

Ça aussi, c’est «caser une clientèle politique» au moment où vous rompez des Cdi, contrairement aux seuls Cdd dont vous parlez.

Sur la Justice : Non, Monsieur le président de la République, vous ne pouvez ni ne devez le dire !

Le camarade Amadou Mbengue dit Vieux a raison! Vous ne pouvez pas et ne devez pas cautionner que le Peuple fasse pression sur la Justice : «Manou gnouffi diap ay nit, rapport épinglé lène, Justice bi Di dagou» («On ne peut pas épingler des gens avec des rapports et que la Justice prenne tout son temps au lieu d’aller vite»).

Votre ministre de la Justice, Garde des sceaux, n’a-t-il pas été suffisamment clair devant les députés qui l’interpellaient ?

De toute façon, il fait partie des bons magistrats qui ne se donneront jamais comme mission d’égorger, de dépecer et de servir de la viande fraîche d’opposants à des presidents, etc.

«Rapport doyyoul, la personne est présumée innocente jusqu’à sa condamnation»

«Y’a des faits, mais ça ne suffit pas, il faut faire des enquêtes.»
Pourquoi donc parler de Justice «bouy dagou» ou de pression du Peuple ?
Je ne me retrouve vraiment pas dans votre «logique» M. le Président !
Je termine avec le dialogue politique prévu pour le 28 mai :
«Pourquoi je fais ça», s’est interrogé Son Excellence.
J’ajouterai : Pourquoi maintenant ?
Le Président dit tendre la main à son opposition, pas pour gouverner le Sénégal, car pour lui, «le gouvernement gouverne, l’opposition s’oppose».
Donc la main tendue, c’est seulement sur des questions politiques, malgré la complexité et la gravité de la situation de notre pays.
Fort de cela, je soupçonne nos amis d’en face d’être en possession d’un plan déjà concocté et qui a besoin de l’onction de l’opposition. Mais je suis plus que convaincu que cette dernière ne laissera pas le Président et son parti décider selon leurs manies et leurs phobies, à quelle sauce ils voudraient la manger.
Idrissa SYLLA
New York 
Membre du CC du PIT-Sénégal 
idrissasylla902@gmail.com