Fass Boye, qui a reçu un soutien moral et financier du khalife des Mourides, est figé dans le deuil, surtout que les parents ne pourront pas enterrer leurs enfants inhumés finalement à Sal, au Cap-Vert.Par Cheikh CAMARA –

Le patriarche de Touba, qui a octroyé une enveloppe de 5 millions de F Cfa aux familles des disparus de Fass Boye, qui avait du mal à faire son deuil après avoir perdu une soixantaine de ses enfants, a exhorté les jeunes à «rester au pays car vous pouvez bien réussir sur place». Le guide religieux invite la jeunesse à «travailler dans la discipline», à «bannir la violence dans ce pays, entre autres comportements qui fâchent». Aussi de rappeler «l’importance capitale de l’éducation». Le Khalife général des Mourides, Cheikh Moun­takha Mbacké, par le biais d’une importante délégation dépêchée à Fass Boye pour les besoins de ses condoléances aux familles ayant perdu les leurs dans l’Atlantique, a manifesté son soutien, sa compassion et sa solidarité aux habitants de ce village traditionnel des pê­cheurs.
Par l’intermédiaire des émissaires du khalife de Touba, les autorités religieuses et coutumières de Fass Boye et des villages environnants ont solli­cité auprès de Serigne Moun­takha Mbacké une «médiation» pour la libération des jeunes arrêtés lors des violentes manifestations survenues dans la zone suite aux événements douloureux et tragiques en mer et déférés au Parquet.
Dans ce village, qui continue d’accueillir du monde avec des délégations venues de partout présenter leurs condoléances, tout le monde est accablé. La tristesse se lit sur tous les visages alors que Fass Boye, qui attendait les corps de ses fils disparus, a appris que les dépouilles des victimes ne seront finalement pas rapatriées. Dans tous les coins et recoins de la cité, l’atmosphère bien que lourde reste toutefois surplombée par la foi en Allah, donc l’acceptation de la volonté divine en toute circonstance.

Fass Boye figé dans le deuil
Et ce week-end, tous les imams et notables des 86 villages de la commune de Darou Khoudouss s’étaient retrouvés à Fass Boye pour la tenue d’une séance de lecture du Saint-Coran, priant pour les victimes du chavirement au large des côtes cap-verdiennes de l’embarcation qui avait quitté ce village du département de Tivaouane le 10 juillet dernier avec 101 passagers à son bord. Fass Boye pleure ses enfants. Les jeunes, en particulier, pour marquer le deuil, se retrouvent à toute heure sur la plage d’où est partie la pirogue. Des instants de douleur pénibles, avec le sentiment d’être sacrifiés par l’Etat qu’ils accusent de les avoir délaissés à tort dans la misère collective, dans le désespoir total, au point de risquer leur vie dans les pirogues.
Aujourd’hui, seuls les rescapés du naufrage de la pirogue de Fass Boye ont été rapatriés au Sénégal. Les 7 migrants décédés dans l’échouement de la pirogue en question, seront inhumés au Cap-Vert en raison de l’état dans lequel ils se trouvent. Une décision prise en concertation avec les représentants de la localité qui s’étaient déplacés avec la ministre des Sénégalais de l’extérieur au Cap-Vert.
Dans ce village traditionnel de pêcheurs où presque tout le monde est parent, les familles, très secouées par la disparition de leurs enfants, ne manquent pas d’inviter les autorités à une révision des personnes censées gérer la pêche, les ressources halieutiques, lesquelles se devraient être des gens très imprégnés des réalités du terrain, de la vie des pêcheurs. Et surtout de s’offusquer des «conséquences désastreuses de l’action des bateaux étrangers qui pillent nos mers».
Pour sa part, le Syndicat national des travailleurs des pêches et de l’aquaculture du Sénégal (Sytrapas) de condamner fermement les «actes de vandalisme inqualifiables», perpétrés par des jeunes du village sous le coup de la colère, qui s’en étaient pris à plusieurs édifices dont le poste de contrôle de pêche de Fass Boye où les agents ont subi la furie des pêcheurs, après l’annonce de la découverte de la pirogue qui avait disparu.
Dans ce village, la population lance un appel au chef de l’Etat pour «une assistance au plan social et un suivi psychologique afin d’aider les rescapés à surmonter les moments affreux traversés».
Correspondant