La deuxième session de la Chambre criminelle du Tribunal de grande instance de Fatick pour l’année 2020 s’est tenue ce 19 novembre sous la présidence du nouveau président, Seyni Bodian, et a statué sur trois affaires inscrites au rôle. Reconnus respectivement coupables de meurtre, d’infanticide et de trafic de chanvre indien, Ibrahima Faye, Khady Sarr et Kalice Ndiaye ont été condamnés par le Tribunal à 15, 5 et 10 ans de réclusion criminelle.

Quinze ans de réclusion criminelle. C’est la peine que la Chambre criminelle du Tribunal de grande instance de Fatick a infligée, ce 19 novembre 2020, lors de sa deuxième session de l’année, au sieur Ibrahima Faye reconnu coupable du meurtre de Modou Diagne. Cette affaire, qui traduit une fois de plus la difficile cohabitation entre éleveurs et agriculteurs, est née d’un problème de divagation de bétail ayant entraîné une altercation entre l’agriculteur Ibrahima Faye et l’éleveur Modou Diagne, le 4 novembre 2018, dans la forêt séparant les villages de Thiabé Wolof et Mboudaye, dans le département de Gossas.
Attrait devant la barre du Tribunal, le prévenu a nié les faits de meurtre mais a reconnu avoir asséné un coup de bâton à la tête à son antagoniste, Modou Diagne, qu’il accuse du reste d’avoir laissé son troupeau détruire son champ. Retraçant le film des événements qui lui ont valu sa comparution, Ibrahima Faye a déclaré que le jour des faits, il s’est dirigé vers Modou Diagne dont le troupeau avait fini de détruire son champ pour lui intimer l’ordre de ne plus laisser ses animaux en divagation dans son champ. A en croire toujours M. Faye, c’est sur ces entrefaites que Modou Diagne a sorti un coupe-coupe et a foncé sur lui. Et animé par un instinct de survie, il a asséné un violent coup de bâton à son agresseur avant de s’enfuir pour éviter d’être lynché par les autres éleveurs qui étaient non loin de là.
Par la suite, le mis en cause a été arrêté et poursuivi pour des faits de coups et blessures volontaires devant le Tribunal des flagrants délits. Lors de cette audience, les parents de la victime ont produit un certificat de genre de mort attestant que la victime est décédée des suites de ses blessures. Le certificat de genre de mort dressé le 6 novembre 2018 par le Dr Mamadou Lamine Mbow, chirurgien généraliste au Centre hospitalier régional de Diourbel, faisait état «d’une plaie cranio-cérébrale sans issue de matière cérébrale, un traumatisme cranio-encéphalique avec fracture pariéto-temporale gauche et contusion cérébrale avec engagement cérébral» avant de conclure à une mort causée par un traumatisme cranio-encéphalique ouvert. Le Tribunal s’étant alors déclaré incompétent en raison de la nature criminelle des faits relevés à la suite des débats d’audience, Ibrahima Faye a ensuite été inculpé du chef de meurtre qu’il a contesté lors de sa première comparution.
A l’audience de ce 19 novembre, le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Fatick, Abdoul Aziz Danfakha, a, dans son réquisitoire, estimé que les explications fournies par le prévenu ne sauraient prospérer dans la mesure où, entre autres, il n’est pas en mesure de justifier l’existence du coupe-coupe qu’aurait brandi Modou Diagne pour s’attaquer à lui. Par conséquent, il a demandé au Tribunal de le maintenir dans les liens de la détention en le condamnant à 20 ans de réclusion criminelle pour rendre justice à la victime. Pour sa part, le conseil de Ibrahima Faye, Me Ousseynou Ngom, a tenté par tous les moyens de démonter l’accusation du maître des poursuites. Ainsi, il a axé sa défense sur le fait que l’intention de son client de donner la mort n’était pas établie. Si Ibrahima Faye voulait tuer Modou Diagne, assure-t-il, il ne lui aurait pas asséné un seul coup de bâton.
A la fin de sa plaidoirie, la robe noire a demandé au Tribunal de disqualifier les faits en coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans avoir l’intention de la donner.
Malheureusement, il n’obtiendra pas gain de cause parce que son client a été reconnu coupable de meurtre et devra passer encore 13 ans dans les liens de la détention. A noter que le Tribunal a également jugé irrecevable la constitution de partie civile de l’oncle maternel de la victime, El Hadj Ndiaye. Lequel, à la barre, avait indiqué qu’il ne demande aucune indemnisation mais que tout ce qui intéresse la famille qui l’a mandaté, est que justice soit rendue à son neveu.
En plus de ce cas de meurtre, deux autres affaires ont été inscrites au rôle de cette Chambre criminelle. L’une concerne la dame Khady Sarr âgée de 33 ans et habitant le village de Niodior, dans les îles du Saloum. Accusée d’avoir brisé le cou (ce qu’elle a reconnu sans ambages) de son nouveau-né de sexe féminin avant de l’enterrer dans leur cuisine, elle a été reconnue coupable d’infanticide et condamnée à 5 ans de réclusion criminelle.
La troisième et dernière affaire est relative à un trafic de chanvre indien et contrebande de marchandises prohibées. Le mis en cause, Kalice Ndiaye, âgé de 25 ans, a été reconnu coupable de trafic de chanvre indien et de contrebande de marchandises prohibées. Il a été condamné à 10 ans de réclusion criminelle et devra en outre payer une amende de 1 million 800 mille francs Cfa.