Angélique Kidjo, Fatoumata Diawara et Imany se sont partagé l’affiche, ce mercredi 19 juillet, dans le cadre de la 62e édition du festival «Jazz à Juan», qui se tient dans le Sud de la France. Trois artistes qui se sont emparées de la cause des femmes à différents égards par-delà leur musique.

Elles se sont passé le relais sur scène comme d’autres sur une piste d’athlétisme. En coéquipières bienveillantes les unes avec les autres, se mettant respectivement dans les meilleures conditions pour accomplir leurs performances individuelles successives. Quand Imany, au terme d’un set à l’esthétique aussi travaillée que plaisante, laisse le public de Juan-les-Pins avec «la papesse Angélique Kidjo», celle-ci achève sa prestation sur les incontournables Afirika (rebaptisé Mama Africa par Kids United) et Pata Pata de Miriam Makeba en conviant à son tour, à ses côtés, Fatoumata Diawara, chargée de clore la soirée. En guise de cent mètres, elles se sont données chacune durant une heure, l’équivalent d’un sprint pour ces artistes capables d’endurance. Toutes tendues vers un même objectif que l’on voit apparaître au fil des concerts, au-delà de leurs personnalités et styles différents. Il y a d’abord Imany et sa bande de violoncellistes doux dingues tout de blanc vêtus et encapuchonnés, tous regroupés, le poing levé pendant que défilent les secondes et que seules les cigales continuent de chanter dans les pins parasols voisins. «Il n’y a que la solidarité qui nous sauvera», lance la chanteuse française aux origines comoriennes, après avoir défini son spectacle Voodoo Cello comme «un concept pour se libérer».

Puis, c’est la diva béninoise, fidèle à son tempérament de pile électrique, qui introduit son hommage à Celia Cruz, à laquelle elle a consacré un album en 2021, en expliquant que la Cubaine lui avait «tout à coup donné des ailes» lorsqu’elle était venue jouer au Bénin dans les années 70 : la salsa, «musique de mecs» comme l’imaginait jusque-là la jeune Angélique, pouvait donc se décliner au féminin ! «Donc vous, les femmes, vivez votre vie, faites ce que vous avez envie de faire !», conclut avec autorité celle qui a reçu, en mai à Stockholm, le Polar Prize, considéré comme le Nobel de la musique. En écho à ses propos, la Malienne Fatoumata Diawara dédie, elle aussi, un titre de son répertoire «à toutes les femmes de la planète» entre deux riffs de guitare qui font lever l’assistance d’elle-même. Exactement ce qu’attendaient les organisateurs : «Chacune [des chanteuses] va porter quelque chose au-delà de la musique, délivrer un message, et on aime ce principe-là qui est évidemment politique, sachant que par essence on veut que ce soit la fête sur scène», prédisait quelques heures plus tôt Reno Di Matteo, coprogrammateur de l’édition 2023 de Jazz à Juan. Sur le plan artistique, l’idée était de «montrer que le jazz est soluble dans les autres musiques», ajoute-t-il, heureux que les étoiles se soient alignées pour réunir le même soir ces trois chanteuses, filles du continent africain et de l’Océan indien.
Rfi Musique